France/Mgr Tauran: Une "modernisation des relations entre l´Eglise et l´Etat"

Mgr Tauran explique l´accord survenu

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CITE DU VATICAN, Jeudi 14 février 2002 (ZENIT.org) – Un récent accord entre l´Eglise catholique et l´Etat français constitue une « modernisation des relations entre l´Eglise et l´Etat », estime Mgr Jean-Louis Tauran.

Mardi dernier, 12 février, les représentants de l´Eglise catholique en France et le gouvernement français sont convenus de formaliser les relations existant entre l´Eglise et l´Etat par des réunions régulières. Mgr Jean-Louis Tauran, Secrétaire chargé des Relations avec les Etats pour le Saint-Siège a expliqué aujourd´hui au micro de Romilda Ferrauto, à Radio Vatican, les enjeux de cet accord.

En effet, une concertation est engagée avec des représentants de l´Islam en France et des rencontres régulières ont déjà lieu avec des représentants du Judaïsme. « Paradoxalement, remarque un communiqué de Matignon, il n´existait pas de structure de concertation avec l´Eglise catholique, la plus ancienne et la plus nombreuse » (Cf. www.premier-ministre.gouv.fr).

Le cardinal Jean-Marie Lustiger, archevêque de Paris, le nonce apostolique en France, Mgr Fortunato Beldelli, Mgr Jean-Pierre Ricard, président de la Conférence des évêques de France (CEF) et archevêque de Bordeaux, et Mgr Georges Pontier, vice-président de la CEF et évêque de La Rochelle, ont été reçus par le Premier ministre, Lionel Jospin, en présence du ministre de l´Intérieur Daniel Vaillant mardi après-midi.

« Ils sont convenus de réunions régulières en vue de procéder à l´examen des problèmes d´ordre administratif et juridique qui se posent dans les relations entre l´Eglise catholique et l´Etat en France », indiquait le communiqué de Matignon.

Il n´est pas question de toucher aux lois de séparation de l´Eglise et de l´Etat de 1905 ni aux accords de 1923 sur les relations entre l´Eglise catholique et l´Etat, mais de se donner les moyens de régler des questions soulevées par l´évolution de la société.

Ainsi, des groupes de travail doivent discuter de problèmes liés à l´enseignement catholique, au fonctionnement des aumôneries, à l´utilisation des cathédrales et des églises, à la fiscalité.

– Entretien avec Mgr Tauran –

– Qu´est-ce qui a permis cet accord?

– Ce qui a permis cet accord, ce sont d´abord des contacts qui ont eu lieu dans la plus grande discrétion, depuis 1992 jusqu´à aujourd´hui, entre certains responsables de l´Eglise de France et certains responsables de l´Administration française. Car nous nous trouvons, au sein de l´Eglise catholique en France, en face d´un statut qui devenait de plus en plus difficile à respecter dans la mesure où la vie et l´évolution de la société ont créé de nouveaux problèmes. Nous avions cette grande difficulté de trouver des interlocuteurs au bon niveau du côté de l´Etat. Et à mesure que nous avons progressé dans nos conversations, nous avons vu qu´il fallait donner naissance à une espèce de structure de dialogue qui permette aux uns et aux autres de s´expliquer et surtout avec des personnes qui soient capables ensuite de répercuter les préoccupations des Catholiques au niveau administratif comme au niveau gouvernemental. Ces réunions régulières, c´est une modernisation des relations entre l´Eglise et l´Etat parce que nous sommes encore sous le régime qui a bientôt cent ans d´âge (1905-2005) et ce serait un miracle que d´avoir dans une société démocratique occidentale une loi qui après cent ans n´aurait pas besoin d´un toilettage.

– Mais est-ce que vous ne craignez pas que cette prise de contact irrite certains autres responsables de cultes qui pourraient y voir une « préférence » en quelque sorte?

– Ce qui est important pour les autorités, dans le cadre de la séparation de l´Eglise et de l´Etat, c´est de traiter les cultes selon leur identité propre. Je ne peux pas nier par exemple que ce qui a facilité l´accord, c´est aussi le fait que l´Islam depuis de nombreuses années cherche aussi par un dialogue avec l´Etat à avoir sa juste place dans la société française.

– Est-ce qu´il n´y a pas aussi une nécessité dans un contexte social qui a évolué de repenser ce rapport entre l´Eglise et Etat en France?

– Nous sommes dans une société pluraliste, il est normal que les catholiques puissent faire entendre leur voix, non pas pour imposer leur point de vue, mais pour faire réfléchir ceux qui ont la gestion de la chose publique et la société tout entière sur certains enjeux et surtout la dimension transcendante de l´homme. On ne peut pas séparer l´Eglise de la société, parce que la dimension transcendante de l´homme fait que les problèmes spirituels un jour ou l´autre atterrissent sur la table des hommes politiques. Et donc il faut faire en sorte de donner à l´Eglise cette possibilité d´être un partenaire.

– Ce qui fait que presque paradoxalement on a l´impression que les rapports qui étaient tumultueux entre l´Eglise et l´Etat en France sont aujourd´hui plus faciles?

– C´est sûr que la loi de 1905 a été précédée par pratiquement trente années de gloire anti-cléricale et donc cela a été une loi qui a été votée par hostilité à l´Eglise. Maintenant, je pense que nous sommes passés à une société qui est beaucoup plus pluraliste, beaucoup plus tolérante et donc on ne peut pas parler d´une guerre contre l´Eglise. Mais ce qui a toujours préoccupé les évêques et le Saint-Siège, c´est que l´on a vu au cours de ces dernières années une tendance à marginaliser l´Eglise. Pour nous la liberté religieuse, ce n´est pas seulement la liberté de culte, c´est une liberté sociale et civile donc avec une dimension visible.

– Autre petit écueil: cette rencontre intervient avant les élections présidentielles, ce qui peut susciter certaines spéculations?

– La rencontre était prévue pour le 10 janvier, mais des questions de calendrier, des uns et des autres, ont fait repousser la date. Mais tout le monde a été unanime à dire qu´il n´y avait absolument aucune connotation politique ou électoraliste dans cette initiative.

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ZENIT Staff

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