Shahbaz Bhatti, modèle de dialogue

Biographie italienne du ministre assassiné

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H. Sergio Mora

ROME, jeudi 22 mars 2012 (ZENIT.org) – Une année après l’assassinat du ministre pakistanais Shahbaz Bhatti (2 mars 2011), sa biographie vient de paraître en italien. Un modèle de dialogue « authentique et fécond », souligne le cardinal Tauran, parce que fondé sur la « conviction de sa foi ».

La biographie, intitulée « Vie et martyre d’un chrétien au Pakistan » et écrite par Roberto Zuccolini et Roberto Pietrolucci, a été présentée vendredi 16 mars à la basilique de San Bartolomeo, en présence de quelque 800 personnes.

Le cardinal Jean-Louis Pierre Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, Andrea Riccardi, ministre pour la Coopération Internationale et l’Intégration, Paul Bhatti, frère de Shahbaz et conseiller spécial du premier ministre du Pakistan pour les Affaires des minorités, Marco Tarquinio, directeur du quotidien catholique Avvenire, ont participé à cette présentation.

La basilique de San Bartolomeo, située sur l’île Tibérine, conserve la Bible de Shahbaz, dont il ne se séparait jamais et avec laquelle il avait médité peu avant d’être assassiné. Selon les mots du ministre Andrea Ricardi, Shahbaz Bhatti était un « catholique convaincu que Jésus était la force de sa vie » et qui voyait dans la Bible « une compagne quotidienne ».

« J’offre ma vie pour le dialogue interreligieux »

Durant son intervention, le cardinal Jean Louis Tauran a défini Shahbaz Bhatti comme « un martyr du dialogue », qui était conscient que son engagement politique pouvait lui coûter la vie. Le cardinal s’est souvenu à ce propos de leur dernière rencontre, à l’aéroport d’Islamabad, où Bhatti lui avait confié: « Je sais qu’ils me tueront, j’offre ma vie pour le dialogue interreligieux ».

Pour le cardinal français, le martyre de Shahbaz Bhatti n’est pas un martyre « contre les autres » mais une façon de « donner sa vie pour tous ».

Shahbaz Bhatti priait et connaissait le Catéchisme de l’Eglise catholique, a affirmé le cardinal : « Ainsi le dialogue était fécond, avec lui il n’y avait pas de relativisme ». En effet, pour un dialogue « authentique et fécond », a-t-il expliqué, les partis doivent d’abord « connaître le contenu de leur foi et religion, de façon à pouvoir dialoguer avec les idées claires ». C’est le contraire du relativisme, « qui ne permet pas de dialoguer sur une quelconque base ».

Zenit a demandé par ailleurs au cardinal s’il y avait les éléments essentiels pour ouvrir un procès de béatification pour Shahbaz: « c’est une tâche qui appartient à l’Eglise locale », a-t-il répondu, ajoutant, toutefois, que Bhatti est « sans aucun doute la figure d’un vrai martyr ».

Fier d’être pakistanais

Le directeur d’Avvenire, Marco Tarquinio, a souligné que « Shahbaz était un homme qui n’avait jamais pensé à quitter le Pakistan, comme il arrive dans d’autres pays où les minorités sont persécutées ».

Ce n’était pas, a-t-il précisé, une certitude « improvisée » mais « un choix fait très jeune », sachant qu’à 17 ans, il avait déjà décidé de s’engager pour les minorités et pour le dialogue, non pas de façon « optionnelle » mais « fondamentale ».

Le ministre Andrea Riccardi a rappelé que Shabhaz voyait dans les racines du Pakistan un « choix pluriel, démocratique et laïc, non pas théocratique, ni conduit par des militaires ». C’était un homme, a-t-il poursuivi, qui ne concevait pas son destin « hors du Pakistan », un chrétien « fier d’être pakistanais », et qui était aussi « au service des musulmans » en étant facteur de pluralisme.

Le ministre a confirmé également que « Shahbaz savait qu’il était la cible des talibans et d’Al-Qaeda » et s’il n’a pas « cherché la mort », il n’a pas non plus « reculé devant le danger ».

La religion ne doit pas diviser mais unir

Son frère Paul a confié que lorsque quelqu’un, craignant pour sa vie, lui conseilla de rester en Italie sans retourner au Pakistan, Shahbaz lui avait répondu: “Et qui peut me garantir qu’en Italie la mort n’existe pas ?”

Déjà tout petit, a raconté Paul Bhatti, on voyait en lui un « charisme spécial » et une « forte foi ». C’était un homme qui ne se contentait pas de « prêcher » mais qui a aussi « pratiqué », ayant lui-même souffert à 18 ans de l’accusation de blasphème.

Shahbaz Bhatti, a expliqué son frère, a fondé très jeune le Parti de Libération Chrétienne, et finalement l’a rebaptisé « Alliance de toutes les minorités », « car la religion ne doit pas diviser mais unir ».

S’il y avait en lui un désir très fort de dialogue, a insisté Paul Bhatti, il ne lui manquait pas non plus celui de la justice : par exemple, lorsqu’un village chrétien était brûlé, Shahbaz menait des actions pour que la police trouve immédiatement les responsables. Il s’est battu en ce sens pour changer la loi anti-blasphème, mais surtout pour faire évoluer une certaine mentalité, enracinée dans les problèmes d’analphabétisme et de pauvreté.

Paul Bhatti a témoigné par ailleurs qu’aux funérailles de son frère, de nombreuses personnes pleuraient, convaincues qu’il s’agissait d’un homme de Dieu, comme le Premier ministre du Canada, qui a affirmé : « J’ai parlé cinq minutes avec lui et ça a changé toute ma vie ». 

En conclusion, Paul Bhatti a mentionné, parmi les fruits concrets du martyre de son frère, qu’il y a actuellement 4 parlementaires sur 54 élus parmi les minorités, au Pakistan.

[Traduit par Anne Kurian]

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ZENIT Staff

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