Réunion pré-synodale avec les jeunes © Vatican Media

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"Avec les jeunes, il ne faut jamais s’effrayer", lance le pape

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En dialogue avec les jeunes de la réunion pré-synodale (3)

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« Avec les jeunes, il ne faut jamais s’effrayer, jamais ! Parce que toujours, même derrière les choses qui ne sont pas très bonnes, il y a quelque chose qui nous fera arriver à quelque vérité », a affirmé le pape François le 19 mars 2018, intervenant devant les 300 jeunes réunis à Rome pour la réunion de préparation au synode d’octobre 2018.
Il a aussi évoqué le lien entre l’apostolat du prêtre et celui de la communauté : « on ne peut pas être témoin tout seul : on a toujours besoin de la communauté … Parce qu’on ne peut être témoins du Christ s’il n’y a pas de communauté témoin ».
Voici notre traduction de la réponse du pape, en dialogue avec les jeunes réunis au Collège pontifical international Maria Mater Ecclesia.
AK

Question n. 4 Yulian VENDZILOVYCH – séminariste d’Ukraine

[Il salue en disant en italien “Loué soit Jésus-Christ”; le pape François lui répond en ukrainien]

Je suis Yulian Vendzilovych, séminaire de l’Esprit Saint de Lviv, Église gréco-catholique ukrainienne. C’est la question de notre Séminaire pour le Saint-Père. Saint-Père, notre époque est caractérisée par divers nouveaux mouvements culturels. Aujourd’hui il est important qu’un prêtre puisse être non seulement un enseignant de religion, mais un témoin vivant du Christ, quelqu’un qui comprend les questions de son temps et ne veut pas perdre le souffle de l’Esprit Saint qui inspire la culture d’aujourd’hui. Selon vous, comment un jeune qui se prépare au sacerdoce et veut être ouvert à la jeunesse et à la culture actuelle devrait-il se préparer pour comprendre ce qu’il y a de précieux dans la culture et ce qu’il y a de faux ? Par exemple, le tatouage pour un groupe de personnes, exprime une véritable beauté, mais pour un autre, c’est un exemple de la culture qui est difficile à comprendre. Le jeune pasteur, comment devrait-il réagir aux circonstances complexes de la culture d’aujourd’hui ? Merci, merci Saint-Père.

Pape François :

Enfin un collègue ! Je te remercie. Tu parles de « témoin vivant du Christ ». C’est vrai, un prêtre qui n’est pas un témoin du Christ fait beaucoup de mal, beaucoup de mal. Beaucoup de mal, il se trompe, il désoriente les gens, il fait du mal. Mais celle qui doit être témoin du Christ, c’est la communauté : le prêtre est témoin du Christ en tant que membre de cette communauté. Le pauvre prêtre, dans une communauté qui n’est pas témoin du Christ, je ne sais pas s’il réussira à avancer. Si, il pourra témoigner, mais l’appui de la communauté est un témoignage et le premier travail, c’est que les communautés soient témoins du Christ, des communautés chrétiennes. Sinon, le prêtre sera seul, et les pauvres, les prêtres seuls, affectivement seuls parce qu’une communauté ne les accompagne pas dans le témoignage, cela en fait un prêtre seulement fonctionnel : la communauté va à l’église, « loue » une messe, demande une sépulture, la première Communion et ensuite le laisse seul. C’est un isolé dans une communauté qui n’est pas témoin du Christ. La première chose que je te dirais, c’est de te demander : « Comment est ta communauté, ou la communauté de ton frère, de cet autre… ? Si une communauté n’est pas témoin du Christ, l’évêque doit intervenir et aider le prêtre et ne pas le laisser seul. Ils le « mangeront vivant » parce qu’on ne peut pas être témoin tout seul : on a toujours besoin de la communauté et les grands saints – pensons à François – ont aussitôt cherché des compagnons, tout de suite ! La communauté. Philippe Néri, tout de suite. Parce qu’on ne peut être témoins du Christ s’il n’y a pas de communauté témoin. Tu es témoin dans une communauté témoin du Christ. Et il y a ici le rapport entre le prêtre et la communauté : le rapport aussi doit être de l’ordre du témoignage. Parce qu’il y a une maladie très grande, qui est le cléricalisme et nous devons sortir de cette maladie. Certains d’entre vous ne sont pas catholiques, les autres vous êtes non croyants, mais je dis avec beaucoup d’humilité : c’est une des maladies les plus graves de l’Église. Le cléricalisme. Quand une communauté cherche un prêtre et ne trouve pas un père, ne trouve pas un frère, mais trouve un docteur, un professeur ou un prince… Et c’est une des maladies qui font beaucoup de mal à l’Église. Cela me préoccupe beaucoup, parce qu’on confond le rôle paternel du prêtre et on le réduit à un rôle de dirigeant : le « boss ». Le boss de l’entreprise, le dirigeant… Et ce qui me préoccupe aussi, ce sont les attitudes non paternelles, non fraternelles du prêtre qui, dans sa relation avec la communauté, ne font pas de lui un témoin du Christ. Par exemple, le spiritualisme exagéré : quand tu trouves ces prêtres qui pensent être toujours au ciel, qui sont incapables de comprendre, qui croient qu’avec un comportement comme cela – comme je le dis – « avec l’air de la bienheureuse Imelda » [il rit, ils rient] comme cela, non, cela ne va pas… Comment, si tu as fait une de ces chutes comme on en fait dans la vie, iras-tu le lui dire ? Mais tu as peur ! Tu ne trouves pas en lui le témoignage de la miséricorde du Christ. Ou quand tu vois un prêtre qui est rigide, qui avance toujours avec rigidité, mais comment la communauté peut-elle aller à lui ? Il manque le témoignage. Et quand tu vois un prêtre mondain, c’est grave, c’est pire. Priez pour lui pour que le Seigneur le convertisse, parce que les prêtres mondains font beaucoup de mal, beaucoup de mal à la communauté. Mais aussi les communautés : elles doivent être des communautés-témoins. Un des vices de la communauté, c’est le commérage.

Un cardinal, sympathique, me racontait qu’il avait connu un prêtre qui avait un grand sens de l’humour et dans la paroisse il avait une femme très bavarde, qui parlait de tout le monde et à tout propos. Mais elle habitait tout près de la paroisse à tel point que de la fenêtre de son logement elle pouvait voir l’autel de la paroisse. Elle venait à la messe tous les jours et ensuite, aux autres heures du jour, elle tournait dans la paroisse en disant du mal des autres. Un jour elle était malade, elle appelle le prêtre et dit : « Père, je suis au lit avec un gros rhume, s’il vous plaît, pouvez-vous m’apporter la Communion ? – Ne vous préoccupez pas : vous, avec la langue que vous avez, de votre fenêtre vous arrivez au tabernacle ! » Mais dis-moi, dans une paroisse où les fidèles font du commérage toute la journée les uns contre les autres et contre le prêtre, le pauvre prêtre est seul sans le témoignage rendu au Christ par la communauté. Et je ne parle que du commérage parce que pour moi c’est une des choses les plus graves des communautés chrétiennes. Mais savez-vous que les commérages sont un terrorisme ? Un terrorisme, les commérages ? Oui, parce qu’un bavard fait comme un terroriste : il s’approche, il parle de quelqu’un, lance la bombe du commérage, détruit et s’en va. Tranquille. Tu es témoin du prêtre avec la communauté et de la communauté avec le prêtre.

Ensuite, ta dernière question, sur la culture. N’aie pas peur des tatouages : les Erythréens, il y a des années, se faisaient la croix ici [il indique son front], aujourd’hui encore nous les voyons. Ils se tatouaient la croix. Oui, il y a des exagérations, aujourd’hui je vois que certains… je crois que ceux qui ont une mesure forte de tatouages ne peuvent donner leur sang, non ? Je crois quelque chose de ce genre, parce qu’il y a un danger d’intoxication… Non, quand on exagère…, mais c’est un problème d’exagération, pas de tatouage. Le tatouage indique l’appartenance. Toi, jeune, qui t’es tatoué comme cela, que cherches-tu ? Quelle appartenance exprimes-tu ? Et commencer à dialoguer avec cela et de là on arrive à la culture des jeunes. C’est important. Mais ne sois pas effrayé : avec les jeunes, il ne faut jamais s’effrayer, jamais ! Parce que toujours, même derrière les choses qui ne sont pas très bonnes, il y a quelque chose qui nous fera arriver à quelque vérité. Et n’oublie jamais ceci : le double témoignage ensemble, celle du prêtre et celle de la communauté avec le prêtre. Merci.

Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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