ROME, vendredi 12 octobre 2012 (ZENIT.org) – « A la lumière de tout ce que l’Église dans le monde devrait encore accomplir, et en appréciant grandement tous les progrès que nous avons partagés, nous sommes honorés d’avoir été invités à participer – et d’avoir été appelés à offrir notre modeste parole- à cette commémoration solennelle et joyeuse du Concile Vatican II », a fait observer le patriarche orthodoxe Bartholomaios Ier, place Saint-Pierre, avant d’ajouter : « Ce n’est pas une coïncidence si cette célébration marque pour votre Église l’inauguration solennelle de “l’Année de la Foi”, car c’est la foi qui offre un signe évident du chemin que nous avons parcouru ensemble le long du chemin de la réconciliation et de l’unité visible ».
Le partiarche oecumnique de Constantinople, Bartholomaios Ier a en effet prononcé cette allocution, jeudi matin, 11 octobre, place Saint-Pierre, au terme de la messe présidée par Benoît XVI pour l’ouverture solennelle de l’Année de la foi.
Hommage du patriarche Bartholomaios Ier :
Notre frère bien-aimé dans le Seigneur, Votre Sainteté le Pape Benoît,
Frères et soeurs,
Quand le Christ se préparait à l’expérience de Gethsémani, il a prononcé une prière pour l’unité qui est rapportée au paragraphe 17, verset 11 de l’Évangile de Jean:”… garde-les dans ton nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un comme nous”. Au fil des siècles, nous avons vraiment été gardés par la puissance et l’amour de Christ, et au juste moment de l’histoire, l’Esprit Saint est descendu sur nous et nous avons commencé un long parcours vers l’unité visible voulue par le Christ. Cela a été confirmé par Unitatis Redintegratio §1: “Très nombreux sont partout les hommes qui ont été touchés par cette grâce et, sous l’effet de la grâce de l’Esprit Saint, est né un mouvement qui s’amplifie de jour en jour chez nos frères séparés en vue de rétablir l’unité de tous les chrétiens”.
Sur cette place, une célébration puissante et significative a manifesté le coeur et l’esprit de l’Église catholique romaine, en la conduisant au cours des cinquante dernières années jusqu’au monde contemporain. L’ouverture du Concile Vatican II, pierre angulaire transformante, fut inspirée par la réalité fondamentale selon laquelle le Fils et le Logos incarné de Dieu est là “Que deux ou trois, en effet, soient réunis en mon nom” (Mt18,20) et que l’Esprit qui procède du Père “vous introduira dans la vérité toute entière” (Jean 16,13).
Nous évoquons avec clarté et tendresse, mais aussi avec jubilation et enthousiasme, les discussions personnelles que nous avons eues, au cours des cinquante années qui ont suivi, avec des évêques et des experts théologiens, pendant notre formation – en tant que jeune étudiant- à l’Institut pontifical oriental, ainsi que notre participation personnelle à quelques sessions spéciales du Concile. Nous sommes les témoins oculaires de la manière dont les évêques ont fait l’expérience, avec une conscience renouvelée, de la valeur – et du sens de continuité renforcé – de la tradition et de “la foi transmise aux saints une fois pour toutes” (Judas 1,3). Ce fut une période prometteuse, riche d’espoirs, à l’intérieur et à l’extérieur de votre Église.
Nous avons remarqué que, pour l’Église orthodoxe, elle fut une période d’échanges et d’attentes. Par exemple, la convocation des premières Conférences panorthodoxes à Rhodes, a conduit aux Conférences préconciliaires en préparation du grand Concile des Églises orthodoxes. Ces échanges allaient montrer au monde moderne le grand témoignage d’unité de l’Église orthodoxe. De plus, cette période a coïncidé avec “le dialogue de l’amour”, et elle a annoncé la Commission internationale mixte pour le dialogue théologique entre l’Église catholique romaine et l’Église orthodoxe, instituée par nos vénérables prédécesseurs, le Pape Jean Paul II et le Patriarche oecuménique Dimitrios.
Au cours des cinq dernières décennies, les conquêtes obtenues par cette Assemblée ont été nombreuses, comme le prouve la série de constitutions, déclarations et décrets importants et influents. Nous avons contemplé le renouvellement de l’esprit et “le retour aux origines” à travers l’étude liturgique, la recherche biblique et la doctrine patristique. Nous avons apprécié l’effort graduel pour se libérer des limites académiques rigides à l’ouverture du dialogue oecuménique, ce qui a mené aux abrogations réciproques des excommunications de l’année 1054, à l’échange de voeux, à la restitution des reliques, au début de dialogues importants et de visites réciproques dans nos sièges respectifs.
Notre chemin n’a pas toujours été facile ou exempt de souffrances et de défis. Nous savons, en fait, que “étroite est la porte et resserré le chemin”(Mt 7,14). La théologie fondamentale et les principaux thèmes du Concile Vatican II – le mystère de l’Église, la sacralité de la liturgie et l’autorité de l’évêque – sont difficiles à appliquer avec assiduité, et s’assimilent par des efforts qui durent toute la vie et avec l’engagement de l’Église tout entière. La porte devrait donc rester ouverte à un accueil plus profond, à un engagement pastoral plus grand et une interprétation ecclésiale du Concile Vatican II toujours plus approfondie.
En poursuivant ce chemin ensemble, nous rendons grâces et gloire au Dieu vivant – Père, Fils et Saint Esprit- car l’assemblée des évêques elle-même a reconnu l’importance de la réflexion et d’un dialogue sincère entre nos “Églises soeurs”. Nous nous unissons dans “ l’espoir, que le mur qui sépare l’Église d’Orient de celle d’Occident étant abattu, il n’y aura plus qu’une seule demeure, solidement établie sur la pierre angulaire, le Christ Jésus qui fera l’unité de l’une et de l’autre” (Unitatis Redintegratio §18).
Grâce au Christ, notre pierre angulaire, et à la tradition que nous avons en commun, nous serons en mesure – ou, plutôt, nous le serons par le don et la grâce de Dieu- d’apprécier davantage et d’exprimer de façon plus complète le Corps du Christ. Par nos efforts continus, conformes à l’esprit de la tradition de l’Église primitive et à la lumière de l’Église des Conciles du premier millénaire, nous pourrons vivre l’expérience l’unité visible qui se trouve au-delà de notre temps présent.
L’Église se distingue toujours par sa dimension prophétique et pastorale particulière, par la modération et la spiritualité qui la caractérisent, et sert avec une humble sensibilité les “plus petits” des frères du Christ (Mt 25,40).
Bien-aimé frère, notre présence qui signifie et montre notre engagement à témoigner ensemble le message de salut et de guérison pour nos frères les plus petits: les pauvres, les opprimés, les marginalisés du monde créé par Dieu. Commençons les prières pour la paix et la santé de nos frères et soeurs qui vivent au Moyen-Orient. Dans le creuset actuel de violences, séparations et divisions qui s’intensifient entre les peuples et les nations, que l’amour et le désir d’harmonie que nous déclarons ici, et la compréhension que nous recherchons avec le dialogue, soient un modèle pour notre monde. Que l’humanité puisse tendre la main vers “l’autre” et que nous puissions travailler ensemble pour dépasser la douleur des peuples partout, et en particulier là où l’on souffre à cause de la faim, des catastrophes naturelles, des maladies et de la guerre qui finit par frapper notre vie à tous.
À la lumière de tout ce que l’Église dans le monde devrait encore accomplir, et en appréciant grandement tous les progrès que nous avo
ns partagés, nous sommes honorés d’avoir été invités à participer – et d’avoir été appelés à offrir notre modeste parole- à cette commémoration solennelle et joyeuse du Concile Vatican II. Ce n’est pas une coïncidence si cette célébration marque pour votre Église l’inauguration solennelle de “l’Année de la Foi”, car c’est la foi qui offre un signe évident du chemin que nous avons parcouru ensemble le long du chemin de la réconciliation et de l’unité visible.
En conclusion, nous vous félicitons sincèrement, Sainteté, Frère bien-aimé – unis à la multitude bénie des fidèles ici rassemblés aujourd’hui – et nous Vous embrassons fraternellement en cette joyeuse occasion commémorative. Que Dieu vous bénisse tous.