France : le card. Sarah Commandeur de la Légion d'Honneur

Allocution de M. Joubert, ambassadeur près le Saint-Siège

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ROME, jeudi 25 octobre 2012 (ZENIT.org) – « En novembre 2010, vous êtes créé cardinal par Benoît XVI. Vous êtes de la sorte le premier cardinal guinéen de l’histoire et l’un des onze cardinaux-électeurs issus de l’Afrique », a rappelé, le 24 octobre 2012, à la Villa Bonaparte, Monsieur Bruno Joubert, Ambassadeur de France près le Saint-Siège, qui a remis les Insignes de Commandeur de la Légion d’Honneur au cardinal Robert Sarah, président du Conseil pontifical Cor Unum.

Parmi les personnalités réunies autour du cardinal Sarah figuraient notamment les  cardinaux Peter Kodwo Appiah Turkson, président du Conseil pontifical Justice et paix, Antonio Maria Veglio’, président du Conseil pontifical pour la pastorale pour les migrants et les personnes en déplacements, et Laurent Monsengwo Pasinya, l’archevêque de Kinshasa.

Plusieurs évêques africains ainsi que les collaborateurs du cardinal Sarah au Conseil pontifical Cor Unum étaient également présents à cette cérémonie

Allocution de M. Bruno JOUBERT,

Ambassadeur de France près le Saint-Siège à l’occasion

de la remise des Insignes de Commandeur de la Légion d’Honneur à Son Eminence le Cardinal Robert SARAH,

Président du Conseil Pontifical Cor Unum

Villa Bonaparte – mercredi 24 octobre 2012

Monsieur le Cardinal, Eminences, Messeigneurs,

Mes Pères,

Mes Sœurs,

Mesdames et Messieurs,

Je suis tout particulièrement heureux et très honoré de vous accueillir ce soir à la Villa Bonaparte, avec vos amis, soit de la curie, soit présents à Rome pour le synode, et vos collaborateurs au Conseil Pontifical Cor Unum.

En vous recevant ici, je voudrais vous exprimer à titre officiel, mais aussi très personnel, la reconnaissance et le respect de la France pour ce que vous êtes, ce que vous faites et ce que vous représentez.

Depuis des années en effet, votre action au sein de l’Eglise universelle a toute entière été mise au service de la défense de la dignité de tout être humain et de la solidarité qui en est le prolongement concret.

Ce sont là des orientations dont mon pays partage les valeurs et la finalité.

Mais je voudrais ici évoquer quelques uns des traits saillants de votre parcours et de votre engagement.

Vous êtes natif d’Ourouss, dans la partie nord de la Guinée, frontalière du Sénégal. Dès la fin des années cinquante vous entamez le long périple que vous vaut votre vocation : vous êtes conduit à poursuivre vos études loin de chez vous, d’abord au petit séminaire de Bingerville, en Côte d’ Ivoire ; puis après l’indépendance vous revenez en Guinée, pour repartir, en 1964 plus loin encore, au grand séminaire de Nancy puis au Sénégal.

Quand j’imagine cette ville d’Ourouss où vous êtes né, si joliment ordonnancée, d’après les photographies, autour de sa place centrale ombragée de beaux arbres, quelle nostalgie a pu être parfois la vôtre de devoir affronter l’hiver si rude de la ville de Charles le Téméraire et l’âpreté des campagnes lorraines.

Vous êtes ordonné prêtre pour l’archidiocèse de Conakry en 1969 puis conduit à poursuivre votre formation à Rome.

Revenu en Guinée en 1974, vous y exercez votre ministère. Cinq ans plus tard, vous êtes nommé par Jean-Paul II à la tête de ce même archidiocèse, devenant de ce fait, à 34 ans seulement, l’un des plus jeunes archevêques métropolitains de l’histoire contemporaine. Ceci vous vaut, dit-on, ce beau surnom d’ « évêque enfant » que vous aurait attribué le Saint Père lui-même.

De la jeunesse qui vous distinguait ainsi, vous avez certainement toujours su garder l’engagement et le courage.

Au cours de vingt deux années d’épiscopat à Conakry, vous vous illustrez par des prises de position sans concessions à l’égard du monde politique guinéen.

Cette attitude fut particulièrement remarquable alors que votre prédécesseur, Mgr Tchidimbo avait été emprisonné et torturé durant le terrible régime dictatorial du Président Sekou Toure. Vous en connaitrez vous-mêmes les dernières années, jusqu’en 1984, si sombres et si dures, puis affronterez aussi les périodes troublées survenues par la suite.

Pour être moins brutales sur le plan politique, elles n’en furent pas moins agitées et délétères pour la population guinéenne, atteinte par d’immenses difficultés économiques et sociales. Je voudrais d’ailleurs ici rendre hommage à ce peuple guinéen, endurant et optimiste, comme son pasteur.

Pasteur vous l’avez été pleinement pour vos fidèles. Votre engagement en faveur de la démocratie, du développement, de la transparence et de la lutte contre la corruption feront beaucoup pour tracer le cap et maintenir l’espoir d’une population soumise à l’arbitraire et affrontant le plus souvent une situation catastrophique. Au nom de l’Evangile, vous avez su, aux yeux de vos compatriotes, chrétiens ou musulmans, incarner la conscience de votre pays.

En 2001, vous êtes appelé à Rome par le pape, pour devenir le « numéro deux », le Secrétaire, de la Congrégation pour l’Evangélisation des peuples, ce dicastère de la Curie en charge des Eglises des pays en développement. A ce poste stratégique, vous jouez un rôle important vis-à-vis des Eglises en Afrique. Vous êtes en particulier associé de façon étroite au voyage du pape Benoît XVI au Cameroun et en Angola (en mars 2009) et au synode des évêques sur l’Afrique (en octobre 2009).

Un an plus tard, le pape Benoît XVI vous désigne à la tête du Conseil pontifical Cor Unum, le dicastère qui coordonne l’action humanitaire de l’Eglise dans le cadre d’un élan toujours renouvelé de la charité évangélique ; un élan qui inspire le cœur des fidèles de l’Eglise et par osmose se répand bien au-delà de ce cercle. N’est ce pas un des aspects même, comme cela a pu être relevé déjà, de la « nouvelle évangélisation » dont les Pères synodaux traitent actuellement.

Dès les premiers mois à la tête de Cor Unum, vous prenez la mesure de vos fonctions au caractère très international. Vous devez ainsi multiplier les visites à l’étranger pour « porter la charité du pape », en particulier dans les pays touchés par des catastrophes comme par exemple en Haïti ou au Japon.

En novembre 2010, vous êtes créé cardinal par Benoît XVI. Vous êtes de la sorte le premier cardinal guinéen de l’histoire et l’un des onze cardinaux-électeurs issus de l’Afrique.

De ce point de vue, vous avez incarné et préfiguré l’essor si impressionnant du continent africain, certainement appelé à jouer de plus en plus pour le monde le rôle de « poumon spirituel », selon la belle formule de Sa Sainteté Benoît XVI. Les valeurs qu’ à su conserver ce continent sont en effet propres à éveiller les consciences un peu assoupies et à apporter un nouvel élan d’espoir et de joie, partagés entre les hommes et les peuples.

Manifestant ce courage et ce regard lucide qui ont caractérisé votre ministère archiépiscopal depuis Conakry, vous ne craignez pas d’affirmer avec clarté les positions de l’Eglise, à rebours des tiédeurs ou des précautions diplomatiques du temps que vous avez mises en évidence, en particulier en Europe.

Dans une interview récente donnée à Cotonou, vous avez ainsi rappelé que – et je vous cite – « non seulement l’homme est fait pour lui-même sur cette terre, mais il y a aussi un avenir qui est fait pour que l’homme rie avec Dieu ». Et vous ajoutiez qu’en cela, avec les richesses humaines et spirituelles qu’elle a su conserver, l’Afrique peut apporter au monde une contribution essentielle à la société mondialisée de demain.

< p>Vous exhortiez donc l’Afrique à rester fidèle à elle-même, à « garder sa force intérieure », estimant qu’elle pourra alors « offrir au monde un leadership qui lui est spécifique et qui est attendu par tous ceux qui souhaitent retrouver la réalité, la vérité et l’amour véritable ».

C’est sans doute pourquoi, dans vos différentes fonctions, vous n’hésitez pas à prendre position sur des grands débats de société qui conditionnent notre avenir. Ainsi par exemple de l’écologie dont vous soulignez volontiers qu’elle concerne non seulement la nature mais qu’elle doit intégrer aussi le souci du respect de l’homme, notamment dans sa dimension familiale. Vous rappelez ainsi vigoureusement que l’écologie humaine est une urgence.

A la Congrégation pour l’évangélisation des peuples comme au Conseil pontifical Cor Unum, vous avez toujours été pour les représentants de mon pays, et je tiens à vous en remercier, un interlocuteur vivement apprécié. Nous avons notamment pu traiter de manière confiante les dossiers sensibles de nominations épiscopales dans nos collectivités d’outre-mer (pour celles qui relèvent de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples).

Eminence, le caractère remarquable de votre parcours, comme personnalité francophone de l’Eglise, et qui restez proche de notre pays, avec un engagement déterminé en faveur de la démocratie et des droits fondamentaux méritent éminemment d’être reconnus par l’attribution des insignes de commandeur dans l’ordre de la Légion d’Honneur. C’est en outre pour moi, qui suis attaché à l’Afrique , un plaisir aussi bien qu’ un privilège d’être celui qui vous les remettra à l’ instant.

Monsieur le Cardinal, au nom du président de la République, nous Vous remettons les insignes Commandeur de la Légion d’Honneur

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ZENIT Staff

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