ROME, Mercredi 9 avril 2008 (ZENIT.org) – A quelques jours de la visite de Benoît XVI aux Etats-Unis, les relations œcuméniques et interreligieuses seraient les sujets prioritaires de son agenda, explique un porte-parole de la Conférence épiscopale américaine.
Interrogé par ZENIT, Le P. James Massa, directeur exécutif du Secrétariat de la Conférence épiscopale américaine pour les questions œcuméniques et interreligieuses, précise que « le pape est convaincu qu’il n’y a aura pas de paix sur terre tant que les religions ne seront pas en paix entre eux. C’est pourquoi il arrive à la table des négociations, ici aux Etats-Unis, et à Rome, avec espérance et conviction ».
Le pape, durant ce voyage de cinq jours aux Etats-Unis (15-20 avril) prévoit de consacrer quatre étapes au renforcement de ces relations. Le 17 avril, il rencontrera 200 hauts représentants interreligieux au Centre culturel du pape Jean-Paul II à Washington, D.C.
A l’issue de cette rencontre, il se joindra aux représentants religieux de la communauté juive pour lui souhaiter une bonne fête de la Pessah, qui s’ouvrira le 19 avril.
Le lendemain, à New York, Benoît XVI présidera une rencontre de prière œcuménique à l’église Saint-Joseph, dans le quartier de Manhattan à York ville. Avant de s’y rendre, il fera une halte à la Park East Synagogue qui n’entre pas dans le programme officiel de sa visite, mais constitue pour lui une nouvelle occasion d’adresser ses vœux de bonne Pessah.
« La rencontre à l’église Saint-Joseph, a expliqué le père Massa, sert à encourager la promotion de l’unité des chrétiens. La veille au soir, le 17 avril […], le Saint-Père rencontrera 150 représentants interreligieux de la […] communauté juive, musulmane, hindou, bouddhiste et jaïniste ».
« Alors que la rencontre de vendredi soir sera centrée sur le thème ‘Jésus Christ, notre espérance d’unité’, a-t-il précisé, celle de jeudi soir sera consacrée au thème ‘La paix, notre espérance’. Le P. Massa pense que le pape insistera sur l’importance que les grandes religions offrent un témoignage commun de paix à un moment où la violence à fond religieux, comme celle du 11 septembre, a coûté la vie à trop de monde sur terre ».
Priorité
Le père Massa pense que l’œcuménisme et le dialogue interreligieux ont toujours été une priorité pour Benoît XVI, non seulement depuis qu’il a été élu pape, mais dès l’époque de sa participation, en tant que consultant, aux travaux du Concile Vatican II.
« A l’époque de Vatican II, il était consultant en théologie pour les évêques allemands. Ces derniers proposaient de nouvelles formulations doctrinales qui tiennent compte de l’évolution de la théologie protestante et orthodoxe », se souvient le père Massa.
« Puis il a participé aux travaux de la Commission Foi et Ordre du Conseil mondial des Eglises. En tant que cardinal Préfet à Rome, il a presque sauvé à lui seul la fameuse Déclaration conjointe sur la Justification [en] 1999, entre la Fédération luthérienne Mondiale et le Saint-Siège, dans une intervention de dernière minute lors d’une rencontre organisée au domicile de son frère en Allemagne ».
« A l’instar de ses quatre prédécesseurs, promouvoir l’unité des chrétiens est pour Benoît XVI une des missions essentielles de l’Eglise », a-t-il souligné.
« Le Saint-Père rend hommage au rapport unique que l’Eglise entretient avec le peuple juif, le premier à avoir conclu une alliance avec Dieu », a-t-il ajouté.
Selon le P. Massa, « le dialogue interreligieux, surtout avec l’islam, est en bonne place dans l’agenda de Benoît XVI qui estime que ce dialogue est fondamental pour promouvoir la paix et les droits de l’homme dans le monde ».
Difficultés
Le P. Massa reconnaît toutefois que le pape a dû affronter des situations difficiles dans le domaine de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux.
Interrogé sur les réactions tristement célèbres du fameux discours de Ratisbonne, sur la réponse à la prière du vendredi saint pour le Missel de 1962 et sur la récente controverse sur le baptême du samedi saint d’un converti de l’islam, le père Massa reconnaît qu’elles ont été négatives mais que le processus œcuménique/interreligieux va de l’avant.
« Face à un public mondial, le rôle de la presse est bien entendu fondamental dans l’interprétation de ces événements », affirme le père Massa. « Il est dommage que certaines franges de la presse européenne aient rédigé leurs titres à partir des premiers paragraphes du discours de Ratisbonne, qui constituait dans son ensemble un défi respectueux et brillant à toutes les personnes possédant une conviction religieuse, montrant que la raison n’a rien à craindre de la foi et que la foi doit toujours être ouverte à une rencontre purificatrice avec la raison ».
« Musulmans et chrétiens affrontent ensemble un adversaire commun sous la forme d’une sécularisation agressive qui renie les principes moraux transcendants qui constituent le fondement premier du droit et du respect de la dignité humaine », a-t-il déclaré.
« Il est surprenant de voir avec quelle rapidité nous nous sommes repris (de ces controverses) », a souligné le père Massa.
« Cela est dû aux racines profondes de nos relations interreligieuses ; le fruit de décennies de dialogue et de collaboration sur des questions sociales. S’il est vrai que certains groupes de la communauté juive ont demandé à faire ‘une petite pause’ pour une nouvelle réflexion sur la prière du vendredi saint pour les juifs dans le missel de 1962, il est aussi vrai que d’autres ont promis de continuer à soutenir ce dialogue, bien qu’ils ne soient pas d’accord quant à l’opportunité d’une prière liturgique pour les juifs qui leur fassent connaître le Christ ».
« Le dialogue n’est pas en conflit avec la proclamation, mais fait partie d’un vaste programme d’évangélisation qui définit notre essence en tant que peuple catholique », a-t-il expliqué.
Citant une étude parue en février, le Pew Forum on Religion & Public Life, le père Massa souligne qu’aux Etats-Unis, le pape affrontera un nouveau visage de la Nation. Une Nation qui, au plan religieux, a beaucoup changé.
« La configuration du christianisme américaina changé de façon plutôt dramatique ces quarante dernières années. Les grandes Eglises protestantes se sont réduites au profit de communautés évangéliques et pentecôtistes qui ont connu un véritable essor. […] Les catholiques n’ont plus que leurs yeux pour s’émerveiller et admirer tout ce qui explique la vitalité de ces ‘nouvelles Eglises’. Une situation dont le Saint-Père et les hauts représentants catholiques dans ce pays, et dans le reste du monde, doivent certes tenir compte ».
Le père Massa relève par ailleurs que le concept de papauté aussi a changé aux Etats-Unis : « Seuls quelques évangélistes et chrétiens fondamentalistes continuent d’assimiler le pape à un ‘antéchrist’. Beaucoup voient en lui un défenseur des consciences, et un gardien du christianisme ancien, en cette heure de l’histoire marquée par un certain relativisme moral ».
A la veille de la visite de Benoît XVI aux Etats-Unis, le porte-parole des évêques américains affirme nourrir de grands espoirs. Il est convaincu que cette visite offrira de beaux fruits de collaboration en matière d’œcuménisme et de rapports interreligieux, une question vraiment chère au pape.
« A un moment où tant d’Eglises ont l’air de souffrir de nouvelles fractures et que la polarisation autour de questions morales s’accentue, je souhaite que le pape puisse donner un nouvel élan aux engagements œcuméniques », a-t-il dit. Cet œcuménisme, a-t-il souligné, « n’est pa
s un appendice à la mission de l’Eglise, mais un aspect fondamental de cette mission ».
« Je m’attends à quelques encouragements du pape à poursuivre cet ‘œcuménisme spirituel’ qui suppose prière en commun, œuvres communes de charité et de justice », a-t-il souligné.
« L’œcuménisme théologique ira de l’avant, j’en suis sûr. Dernièrement, il a fait beaucoup de progrès au plan du dialogue entre catholiques et orthodoxes, comme le montre le document de Ravenne sur l’Eglise universelle », a affirmé le père Massa.
« Le pape, a-t-il conclu, pourrait nous dire qu’avec toutes ces relations, qui ont pour objectif d’atteindre cette unité pour laquelle le Christ à prié le soir avant de mourir, ‘Père, qu’ils soient un’, nous ne sommes qu’au début de notre tâche oecuménique ».
Kathleen Naab
Traduction française : Isabelle Cousturié