Marie de Nazareth, modèle dans la foi (II/II)

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Catéchèse du card. Angelo Comastri

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Traduction d’Hélène Ginabat

ROME, jeudi 22 novembre 2012 (Zenit.org) – « Au moment de la passion, Marie était la vraie croyante, la parfaite croyante », affirme le cardinal Comastri, qui invite à aller « souvent la rencontrer » afin de devenir « davantage croyants ».

Le vicaire du pape pour la Cité du Vatican et archiprêtre de la basilique Saint-Pierre, le cardinal Angelo Comastri a en effet  donné une catéchèse sur ce thème à la communauté pastorale de Dugnano-Incirano, en Lombardie, le 20 octobre 2012.

Après avoir médité sur la lucidité et la cohérence de la foi de Marie, dans les épisodes de l’Annonciation et de la Visitation (cf Zenit du 19 novembre), le cardinal  poursuit sa méditation sur les autres moments de la vie de la mère du Christ.

***

Trois mois plus tard, Marie retourne à Nazareth ; désormais la maternité est évidente. Matthieu raconte le malaise de Joseph. Marie n’intervient pas. Marie aurait eu l’humilité d’attendre, une capacité à rester sereine. Marie reste sereine car elle sait que Dieu a son temps. Dieu n’est pas pressé et Marie n’insiste pas. Alors un ange intervient auprès de Joseph pour clarifier la situation de Marie et Joseph, qui est un homme juste, prend Marie chez lui, il l’introduit dans sa maison… Au bout de quelques mois, arrive un ordre de Rome : Recensement pour tout l’empire. Marie connaissait certainement les prophéties et en particulier celle de Michée qui dit : « Et toi, (Bethléem) Ephrata, le moindre des clans de Juda, c’est de toi que me naîtra celui qui doit régner ». Et c’est peut-être la raison pour laquelle Marie a obéi à l’ordre : « Allons à Bethléem ! ».

Découvrir l’humilité et la douceur de Dieu

Mais Marie ne savait pas ce qui allait se passer à Bethléem ! L’évangéliste Luc raconte qu’arrivés là, ils ne trouvèrent pas de place à l’auberge. Celui qui a tout créé ne trouve pas de place ! Il sera grand, il sera appelé « fils du Très-Haut », « il siègera sur le trône de David son père », « il dormira dans la maison de Jacob », « son règne n’aura pas de fin »… Et il n’y avait pas de place à l’auberge… C’est une énorme contradiction ! Marie découvre que Dieu est humble. En sommes-nous convaincus ?… Dieu est humble.

Saint François sera bouleversé devant l’humilité de Dieu. Dans ses admonitions, il répètera souvent : « Oh : L’humilité de Dieu ! Oh ! L’humilité de Dieu ! ». Non seulement Marie découvre que Dieu est humble mais elle avance sur le chemin de l’humilité avec Dieu. « Elle l’enveloppa de langes et le mit dans une mangeoire », sur le foin et le fumier. Marie, obéissante, fait confiance en Dieu. Marie croit.

Quarante jours plus tard, Marie et Joseph vont au temple pour la présentation de leur enfant. Tous les enfants, tous les garçons, étaient présentés à Dieu, mais cet enfant-là était particulier. Marie et Joseph ne connaissent pas tous les détails du « mystère », parce que Dieu n’est pas impatient. Dieu ne donne à personne la carte routière de sa vie. Il se révèle progressivement. Ils vont au temple, mêlés aux gens ordinaires. Ils ont sans doute fait la queue comme tout le monde pour attendre leur tour et se présenter au prêtre. Et personne ne les a salués. Ils ont apporté l’offrande des pauvres : deux colombes, ou deux tourterelles, c’est tout.

Soudain apparaît Siméon, un homme de toute évidence éclairé par le ciel, qui s’exclame en voyant l’enfant : « Maintenant, Seigneur, je peux fermer les yeux, parce que mes yeux ont vu le salut que tu prépares pour tous les peuples ». Puis, s’adressant à Marie, il lui dit : « cet enfant sera un signe de contradiction », c’est-à-dire qu’il brisera l’histoire : ou avec lui, ou contre lui. Et il ajoute : « Ton histoire sera tellement liée à celle de cet enfant qu’une épée te transpercera le cœur ». Une épée que l’on annonce fait mal tout de suite. Et Marie comprend que Dieu agit dans l’histoire avec une extrême douceur, et elle en aura aussitôt la confirmation. Hérode, provoqué par l’arrivée des mages, décide de tuer les enfants de moins de deux ans. A cette époque, on tuait les enfants avec une extrême facilité. Sommes-nous meilleurs aujourd’hui ?… Non, nous ne nous sommes pas améliorés. Et Marie et Joseph doivent s’enfuir… Ils font une autre découverte : Dieu n’affronte pas le mal par un autre mal. Dieu affronte le mal par la bonté. Dieu est doux. Et nous aimerions qu’il soit un « Dieu guerrier, un Dieu fort » !

Dieu est doux. Dieu n’affronte pas le mal par le mal. Dieu a ses chemins, les longs chemins de l’amour, de la bonté. Mais nous avons la certitude que le bien est vainqueur. Et Marie fuit en Egypte. Ce fut une découverte ! La douceur de Dieu, la patience de Dieu, et nous pourrions continuer encore… De retour à Nazareth, ce sont de longues années. Jésus n’a certainement pas révélé à Marie tous les détails de sa vie, parce que Dieu ne fait jamais d’annonce à l’avance ! Et Marie chemine dans la foi.

Lorsque Jésus a 12 ans, un événement impressionnant se produit. Ils vont au temple à Jérusalem pour le pèlerinage de la Pâque et, pendant le voyage du retour, Jésus s’éloigne de la caravane et reste à Jérusalem. Quelle épreuve ! Les caravanes des hommes et des femmes se retrouvent le soir, ils n’ont pas vu l’enfant… Et ils doivent attendre que la nuit passe. Quelle douleur !

Lorsque j’étais à Lorette en 2000, je me souviens avoir rencontré des personnes qui avaient été prises en otage en Italie. Madame Casella, dont un fils avait été enlevé en Sicile, était là. Elle m’a dit : « J’ai compris le mystère de Marie lorsque Jésus reste à Jérusalem quand on m’a dit un soir : « Ton fils n’est pas rentré ». Ce soir-là, j’ai compris ce que Marie a souffert ».

Ils retournent à Jérusalem, le cherchent pendant trois jours. Aucune nouvelle ! Et le troisième jour, ils se rendent au temple et le trouvent au milieu des docteurs, en train de parler, de répondre, et tous étaient impressionnés. Et Marie dit « Mon enfant [tecnon], cela veut dire « mon petit enfant », pourquoi nous as-tu fait cela ? Ton père et moi, nous te cherchons, angoissés ». Quelle douleur dans ces paroles ! Et Jésus répond : « Pourquoi me cherchiez-vous ? ». Quelle question ! « Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père ? ». Marie comprend que cet enfant est un mystère. Elle comprend qu’il lui fera d’autres surprises. Elle comprend que cet enfant ne lui appartient pas, mais que c’est elle qui lui appartient. C’est différent. Et elle croit. Telle est la foi de Marie.

Reconnaître le visage de Dieu sur la Croix

Les années passent. Et arrive le temps de la Passion.

Il faut noter qu’au moment de la passion, tous les apôtres perdent pied. Pierre, le premier. Pierre a beaucoup de mal à accepter le mystère de Dieu qui affronte le mal par le bien, qui affronte la méchanceté par la bonté. Pierre voulait que la méchanceté soit affrontée avec la même méchanceté, sinon plus. Pierre a réagi quand Jésus a annoncé la passion. Quand il a vu Jésus leur laver les pieds, il s’est fâché : « Tu ne me laveras pas les pieds », ce qui veut dire : « Je ne t’accepte pas ainsi ».

Marie, à l’heure de la croix, est près de Jésus. Rester près de Jésus est un grand message. « Près de la croix se tenait sa mère ». Et pour Jean, l’heure de la Passion est présentée comme l’heure de la plus grande manifestation de l’amour de Dieu. Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au « sig
ne extrême », c’est-à-dire jusqu’à l’accomplissement.

Marie a cru. Marie était près de lui. Et Jésus a pu dire, du haut de la Croix, en s’adressant à Jean : « Fils, voici ta mère », c’est-à-dire, je te la donne comme mère, parce que Marie était à lui, Marie était du côté de Dieu. Marie croyait que Jésus, sur la croix, était vainqueur. C’est pourquoi Jésus a pu dire : « Fils, voici ta mère », et à Marie « Femme, voici ton fils ».

Au moment de la passion, Marie était la vraie croyante, la parfaite croyante.

Nous devons tous reconnaître que nous connaissons encore bien peu le mystère de Dieu. Nous nous disons croyants, mais nous avons en tête une idée de Dieu très semblable à celle des philosophes : « Dieu grand, puissant et éternel », disait Pascal, « qui est aussi loin du christianisme que l’athéisme, qui en est exactement le contraire ». En cette année de la foi, désirons pouvoir faire, savoir faire et vouloir faire un petit pas dans la foi ! Ce serait le plus beau fruit de cette année que le pape a voulue pour toute l’Eglise.

Je conclus avec une poésie de Trilussa, un poète de Rome qui plaisait beaucoup à Jean-Paul II, au point qu’il lui est arrivé, lors d’une audience, d’en réciter par cœur un sonnet sur la foi. Trilussa imagine la foi comme une petite vieille aveugle et il écrit : « Cette petite vieille aveugle que j’ai rencontrée une nuit où je m’étais perdu au milieu d’un bois, parce que la vie est comme un bois où nous sommes tous perdus, cette petite vieille m’a dit : ‘Si tu ne connais pas le chemin, je vais t’accompagner parce que, moi, je le connais. Si tu as la force de me suivre, de temps en temps, j’élèverai la voix, tout au bout, là où il y a un cyprès, ou tout là-haut, là où il y a la croix, parce que la vie de chacun passe par le calvaire’. Je lui répondis mmm… vraiment ? Mais je trouve bizarre que tu puisses me guider puisque tu n’y vois pas. Alors l’aveugle me prit la main en soupirant : Avance !… C’était la foi.

Nous sommes tous dans le bois, nous sommes tous un peu perdus dans le bois de la vie, il n’y a que cette petite vieille aveugle qui puisse nous guider. Et c’est l’humilité qui nous ouvre à la foi et ce soir, nous aussi, l’aveugle nous prend par la main en soupirant et nous dit : Avance ! Et c’est cela, la foi. Et pour l’apprendre, nous avons une maîtresse magnifique : c’est Marie.

Allez souvent la rencontrer. Allons souvent la rencontrer. Nous deviendrons davantage croyants.

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ZENIT Staff

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