LILLE, Vendredi 24 septembre (ZENIT.org) – L’aula maxima de l’Université Catholique de Lille était trop petite hier soir pour la séance d’ouverture des Etats Généraux du Christianisme. D’autres salles de l’université catholique de Lille ont été réquisitionnées pour abriter tous les participants. Parmi les premiers intervenants, Jean-Pierre Denis, le directeur de rédaction du magazine La Vie qui organise cette rencontre. Mais également Monseigneur Laurent Ulrich, archevêque de Lille et vice-président de la Conférence épiscopale de France.
Pour Mgr Ulrich, le thème choisi, « Notre époque a-t-elle besoin de Dieu ? » est né d’un paradoxe inattendu. En effet, il y a encore 50 ans, « la sécularisation conquérante et nourrie des présupposés d’une science systématisée par les accents du positivisme » fournissait une réponse à cette question : Dieu n’était plus nécessaire. Mais depuis 15 ans, constate le prélat, un changement a lieu : « le processus de la sécularisation, sérieusement soupçonné d’être le pire ennemi des religions, permet aujourd’hui une avancée très intéressante de la liberté religieuse ». Car sur le fond de cette sécularisation, la question de la transcendance rejaillit fortement. Dans le contexte actuel de « la post-sécularisation », une véritable soif des hommes se fait jour face à une vie qui rejetterait les questions existentielles. Et c’est ici que l’interrogation au cœur du thème de ces Etats Généraux doit être envisagée à nouveaux frais, avec deux questions primordiales : « Sommes-nous en mesure d’éveiller le désir de Dieu ? » et « Sommes nous prêts à être suffisamment contagieux face à cette interrogation ? »
La réponse à la première question passe à la fois par une rencontre entre les hommes de bonne volonté, et par le renoncement à toute « suprématie intellectuelle quant à l’explication de ce monde ». Si Dieu est Dieu, ajoutait l’archevêque, « ne nous demande-t-il pas humblement d’être le sel au milieu de notre terreau sociologique ? », attentifs à tous les hommes. En effet, dans un monde où l’individualisation est devenue une manière de vivre, il incombe de trouver une manière de « restructurer l’organisation sociale pour vivre ensemble à partir de ces singularités ». Et les chrétiens, pour Monseigneur Ulrich, ont des réponses à offrir.
L’archevêque concluait son propos en reprenant le « retournement de pensée » proposé par Benoît XVI ; dans un monde désarticulé, où la morale devait se construire en dehors de Dieu, pourquoi aujourd’hui ne pas faire « comme si Dieu existait » ?
Dans un second temps, un débat autour de la présence chrétienne dans lé débat public a mobilisé plusieurs intervenant. Bruno Cazin, vice recteur de l’université catholique de Lille, a marqué les esprits avec le rappel de la place importante de la Croix dans la foi, comme lieu où Dieu vient tendre la main à l’homme pour le ressusciter.
De son côté, François Soulage, président du Secours Catholique, a rappelé que le débat public n’était pas uniquement constitué par la parole : « C’est aussi ce qui est fait », a-t-il complété. Mr Soulage regrette en effet l’impossibilité du dialogue entre « ceux qui sont sur le terrain et les acteurs politiques », qui constitue une coupure dramatique. Pour lui, il est évident que les chrétiens doivent se considérer comme des acteurs sociaux. « La présence des chrétiens ne peut trouver son sens que parce qu’on est sur le terrain », a-t-il expliqué.
L’enseignement social de l’Eglise, que les chrétiens sont invités à mettre en œuvre, se focalise aujourd’hui, selon le président su Secours Catholique, autour de quatre piliers. La destination universelle des biens pose ainsi la question du développement durable, tandis que le fondement de la dignité de la personne humaine interpelle actuellement la France et l’Europe autour des questions concernant les migrants. Le bien commun est le troisième pilier cité par François Soulage, en mettant en exergue la crise financière. Avec le principe de solidarité, quatrième pilier cité par l’orateur, ce sont les politiques fiscales qui sont pointées. Et il a ajouté : « c’est parce que nous sommes sur le terrain que l’on sait ce que ça veut dire ». En ce sens, la justice, prémisse à la charité selon l’encyclique Caritas in Veritate de Benoît XVI, est une manière sûre de se mettre au service de ses frères.
Pour François Soulage, la question qui est aujourd’hui posée aux communautés chrétiennes, c’est de savoir comment être présentes au monde, et comment éveiller les consciences, afin de révéler le visage du Christ. Comme réponse, il proposait d’entrer dans une démarche diaconale, qui consisterait à mettre le service du frère au cœur de la vie de la société, aux côtés de la Parole de Dieu et de la célébration des sacrements. « Si nos communautés s’approprient ces trois dimensions en les liant les unes aux autres, alors nous aurons quelque chose à dire à la société, car nous montreront un visage de l’Eglise ancré dans la réalité », a-t-il conclu.
Ce vendredi, les Etats Généraux du Christianisme se sont poursuivis par des ateliers et des conférences. Dans la nuit de jeudi à vendredi, les participants sont invités à se rendre à l’église St Maurice, au cœur de Lille, pour prendre part à la nuit du christianisme, une veillée de prière animée par différents groupes.
Stéphane Lemessin