Homélie prononcée par Benoît XVI le 15 août

La leçon de Marie à l’Assomption : donner sa vie pour ne pas la perdre

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ROME, Dimanche 19 août 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de la messe qu’il a célébrée à Castel Gandolfo, le 15 août dernier.

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Chers frères et sœurs,

Dans sa grande œuvre « La Cité de Dieu », saint Augustin dit une fois que toute l’histoire humaine, l’histoire du monde, est une lutte entre deux amours : l’amour de Dieu jusqu’à se perdre soi-même, jusqu’au don de soi, et l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu, jusqu’à la haine des autres. Cette même interprétation de l’histoire, comme lutte entre deux amours, entre l’amour et l’égoïsme, apparaît également dans la lecture tirée de l’Apocalypse, que nous venons d’écouter. Ici, ces deux amours apparaissent à travers deux grandes figures. Avant tout, il y a le dragon rouge, très puissant, avec une manifestation impressionnante et inquiétante du pouvoir sans grâce, sans amour, de l’égoïsme absolu, de la terreur, de la violence.

Au moment où saint Jean écrivit l’Apocalypse, ce dragon était pour lui la représentation du pouvoir des empereurs romains anti-chrétiens, de Néron à Domitien. Ce pouvoir apparaissait illimité ; le pouvoir militaire, politique, propagandiste de l’empire romain était tel que devant lui, la foi, l’Eglise, apparaissait comme une femme sans défense, sans possibilité de survivre, encore moins de vaincre. Qui pouvait s’opposer à ce pouvoir omniprésent, qui semblait en mesure de tout faire ? Et toutefois, nous savons qu’à la fin, la femme sans défense a vaincu ; ce n’est pas l’égoïsme, ce n’est pas la haine qui a vaincu, mais l’amour de Dieu, et l’empire romain s’est ouvert à la foi chrétienne.

Les paroles de l’Ecriture Sainte transcendent toujours le moment historique. Et ainsi, ce dragon indique non seulement le pouvoir anti-chrétien des persécuteurs de l’Eglise de ce temps, mais les dictatures matérialistes anti-chrétiennes de tous les temps. Nous voyons de nouveau réalisés ce pouvoir, cette puissance du dragon rouge, dans les grandes dictatures du siècle dernier : la dictature du nazisme et la dictature de Staline avaient tous les pouvoirs, elles pénétraient chaque recoin, l’ultime recoin. Il semblait impossible qu’à long terme, la foi puisse survivre face à ce dragon si fort, qui voulait dévorer le Dieu qui s’était fait enfant et la femme, l’Eglise. Mais en réalité, dans ce cas également, à la fin, l’amour a été plus fort que la haine.

Ce dragon existe encore aujourd’hui, sous des formes nouvelles, différentes. Il existe sous la forme des idéologies matérialistes qui nous disent qu’il est absurde de penser à Dieu, d’observer les commandements de Dieu, que cela appartient au passé. Il vaut uniquement la peine de vivre sa vie pour soi, de prendre dans ce bref moment de la vie tout ce que nous pouvons en tirer. Seuls la consommation, l’égoïsme, le divertissement valent la peine. Voilà la vie. C’est ainsi que nous devons vivre. Et à nouveau, il semble absurde, impossible de s’opposer à cette mentalité dominante, avec toute sa force médiatique, de propagande. Il semble impossible aujourd’hui encore de penser à un Dieu qui a créé l’homme et qui s’est fait enfant et qui serait le véritable dominateur du monde.

Ce dragon apparaît encore aujourd’hui invincible, mais il reste vrai encore aujourd’hui que Dieu est plus fort que le dragon, que c’est l’amour qui l’emporte, et non l’égoïsme. Ayant considéré les diverses configurations historiques du dragon, voyons à présent l’autre image : la femme vêtue de soleil avec la lune sous ses pieds et entourée de douze étoiles. Cette image revêt également plusieurs dimensions. Une première signification est sans aucun doute qu’il s’agit de la Vierge, de Marie vêtue de soleil, c’est-à-dire entièrement de Dieu ; Marie qui vit en Dieu, entièrement, entourée et pénétrée de la lumière de Dieu. Entourée de douze étoiles, c’est-à-dire des douze tribus d’Israël, de tout le Peuple de Dieu, de toute la communion des saints, et avec à ses pieds la lune, image de la mort et de la mortalité. Marie a laissé la mort derrière elle ; elle est entièrement revêtue de vie, elle est élevée corps et âme dans la gloire de Dieu et ainsi, étant placée dans la gloire, ayant surmonté la mort, elle nous dit : courage, à la fin l’amour est vainqueur ! Ma vie consistait à dire : je suis la servante de Dieu, ma vie était le don de moi-même à Dieu et à mon prochain. Et cette vie de service débouche à présent sur la vie véritable. Ayez confiance, ayez le courage de vivre ainsi vous aussi, contre toutes les menaces du dragon.

Telle est la première signification de la femme que Marie a réussi à être. La « femme vêtue de soleil » est le grand signe de la victoire de l’amour, de la victoire du bien, de la victoire de Dieu. Un grand signe de réconfort. Mais ensuite, cette femme qui souffre, qui doit fuir, qui enfante dans un cri de douleur, est également l’Eglise, l’Eglise en pèlerinage de tous les temps. A toutes les générations, elle doit à nouveau enfanter le Christ, l’apporter au monde avec une grande douleur, dans ce monde de souffrance. Persécutée à toutes les époques, elle vit comme dans le désert persécutée par le dragon. Mais en tous temps, l’Eglise, le Peuple de Dieu vit également de la lumière de Dieu et est nourri, comme dit l’Evangile, de Dieu, nourri lui-même avec le pain de la Sainte Eucharistie. Et ainsi, dans toutes les vicissitudes, dans les différentes situations de l’Eglise au cours des temps, dans les diverses parties du monde, en souffrant, elle est vainqueur. Et elle est la présence, la garantie de l’amour de Dieu contre toutes les idéologies de la haine et de l’égoïsme.

Nous voyons certainement qu’aujourd’hui encore, le dragon veut dévorer le Dieu qui s’est fait enfant. N’ayez pas peur pour ce Dieu apparemment faible. La lutte a déjà été surmontée. Aujourd’hui encore, ce Dieu faible est fort : il est la véritable force. Et ainsi, la fête de l’Assomption est l’invitation à avoir confiance en Dieu et elle est également une invitation à imiter Marie dans ce qu’Elle a dit elle-même : Je suis la servante du Seigneur, je me mets à la disposition du Seigneur. Telle est la leçon : suivre sa voie ; donner notre vie et ne pas prendre la vie. Et précisément ainsi, nous sommes sur le chemin de l’amour qui signifie se perdre, mais une façon de se perdre qui en réalité est l’unique voie pour se trouver véritablement, pour trouver la vraie vie.

Tournons notre regard vers Marie, élevée au ciel. Laissons-nous conduire vers la foi et la fête de la joie : Dieu est vainqueur. La foi apparemment faible est la véritable force du monde. L’amour est plus fort que la haine. Et nous disons avec Elisabeth : Bénie sois-tu entre toutes les femmes. Nous te prions avec toute l’Eglise : Sainte Marie, prie pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort. Amen.

© Copyright du texte original en italien : Librairie Editrice Vaticane
Traduction réalisée par Zenit

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ZENIT Staff

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