Propos recueillis par Salvatore Cernuzio
Traduction d’Océane Le Gall
ROME, vendredi 5 octobre 2012 (ZENIT.org) – « Non, cet événement n’a pas provoqué de « rupture » dans l’histoire de l’Eglise, mais un « bond en avant providentiel », a déclaré l’archevêque de Milan (Italie), en commentant les travaux du concile Vatican II, il y a 50 ans.
Le cardinal Angelo Scola s’exprimait ainsi à l’ouverture, mercredi 3 octobre, d’un congrès international organisé par le Comité pontifical de sciences historiques, en collaboration avec l’université du Latran, sur le thème : « Le concile œcuménique Vatican II à la lumière des archives des pères conciliaires ».
Après avoir évoqué certains moments saillants des assises du Concile, l’archevêque a mis l’accent sur les liens indissolubles qui unissent l’événement et les documents, invitant à surmonter l’inadéquate « antinomie » entre ces deux dimensions qui caractérise souvent les interprétations doctrinales sur le Concile.
Ces liens, impossibles « à défaire », font ressortir le rôle de premier plan de l’Eglise en tant que « sujet », a-t-il insisté.
Le cardinal Scola a ensuite centré son attention sur « la nature pastorale » de Vatican II, dont l’interprétation constitue, estime-t-il, un élément incontournable du devoir missionnaire de l’Eglise et sera au cœur du prochain synode des évêques sur la Nouvelle évangélisation.
ZENIT a parlé de ce dernier point avec le cardinal Scola, interrogé brièvement à la sortie de la rencontre.
Zenit – Eminence, ce qui ressort le plus de votre intervention, c’est que vous dites que « la nature pastorale » du concile Vatican II n’a pas porté atteinte à sa portée doctrinale, mais l’a plutôt renforcée, faisant ressortir la mission de l’Eglise. Est-ce à dire que le concile entrevoyait déjà la nécessité d’une Nouvelle évangélisation?
Cardinal Scola – Oui c’est bien ça! L’événement du concile, à travers son corpus doctrinal, a « ouvert en grand » l’urgence d’une Nouvelle évangélisation, tout comme l’a fait d’ailleurs par la suite le fameux synode de 1985, qui a clairement évoqué sa nécessité. De toute évidence, les temps changent à grande allure et il faut que l’Église, dans l’optique d’une réforme qui soit correctement comprise, ne perde donc pas trop de temps à chercher à s’adapter au monde actuel – ceci fait déjà partie de ses objectifs -. L’Eglise d’aujourd’hui a besoin de rentrer plus profondément en elle-même, de laisser exploser en elle le don de l’Esprit du Ressuscité et de pouvoir ainsi intercepter les interrogations de l’homme d’aujourd’hui en essayant, surtout à travers la sainteté, d’y apporter des réponses.
Il y a également une allusion faite à l’Humanae Salutis de Jean XXIII, qui appelle à « infuser l’énergie vivifiante de l’Eglise » dans la communauté chrétienne, laquelle s’exalte des découvertes scientifiques, mais subit les conséquences d’un ordre « organisé indépendamment de Dieu ». 50 ans plus tard, les paroles du bienheureux pape semblent décrire la situation actuelle…
C’est vrai. L’homme d’aujourd’hui risque de ne pas s’apercevoir que Dieu est en réalité proche de lui. Il risque d’imaginer son présent et de se projeter dans l’avenir en en faisant presque abstraction. Cela représente un grave danger. A ce propos, je me souviens d’une phrase que j’ai entendu dire un jour au cardinal Henri de Lubac: « Il se pourrait que l’homme réussisse à édifier une société sans Dieu. Ce que nous ignorons, c’est si cette société sera une bonne société et combien de temps elle durera ».
Vous avez conclu votre intervention en relevant les effets bénéfiques du Concile dans l’Eglise actuelle et en souhaitant une réponse libre de la part de tous les chrétiens afin qu’ils se réalisent pleinement. Comment cela se traduit-il concrètement?
Cela se traduit par une vie de foi authentique, vécue à un niveau aussi bien personnel que communautaire. En particulier, dans la réalité un peu fatiguée de notre Europe, cette réponse se concrétise à travers l’édification de communautés chrétiennes ayant un sens profond de leur appartenance, où les membres sont capables de témoigner le Christ dans tous les domaines de l’existence de l’homme.