« Étant allemand, disait-il à Jean-Paul II, je suis particulièrement heureux que le concert soit offert par un orchestre allemand qui, pour la troisième fois déjà, se produit devant vous, Très Saint-Père, nous offrant, à travers la musique, une fête de joie ».
Il précisait à propos du « Mittledeutscher Rundfunk »: « Le chœur et l’orchestre proviennent d’une partie de l’Allemagne qui, après la guerre et jusqu’à l’effondrement du mur, a dû subir la dictature communiste, ce qui a provoqué des blessures parfois encore ouvertes. La blessure la plus profonde est peut-être le fait que Dieu semble devenu lointain et que la foi s’est éteinte dans de nombreux cœurs. Mais il s’agit également de la partie de l’Allemagne qui nous a peut-être donné le plus grand maître de musique de tous les temps, Johann Sebastian Bach ».
« Ces journées durant lesquelles nous rappelons les 25 ans au cours desquels vous avez porté dans l’Eglise le poids et la grâce de la charge pastorale de Successeur de Pierre, sont tout d’abord caractérisées par des sentiments de gratitude et de joie, ajoutait celui qui est devenu aujourd’hui Benoît XVI. L’un des moments culminants de cette semaine de fête est le concert que le chœur et l’orchestre du « Mitteldeutscher Rundfunk » vont nous offrir maintenant ».
Il expliquait ainsi le message de Beethoven: « Ils nous feront entendre l’un des chefs-d’œuvre de la musique, la neuvième symphonie de Beethoven, qui reflète la lutte intérieure de ce grand maître lors des périodes sombres de la vie; la traversée, pour ainsi dire, de nuits sombres où aucune des étoiles promises ne semble plus briller dans le ciel. Mais à la fin, les nuages se dissipent. Le grand drame de l’existence humaine, qui se développe en musique, fait place à l’hymne à la joie pour lequel Beethoven reprit les paroles de Schiller, des paroles qui n’ont atteint leur véritable grandeur qu’à travers sa musique ».
Il évoquait ensuite Georg Friedrich Händel et cet « autre hymne à la joie inégalable: le grand Alleluia, qui est le moment culminant de son Messie, dans lequel il a mis en musique la promesse et l’accomplissement, la prophétie du rédempteur qui devait venir et l’événement historique de Jésus qui y correspond ».
« L’Alleluia, disait-il, est le cantique de louange des rachetés qui, en vertu de la résurrection du Christ, malgré les souffrances du monde, peuvent toutefois se réjouir. Cette grande tradition musicale – comme nous pourrons en faire l’expérience au cours de ces heures – est restée vivante à travers toutes les vicissitudes historiques, et elle est un rayon de lumière où l’étoile de la foi, la présence de Jésus Christ, continue à briller ».
Celui que l’Italie appelle déjà le « pape Ratzinger » continuait cette extraordinaire « explication de texte » musicale et spirituelle en ces termes: « Contrairement à la présence de la foi intacte qui transparaît dans l’Hymne à la joie de Händel et qui apparaît de façon tout à fait différente, c’est-à-dire comme paix intérieure tranquille et comme grâce de réconciliation, dans l’Oratorio de Noël de Bach ou à la fin de ses Passions, l’ode « illuministe » de Schiller, mise en musique par Beethoven de façon si majestueuse, est caractérisée par l’humanisme de cette époque qui place l’homme au centre et qui – là où il se réfère à Dieu – préfère le langage du mythe. Malgré cela, nous ne devons pas oublier que Beethoven est l’auteur de la Missa solemnis ».
Il offrait ensuite ce commentaire spirituel plein d’espérance: « Le bon Père, dont parle l’ode, n’est pas pour lui un postulat, comme pourrait le suggérer le texte de Schiller, mais plutôt une certitude ultime. Beethoven savait également que nous pouvons nous fier au Père, car dans son Fils, il est devenu proche de nous. Et, ainsi, nous pouvons facilement comprendre l’étincelle divine, la joie dont parle l’ode, comme étincelle de Dieu qui se communique à nous à travers la musique et nous rassure: oui, le bon Père existe vraiment et il n’est pas loin du tout, au-delà du firmament, mais, grâce à son Fils, il est parmi nous ».