ROME, Vendredi 19 octobre 2007 (ZENIT.org) – L’Eglise invite aujourd’hui tous les chrétiens à s’engager dans la nouvelle évangélisation. Mais comment évangéliser ?
C’est pour tenter de répondre à cette question que Jean-Luc Moens, membre de la Communauté de l’Emmanuel, qui a participé à différents grands projets missionnaires, comme les congrès internationaux pour la nouvelle évangélisation de Vienne, Paris, Lisbonne, Bruxelles et Budapest, vient de publier, aux éditions de l’Emmanuel, un livre intitulé « L’imitation de Jésus Christ missionnaire ».
Il présente son ouvrage dans cet entretien à ZENIT, dont nous publions ci-dessous la première partie.
Zenit – Comment est née l’idée de ce livre ?
J.-L. Moens – L’intuition de ce livre est basée sur une affirmation très forte du pape Paul VI dans son exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi, un document qui a 32 ans et pas une ride ! Il écrit : « Jésus lui-même, Évangile de Dieu, a été le tout premier et le plus grand évangélisateur. Il l’a été jusqu’au bout : jusqu’à la perfection, jusqu’au sacrifice de sa vie terrestre. » (§7) Aujourd’hui, l’Église et les papes successifs nous invitent à une nouvelle évangélisation. Cette invitation s’adresse à tous, y compris aux laïcs. La question que beaucoup se posent est de savoir comment faire. Si j’ai écris ce livre, c’est justement pour donner une réponse à ce « comment ». Ma réponse est simple, si j’ose dire : je propose d’imiter Jésus ! En effet, si Jésus est le missionnaire parfait, nous avons un modèle à suivre pour devenir à notre tour missionnaire et répondre ainsi à son appel d’aller et d’annoncer la Bonne Nouvelle à toute la terre.
Zenit – Vous proposez à vos lecteurs d’imiter le Christ. N’est-ce pas mettre la barre un peu haut ? N’allez-vous pas plutôt les décourager ?
J.-L. Moens – La vie chrétienne consiste à suivre le Christ et à l’imiter. C’est ce qu’ont fait tous les saints. Ils l’ont fait par amour de Jésus. Le bienheureux Charles de Foucauld, par exemple, écrivait : « L’imitation est inséparable de l’amour : c’est le secret de ma vie. J’ai perdu mon cœur pour ce Jésus de Nazareth […] et je passe ma vie à chercher à l’imiter autant que le peut ma faiblesse. » La question n’est donc pas de se demander si l’imiter est difficile ou non. La question est plutôt d’accepter que notre vocation de chrétien consiste à imiter, à suivre le Christ. En Jésus, Dieu s’est fait homme pour que nous puissions l’imiter ! Dans ce parcours d’imitation qui n’est autre que notre appel commun à la sainteté, nous ne sommes pas laissés à nos propres forces. Jésus est avec nous, sa grâce nous précède.
D’autre part, chacun de nous est interpelé par une facette de la personnalité très riche du Christ. François et Claire d’Assise ont imité sa pauvreté. Vincent de Paul et mère Teresa ont imité sa charité. La petite Thérèse a été marquée par sa miséricorde. St François-Xavier a mis en pratique son appel à évangéliser toutes les nations… Dans mon livre, je propose de multiples manières d’imiter Jésus missionnaire. Il est clair que si vous voulez l’imiter en faisant des miracles comme lui, le chemin s’annonce difficile ! Mais Jésus n’a pas évangélisé seulement en prêchant et en faisant des miracles.
Zenit – Quelles pistes proposez-vous à la suite du Christ ?
J.-L. Moens – Je propose 7 grandes pistes qui constituent les 7 chapitres du livre. Dans chaque chapitre, je suggère des chemins très concrets et accessibles à tous pour devenir missionnaire à la suite de Jésus.
La première chose qui m’a frappé lorsque j’ai médité sur la manière que Dieu a utilisée pour nous évangéliser, c’est l’incarnation ! Quand Dieu veut nous évangéliser, nous sauver, il envoie son Fils unique qui devient l’un de nous ! Ceci est absolument révolutionnaire ! Dieu n’est pas comme les techniciens qui manipulent des substances radioactives par l’intermédiaire de robots à l’abri de vitres blindées. Quand Dieu veut nous sauver du péché, il se fait homme. Il n’a pas peur de se salir les mains ! Il prend sur lui notre misère. Il prend notre chair. En devenant homme, il donne à la nature humaine une dignité extraordinaire. Il mène une vie semblable à la nôtre, excepté le péché. Il se fait proche. Toute évangélisation comporte, d’une manière ou d’une autre, ce mouvement pour se rapprocher de l’autre. C’est ce qu’ont fait les missionnaires qui sont partis au loin. Ils ont appris la langue, la culture des peuples auxquels ils étaient envoyés. Mais le mouvement de l’incarnation nous enseigne davantage. On peut en tirer bien des leçons pratiques pour nous aider dans nos différentes missions. L’écoute, par exemple. Les gens croient souvent qu’évangéliser, c’est parler. Il y a une part de vrai, évidemment, mais je pense que cela ne peut se faire qu’après avoir écouté l’autre, avoir appris à le connaître…
Une seconde chose qui m’a interpellé, c’est l’union du Christ avec son Père. Jésus n’est pas tombé dans un activisme effréné. Il a toujours mis l’union avec son Père à la première place. Sa nourriture était de faire la volonté de son Père. Pour cela, il a entretenu une vie de prière intense. Les Evangélistes nous le montrent souvent passant des nuits sur la montagne en prière. Là est le secret de toute évangélisation : la prière et l’union à Dieu. Jésus nous rappelle ce point essentiel. La Vierge Marie le fait aussi quand elle nous invite, à Lourdes, à Fatima, à prier pour les pécheurs. La prière est un acte éminemment missionnaire !
Il fut un temps où on parlait beaucoup de la prière d’intercession pour les pécheurs. Aujourd’hui, ce sujet est beaucoup moins présent. Or si nous voulons devenir des imitateurs missionnaires de Jésus, l’intercession pour les pécheurs est essentielle. Et prier n’est pas si difficile ! C’est à la portée de chacun de nous ! Si nous savions la force de la prière ! J’essaie dans mon livre de donner des exemples pour nous encourager à intercéder toujours plus… Dieu attend notre prière pour nos frères. Il veut nous exaucer !
Zenit – Vous consacrez aussi tout un chapitre à l’Esprit Saint. Pourquoi ?
Je suis convaincu que l’Esprit Saint est la clef de toute évangélisation. Les Evangiles nous montrent qu’il a été le moteur de la mission du Christ, dont saint Luc nous dit qu’il était « rempli d’Esprit Saint » (Lc 4, 1), « mené par l’Esprit » (ibidem), et qu’il agissait « avec la puissance de l’Esprit… » (Lc 4, 14). Toute la vie et la mission du Christ se déroulent dans une totale communion avec l’Esprit Saint, nous dit le Compendium du Catéchisme de l’Église catholique (n. 265).
Ce qui est extraordinaire, c’est que Jésus n’a pas voulu garder l’Esprit Saint pour lui. Il nous l’a promis. Il nous l’a donné. Chacun de nous, baptisés et confirmés, nous avons reçu l’Esprit Saint en plénitude. À chaque communion, nous recevons le corps du Christ où flambe l’Esprit. Si nous nous laissons conduire par cet Esprit, nous deviendrons des imitateurs du Christ et il fera de nous des missionnaires. C’est ce qui s’est passé à la Pentecôte avec les apôtres qui n’avaient pas été très courageux pendant la passion de Jésus. Sous l’action de l’Esprit, les voilà qui sortent et parlent à une foule nombreuse. Les Actes disent même qu’ils étaient compris par des personnes parlant des langues très différentes…