L'évangélisation est comme l'eau : si elle ne coule pas, elle est morte

Interview de Mgr John Tong, évêque de Hong Kong

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Traduction d’Hélène Ginabat

ROME, lundi 10 septembre 2012 (ZENIT.org) – « L’eau qui ne coule pas est une eau morte » dit un proverbe chinois. Pour Mgr John Tong, il en va de même avec l’évangélisation. La foi s’approfondit quand on la partage, explique-t-il.

Le zèle missionnaire de l’évêque de Hong Kong dépasse les limites de son diocèse et il veut faire de son Eglise « un pont » vers les catholiques de Chine : « nous partageons notre foi avec eux, et nous apprenons de leurs souffrances », affirme-t-il.

Mgr John Tong, créé cardinal par Benoît XVI en février 2012, a accordé une interview à Mark Riedemann pour l’émission télévisée hebdomadaire « Là où Dieu pleure », en coopération avec l’Aide à l’Eglise en détresse.

Excellence, vous êtes né à Hong Kong mais vous êtes rapidement parti en Chine.

Mgr John Tong – … parce que les Japonais avaient envahi Hong Kong

A cette époque, votre famille n’était pas chrétienne, ni catholique. Comment êtes-vous arrivé à la foi catholique en Chine communiste ?

Ma mère avait étudié dans un lycée tenu par des sœurs canossiennes à Hong Kong. La foi avait été semée en elle lorsqu’elle était au lycée catholique.

Après la guerre, elle a décidé de rejoindre l’Eglise catholique. Elle a été la première de la famille à se convertir. Nous avons tous suivi rapidement. Nous avons tous été baptisés dans le canton de Guangzhou, en Chine.

Y a-t-il eu aussi un missionnaire à l’origine de votre vocation ?

Après la seconde guerre mondiale, en Chine, les nationalistes et les communistes ont commencé à se battre. Nous vivions tout près de la chapelle des Missions. Nous étions très près de l’église et proches du prêtre. J’étais témoin, chaque jour, des nombreux réfugiés et soldats blessés qui se rassemblaient autour de l’église  pour demander de l’argent, de la nourriture ou toute autre forme d’aide. Le prêtre était un missionnaire américain, de Maryknoll ; il était rempli de l’amour du Christ, et c’est ce que je voyais qui m’a inspiré, l’exemple qu’il donnait. J’étais encore jeune et je me suis dit que j’aimerais lui ressembler quand je serais grand. En 1951, tous les missionnaires étrangers ont été expulsés. L’Eglise de Chine, à Guangzhou, et tous les catholiques nous ont dit qu’il valait mieux que nous quittions la Chine. Ces catholiques m’ont aussi exhorté à devenir servant d’autel et à rejoindre éventuellement le séminaire. J’étais trop jeune à cette époque et je n’avais ni la maturité ni une connaissance très profonde de ce qu’était le sacerdoce, mais le bon exemple de notre pasteur à planté en mon cœur la semence de la vocation sacerdotale. La situation difficile d’alors m’a aidé à décider de devenir prêtre. Mes parents n’ont pas hésité et ont accepté facilement. Ils m’ont dit : « Pourquoi pas ? Tu peux quitter la Chine, avance », et tout doucement, ma vocation s’est approfondie.

Vous êtes évêque de Hong Kong et vous vous concentrez sur l’évangélisation. Vous avez choisi deux symboles pour représenter votre travail d’évangélisation : le premier est un réservoir d’eau et le second représente un lavement de mains. En quoi ces symboles sont-ils importants pour vous et que signifient-ils ?

Autrefois, à Hong Kong, nous avions besoin de réservoirs afin d’avoir suffisamment d’eau à boire et pour nous laver. C’est nécessaire pour la vie. Un proverbe chinois dit ceci : « L’eau qui ne coule pas est une eau morte ». Elle ne sert à rien. Le réservoir symbolise l’eau que l’on accueille et qui en même temps doit être utilisée et partagée, sinon cette eau inutilisée devient une eau morte. On peut appliquer ce symbole à l’évangélisation : si nous recevons notre foi, nous devons la partager avec les autres, comme l’eau du réservoir. C’est en partageant notre foi qu’elle s’approfondit. Le lavement des mains symbolise la solidarité et la réciprocité. C’est comme le « travail de pont » que j’effectue en Chine. D’un côté, nous aidons l’Eglise de Chine en lui apportant un renouveau et en même temps nous apprenons d’eux, des difficultés auxquelles ils font face en pratiquant leur foi. Nous partageons notre foi avec eux, et nous apprenons de leurs souffrances. C’est le symbole du lavement des mains.

L’évangélisation a connu un grand essor à Hong Kong. Ces dernières années, vous avez eu entre 2.000 et 3.000 conversions. Qu’est-ce qui est à l’origine d’une réponse si positive parmi les adultes à Hong Kong ?

Je pense que la conversion dépend de l’Esprit-Saint, de la grâce de Dieu ; quels que soient nos efforts, sans la grâce de Dieu, les personnes n’ouvriront pas leur cœur. C’est le premier point. Le second, c’est que Dieu se sert toujours de nous comme instruments pour l’évangélisation. Nous devons donc faire de notre mieux. Dans une lettre pastorale, j’ai partagé mes quatre rêves avec les fidèles de mon diocèse. Le premier concerne l’évangélisation. Il faut que nous augmentions le nombre des convertis. Le second concerne les vocations. Le nombre des vocations est loin d’être idéal. Il faut que les catholiques aient un esprit missionnaire et nous avons besoin de prêtres pour former les catholiques. Mon troisième rêve porte sur le soin que nous devons accorder aux catholiques d’autres nationalités. En plus des 350.000 catholiques chinois, nous en avons 180.000 d’autres nationalités, dont les deux tiers sont des femmes philippines qui travaillent à Hong Kong comme employées de maison. Et le quatrième consiste à être un pont pour les catholiques de Chine.

Comment voyez-vous le rôle des catholiques de Hong Kong vis-à-vis des catholiques chinois ?

Le cardinal Wu disait toujours que, à cause de notre langue commune et de notre sang commun, nous sommes de la même nationalité. Tous les catholiques devraient manifester leur préoccupation pour la Chine. Nous devrions faire davantage en raison de notre proximité culturelle et géographique ; nous devrions être l’Eglise « pont ». Concrètement, quel peut être le rôle d’une Eglise-pont ? Il y a des distances, et il existe toujours un conflit entre l’Eglise souterraine et l’Eglise ouverte. L’objectif du pont est de réconcilier ces différents groupes et de promouvoir la pleine communion de l’Eglise de Chine avec l’Eglise universelle et avec le Saint-Père. C’est notre rôle. 

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ZENIT Staff

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