CITE DU VATICAN, Mardi 16 octobre 2001 (ZENIT.org) – « La signification de la venue de Mateo Ricci à Pékin, 400 ans après ». L´agence internationale Fides publie cette étude sur les rapports entre la Chine et le Saint-Siège faite par le professeur He Guanghu, chercheur à l´Institut pour l´étude des Religions Mondiales, de l´Académie des Sciences Sociales de Pékin, à l´occasion du 400e anniversaire de l´arrivée de Mateo Ricci à Pékin.
Du 14 au 17 octobre, une Rencontre Internationale est en effet prévue à Pékin, sur la figure de Mateo Ricci, rappelle Fides. Missionnaire jésuite, il arriva à Pékin il y a 400 ans. Il introduisit la foi chrétienne et la science occidentale dans le monde des savants chinois, et fut même très écouté à la Cour Impériale. La Rencontre, patronnée par le » Ricci Institute » de l´Université de San Francisco en Californie (Etats-Unis) verra la présence de nombreux chercheurs et savants de renommée mondiale. En vue de cet événement, Fides a demandé au professeur He Guanghu, de présenter Matteo Ricci ; expert des questions du christianisme à l´Académie Sociale des Sciences de Pékin, le professeur He Guanghu est également membre du Comité de préparation du Congrès. L´article qu´il a envoyé porte ce titre intéressant : « Le plus grand peuple de la terre et la plus grande religion du monde ont le devoir de normaliser leurs relations. La signification de la venue de Mateo Ricci à Pékin, 400 ans après cet événement « . L´original en chinois de ce texte est disponible sur le site FIDES.org (© Fides).
« Dans le monde entier, cet événement est célébré de différentes manières. En ce mois d´octobre, je constate que, en Chine, deux rencontres académiques ont été prévues, une à la Cité Universitaire de Hongkong, et l´autre au Centre d´Etudes Chrétiennes à l´Académie Chinoise des Sciences sociales. Quelle signification ce missionnaire a-t-il pour nous aujourd´hui, lui qui a vécu seulement 58 ans, et dont l´activité s´est déroulée à la fin du Moyen-Age, dans la Capitale d´une ancienne dynastie ? Il faut dire tout d´abord que Mateo Ricci est devenu un symbole pour toute la Chine. Marco Polo est lié à une histoire légendaire ; Mateo Ricci, savant célèbre de l´Orient et de l´Occident, homme de science consciencieux, missionnaire de la foi, est le symbole du premier contact de la Chine avec les sciences et la technologie européennes ; le symbole de la foi chrétienne qui s´enracine chez les intellectuels de race Han ; le symbole du premier échange entre la culture occidentale et la culture chinoise. Il symbolise aussi la volonté, poussée par une foi personnelle convaincue, d´étudier avec passion les oeuvres classiques chinoises, la volonté de connaître en profondeur la culture chinoise, le désir d´aider avec sincérité la société chinoise, en répandant la foi chrétienne, afin que tous deviennent » des maîtres sages et de bons amis « . Ce pionnier, qui a introduit » les études occidentales en Orient et les études orientales en Occident » ne représente pas seulement une personne, mais un groupe nombreux de personnes dans le grand processus historique des échanges entre la Chine et l´Occident.
« Cet homme de science qui a enseigné les mathématiques, les sciences naturelles, la philosophe des religions, a été appelé » Li Zi » par les savants chinois. Il a influencé non seulement son époque, mais ces 400 ans dans leur ensemble, et son influence se poursuivra dans l´avenir. La signification que Mateo Ricci a pour la Chine dépasse de très loin celle qu´il a pu avoir pour l´Occident. L´influence des personnages historiques peut être positive ou négative : il dépend de nous d´en tirer une leçon. Si, par exemple, nous prenons la naissance de » la controverse sur les rites chinois « , qui a commencé précisément avec l´activité de Mateo Ricci, et la manière selon laquelle elle a été résolue, nous pouvons en tirer une leçon positive, y compris pour aujourd´hui et pour l´avenir. La controverse des rites chinois a deux causes : d´une part, Rome cherche à défendre la pureté absolue de la religion et du corps doctrinal ; d´autre part, le gouvernement de la Dynastie Qing veut maintenir le contrôle politique et idéologique sur la culture et sur la tradition populaire chinoise. La conséquence, c´est que les deux parties ont subi une perte historique : du côté de Rome, il y a eu l´interruption de la Mission chrétienne ; du côté de la Chine, l´interruption de l´ouverture a entraîné l´interruption du processus de modernisation du Pays, et a conduit à la chute et à la fin de la Dynastie Qing, et à la prolongation du sous-développement social de la Chine.
« La controverse des rites, qui a duré pendant 300 ans, n´a été résolue qu´en 1939 : Rome a élargi sa vision » religieuse » en une vision » culturelle « , en s´adaptant aux nouveaux courants de pensée sur la tolérance des cultures ; la Chine, en suivant le nouveau principe institué par le gouvernement nationaliste qui séparait la politique et la religion, a légalisé la liberté religieuse sans prétende intervenir sur le changement des traditions sociales. Le résultat est un fruit double, voire même triple : l´Eglise Catholique s´est développée sans difficulté ; les coutumes et les traditions chinoises se sont transformées d´une manière naturelle ; les relations amicales entre l´Eglise et la Chine ont joué un rôle positif et important pour l´ensemble du monde.
« La réalité historique montre que, en changeant le point de vue, c´est-à-dire en considérant le problème des rites comme une question culturelle, et le problème politique comme une question sociale, le problème qui semblait insoluble auparavant, est devenu aisément résoluble ; internationalisme et cosmopolitisme deviennent une tendance mondiale. Dans cette situation, les controverses idéologiques sont désormais démodées ; le nationalisme violent se dirige inévitablement vers sa ruine. A une époque où les communications et les échanges culturels entre nations et peuples se développent d´une manière croissante, la vie sociale toujours plus riche et multicolore ne peut être étouffée par une politique centralisatrice. C´est pourquoi il est temps que, entre le plus grand peuple du monde et la religion la plus grande du monde, il y ait non seulement une compréhension spirituelle réciproque, mais que les dirigeants des deux parties ne soient pas isolées pendant trop longtemps. Au contraire, les deux dirigeants doivent et peuvent, par une conversion de la pensée (en passant de la vision politique à la vision socio-culturelle), parvenir à la normalisation des relations entre les deux parties.
« La communication entre la Chine et l´Occident, commencée par Mateo Ricci et d´autres missionnaires, a établi les relations entre la Chine et le Vatican dans les dernières années de la Dynastie Qing. A ce jour, la Chine a établi de nombreuses relations diplomatiques avec des Pays occidentaux : si le Chine résout le problème des rapports avec le Saint-Siège de Rome, qui représente la tradition occidentale, cela apportera des bienfaits indubitables aux deux parties et à toute la famille humaine.
Professeur He Guanghu (Pékin)