Les saints Cyrille et Méthode, co-patrons de l’Europe, auront leur plaque à la basilique Saint-Pierre-de-Castello de Venise, première cathédrale de la ville puis premier siège du patriarcat de Venise, qui fut une étape décisive dans l’aventure missionnaire des deux saints, il y a 1150 ans.
La plaque, réalisée par le Maître sculpteur Marián Polonský, sera découverte le 30 juin prochain, à 10h30, à l’occasion d’une cérémonie qui s’inscrit dans le cadre des célébrations jubilaires organisées par divers pays slaves pour marquer l’arrivée des deux saints sur le territoire de la Grande Moravie en 863.
Elle a été conçue en pierre d’Istrie. On peut y voir les bustes des saints et la croix patriarcale – un des symboles nationaux de la Slovaquie – en bronze.
La réalisation de cette plaque fait partie d’un projet de l’association Allegra de Bratislava, soutenu par divers partenaires en Slovaquie et à Venise, sous le patronage du patriarcat et du maire de la ville italienne.
La cérémonie aura lieu en présence d’autorités slovaques comme l’ambassadeur de la république Mária Krasnohorská, et Mgr Frantisek Rábek, aumônier militaire et délégué de la Conférence épiscopale en Slovaquie.
La ville de Venise fut pour les deux saints un lieu de référence important dans leur mission. Ville charnière dans les relations entre l’Est et l’Ouest du monde, qu’il s’agisse de relations commerciales ou culturelles, Venise devint le cœur des échanges entre les deux parties du monde.
Grecs de Thessalonique, envoyés dans la Grande Moravie par le patriarche de Byzance, Cyrille et Méthode ont créé un alphabet pour la langue des peuples slaves et ont commencé la traduction de livres sacrés, dont le Proglas, l’introduction aux évangiles de saint Cyrille, que l’on peut considérer comme le premier ouvrage littéraire slave.
Rompant avec la tradition ecclésiastique du trilinguisme (juif, grec, latin) pour les offices religieux, Cyrille et Méthode obtinrent l’autorisation du pape Adrien II d’utiliser la langue vulgaire dans les fonctions religieuses.
Sur la route qui les conduisait à Rome, c’est à Venise précisément que les deux saints, en 867, eurent une discussion publique avec le savant clergé local : dans cet épisode, évoqué dans la chronique de la « Vita Constantini » sous la définition de « dispute de Venise », saint Cyrille en particulier défendit avec acharnement le droit des peuples chrétiens slaves à pouvoir comprendre les saintes Ecritures, en se référant à l’Evangile de Matthieu: « La pluie qui descend de Dieu n’est-elle pas la même pour tous et le soleil ne brille-t-il pas de la même façon pour tout le monde, ne respirons-nous pas tous dans l’air de la même façon ? Alors comment n’avez-vous pas honte de n’admettre que trois langues et de vouloir que les autres soient sourdes et muettes ? ».
L’étape de Venise qui, pour les missionnaires ne devait être qu’un point d’embarquement, devint un passage fondamental jusqu’à la ratification papale, reconnaissant à la langue paléoslave une dignité qui lui était propre dans les domaines culturel et liturgique, anticipant ainsi de 1000 ans les conclusions pastorales du concile Vatican II.
Le cardinal Gianfranco Ravasi, président du conseil pontifical pour la culture, reprenant les paroles de l’encyclique Slavorum Apostoli de Jean Paul II, a rappelé récemment que la naissance de l’alphabet de Cyrille eut dans le monde slave un effet « comparable à celui qu’avait eu la langue latine en Occident ».
De toutes les initiatives réalisées en Slovaquie pour cette année jubilaire, dont la Fête nationale du 5 juillet prochain à Nitra sera le point d’orgue, le projet de Venise se distingue pour le sens plus large qui est donné aux relations historiques entre le territoire slovaque et le reste de l’Europe, l’Italie en particulier.
L’initiative de l’Association Allegra, suivie d’un projet similaire à Ravenne, est placée sous le patronage du patriarcat de Venise, de la cité de Venise, de l’ambassade de la République slovaque, de la conférence épiscopale de Slovaquie, et a le soutien du ministère de la culture en République slovaque, du ministre des affaires étrangères et européennes de Slovaquiep.
Le sculpteur Marián Polonský est l’auteur de nombreuses œuvres consacrées aux saints frères missionnaires, dont certaines à l’étranger, notamment une plaque qui se trouve à la basilique Sainte-Marie-Majeure à Rome, à l’endroit où le pape Adrien accueillit les frères grecs et les autorisa à célébrer la messe en paléoslave.
Traduction d’Océane Le Gall