ROME, Lundi 11 avril 2011 (ZENIT.org) – Au Bangladesh, les chrétiens aborigènes souffrent d’une discrimination croissante, annonce « Eglises d’Asie », l’agence des Missions étrangères de Paris.
Le 6 avril dernier, des chrétiens aborigènes ont manifesté contre la discrimination croissante que subissent les peuples indigènes au Bangladesh, et en particulier la violation de leurs droits les plus fondamentaux comme l’usage de leurs terres. Plus de 160 membres des ethnies garo, koach, barmon et rajbangshi ont formé une longue chaîne humaine à Tangai dans le diocèse de Mymensingh, situé dans le nord du pays. Au nom des 40 000 aborigènes qui vivent dans cette région montagneuse où s’étend la jungle du Madhupur, ils ont dénoncé la lente agonie de leurs peuples.
L’une des causes de leur colère était la récente décision d’un comité parlementaire chargé de réviser la constitution qui a classé les communautés indigènes non comme des « groupes aborigènes », comme elles le réclamaient depuis des années, mais dans la catégorie des « minorités ethniques ».
« Cette décision est un affront fait aux peuples aborigènes et surtout une violation de la déclaration des droits des peuples indigènes de 2007 (1) », s’indigne Eugène Nokrek, président du Conseil pour le développement du peuple Joenshahi. Depuis une trentaine d’années, ajoute-t-il, la situation ne cesse de se dégrader et « le Département des Forêts [du Bangladesh] ignorant nos droits sur les terres ancestrales, multiplie les expulsion de nos communautés en vue de créer des parcs naturels ».
Selon les médias, en cinq ans seulement, 8 100 hectares de la forêt du Madhupur ont été illégalement saisis par des personnes influentes. Plusieurs rapports émanant d’ONG affirment qu’un grand nombre d’aborigènes, y compris certains de leurs chefs, ont été tués lors d’affrontements avec les fonctionnaires du Département des Forêts dans le cadre d’expropriations. Selon les leaders des communautés indigènes, « l’éco-tourisme » et la création de réserves naturelles sont les motifs les plus fréquemment invoqués pour se saisir de leurs terres « sans avoir demandé l’accord de ceux qui y vivent depuis des siècles ».
Shishilia Snal, une aborigène garo (2) âgée de 36 ans, se souvient du jour où des gardes forestiers lui ont tiré dessus, alors qu’elle ramassait du bois pour le feu dans la jungle. « Ils ne nous considèrent pas comme des êtres humains et ils essayent souvent de violer les femmes », dit-elle.
Dans un Etat où la population est musulmane à 90 %, les aborigènes se démarquent également par leur identité religieuse, chrétienne et très majoritairement catholique. Dès le XVIe siècle, la présence d’une communauté catholique est attestée dans la région de l’actuel diocèse de Mymensingh, érigé en 1987 à partir d’une partition de l’archidiocèse de Dacca. Au début du XXe siècle, l’Eglise reçoit une nouvelle impulsion quand cinq Garos de religion baptiste (majoritaire à l’époque) parcoururent 150 Km pour demander des prêtres catholiques à l’évêque de Dacca. Le catholicisme se développe alors rapidement dans la région de Mymensingh et aux alentours, essentiellement parmi les populations aborigènes.
Le dernier recensement du diocèse de Mymensingh (2006) évalue à 73 000 le nombre de baptisés, soit 0, 5 % de la population du territoire qui compte une dizaine de paroisses et une vingtaine de prêtres diocésains. Le P. Joyonto Raksam, responsable du service des vocations du diocèse de Mymensingh témoigne qu’« il y a beaucoup de candidats au sacerdoce, souvent issus des populations aborigènes ». L’actuel évêque de Mymensingh, Mgr Paul Ponen Kubi, aborigène garo, est devenu lorsqu’il a été ordonné évêque auxiliaire le 13 février 2004, le premier évêque « adivasi » (autochtone) du Bangladesh (3).
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(1) La déclaration des droits des peuples autochtones a été adoptée par l’Assemblée générale de l’ONU en septembre 2007. Elle affirme entre autres le droit des peuples indigènes à l’autodétermination concernant leur développement économique, social et culturel. Elle stipule également que les communautés autochtones ne peuvent être expulsées de leurs terres et doivent pouvoir disposer des richesses naturelles qui s’y trouvent.
(2) Les Garos, de langue tibeto-birmane, se répartissent essentiellement dans la région du Nord-Est de l’Inde (surtout au Meghalaya) et au Bangladesh, en particulier dans la région du « grand district de Mymensingh ». Voir « La Maison des Mandis », Pour approfondir – EDA 173
(3) Ucanews, 8 avril 2011.Voir EDA 292, EDA 529, 392
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