Anita Bourdin

ROME, mardi 30 octobre 2012 (ZENIT.org) –  A l’occasion des migrations, l’Eglise est appelée à manifester sa « sollicitude maternelle,  sans distinction », fait observer le cardinal Veglio.

« Migrations : pèlerinage de foi et d’espérance » : c’est le titre du message de Benoît XVI pour la 99e Journée mondiale du migrant et du réfugié qui sera célébrée le 13 janvier 2013

Il a été présenté ce matin au Vatican par le cardinal Antonio Maria Veglio, président du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement, et par Mgr Joseph Kalathiparambil, secrétaire du même dicastère.

Migrations économiques et forcées

Le cardinal Veglio souligne que le message « met en lumière la réalité des migrations économique et des migrations forcées ».

Il évoque le 50e anniversaire de l’ouverture de Vatican II, qui a « confirmé que « l’Eglise marche avec l’humanité tout entière » (Gaudium et Spes, n. 40) dans tout ce dont l’homme fait l’expérience chaque jour » : « En réalité, comme le Saint-Père l’a noté, cette vérité a trouvé continuellement un écho dans le magistère de l’Eglise et aujourd’hui encore, elle pousse toute la communauté ecclésiale à promouvoir « le développement intégral de l’homme »(Caritas in veritate, 11), aussi pour « les millions d’hommes et de femmes qui, pour différentes raisons, vivent l’expérience de la migration » (Message 2013).

Il cite le Rapport mondial 2011 sur les Migrations de l’Organisation mondiale des migrations (OIM) qui estime à 214 millions les migrants internationaux, soit 3% de la population mondiale, un chiffre en augmentation par rapport à 2005 (191 millions).

La confiance en Dieu

Le chiffre des déplacés de l’intérieur était de 740 millions de personnes environ, en 2010. Les deux chiffres additionnés font quasi un milliard de personnes, souligne le cardinal Veglio : un septième de la population mondiale.

Il cite le Message de Benoît XVI : ces populations sont poussées par leur « désespoir » face à un « avenir impossible à construire », et leur « désir d’une vie meilleure », souvent animés de la « confiance profonde que Dieu n’abandonne pas ses créatures »; « foi et espérance remplissent donc souvent la bagage de ceux qui émigrent ».

Or, poursuit le cardinal italien, « l’amélioration de la qualité de leur vie est liée intrinsèquement à ceux qu'ils rencontrent dans les nouvelles réalités qui les accueillent ».

Il souligne que certains sont animés par la « foi en Dieu » et que d’autres peuvent « découvrir Dieu qui leur tend la main, surtout dans les pays de tradition chrétienne ancienne, où ils peuvent faire l’expérience de la bonté authentique de nombreuses réalités ecclésiales qui les accueillent et qui les aident ».»

La sollicitude de l’Eglise

Il s’agit, pour le cardinal Veglio, que l’Eglise manifeste sa « sollicitude maternelle,  sans distinction ». Il cite le Message du pape qui mentionne deux domaines : le secours en cas d’urgence, à l’image du Bon Samaritain, et la « mise en évidence des aspects positifs, les bonnes potentialités et des ressources dont les migrations sont porteuses ».

« La sollicitude de l’Eglise » s’exprime dans « l’activité de favoriser et accompagner l’insertion intégrale des migrants dans leur nouveau contexte social et culturel », explique le cardinal Veglio.

Mais il dissipe les malentendus en précisant : « Il ne s’agit pas seulement de l’acceptation de la présence étrangère de la part de la société d’accueil, mais c’est surtout un processus souvent long et délicat) qui requiert aussi une compréhension mutuelle. Avec les difficultés que la réalité migratoire comporte, les migrants peuvent ainsi faire l’expérience de la bonté et de la solidarité qui les peuvent à leur tour – écrit le pape – « contribuer au bien-être des pays d’arrivée avec leurs compétences professionnelles, leur patrimoine social et culturel et souvent aussi leur témoignage de foi ». »

Le pape, souligne encore le cardinal Veglio, invite l’Eglise à créer de nouvelles « structures pastorales » et à « mettre en valeur les différents rites », jusqu’à la « pleine participation à la vie de la communauté locale ».

La richesse des échanges
Il rapproche ce que dit ce Message de l’exhortation apostolique post-synodale sur l’Eglise au Moyen-Orient, soulignant l’importance de la solidarité avec les migrants chrétiens – source d’un « échange pour les nations qui accueillent les migrants » - et du maintien du lien avec leurs communautés d’origine.

Au niveau mondial aussi, ajoute-t-il, « le phénomène migratoire oblige à la confrontation avec différents styles de vie et différentes cultures, en stimulant la construction de nouveaux rapports ».

Il invoque les analyses du « Pew Research Centre » et son rapport 2012 sur la foi en mouvement - « Faith on the Move » -, qui « met en relation les flux migratoires avec la foi professée par les migrants » et selon ce rapport, les dix pays qui ont accueilli le plus d’immigrés ces dernières années sont : les Etats-Unis, la Fédération de Russie, l’Allemagne, l’Arabie saoudite, le Canada, la France, le Royaume Uni, l’Espagne, l’Inde et l’Ukraine.

Il précise que les Etats-Unis accueillent 43 millions de citoyens d’autres pays, soit 13,5% de la population nationale, dont 32 millions de chrétiens, arrivés majoritairement du Mexique.

Pour le cardinal Veglio, ces chiffres « démontrent les ressources religieuses potentielles dont les migrants sont porteurs et en même temps les attentes qu’ils nourrissent vis-à-vis des communautés chrétiennes qui les accueillent ».

Une dignité intouchable

« Chaque Etat a le droit de réguler les flux migratoires et de mettre en oeuvre des politiques dictées par les exigences générales du bien commun », écrit le pape dans son message, et le cardinal Veglio commente ainsi le passage : « En effet, l’Etat a le devoir de promouvoir des conditions de vie aptes à permettre à ses citoyens de vivre dans des conditions dignes. Mais cette règlementation doit tenir compte du respect de la dignité de chaque personne humaine ».

Il insiste aussi sur ce que le message dit de l’individu – et de « l’intouchable dignité de la personne humaine » -  et des familles, « dans l’esprit de Gaudium et spes » et du « droit d’émigrer » fortement réaffirmé, avec le droit de « vivre dans sa patrie ». Ainsi, le « chemin d’intégration » implique droits et devoirs, en vue du « bien commun ».

« L’accueil et la solidarité son des points capitaux », insiste l’archevêque italien en précisant : « Intégrer ne signifie pas seulement trouver une maison et un nouveau travail au migrant. Cela signifie beaucoup plus : trouver sa place dans la communauté, devenir des membres effectifs de la société d’arrivée, mais sans s’identifier à un monde qui, n’étant pas celui que migrant, se révèlerait de fait vide culturellement et spirituellement ».

L’Eglise recommande, souligne Mgr Veglio, de veiller sur les « minorités » en préservant leurs cultures, la contribution des migrations à la pacification du monde, la dimension ecclésiale et missionnaire du phénomène migratoire, l’importance du dialogue et de la confrontation à l’intérieur de la société civile, de la communauté ecclésiale et entre les différentes confessions et religions ».

Le cardinal Veglio a conclu en remerciant les personnes engagées dans la pastorale des migrants.