Une psychologie fidèle à la science, fidèle à Dieu

Entretien avec Gladys Sweeney, recteur de l’« Institute for Psychological Sciences »

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ROME, dimanche 16 janvier 2005 (ZENIT.org) – Une psychologie enracinée dans la vision catholique de la personne humaine est non seulement fidèle à la science mais aussi à Dieu.

C’est ce que déclare Gladys Sweeney, recteur de l’« Institute for Psychological Sciences », qui cherche à intégrer la psychologie dans la foi et la raison. Gladys Sweeny a fait part à Zenit de sa conviction selon laquelle la science de la psychologie se met au service de l’Eglise dans la mesure ou elle rend les personnes plus libres d’être de meilleurs chrétiens et de bénéficier d’une vie sacramentelle.

L’Institute for Psychological Sciences (www.ipsciences.edu) est situé à Crystal City, Virginia, près de Washington, aux Etats-Unis.

Zenit : Que peut faire un catholique souffrant de dépression ?

G. Sweeney : Souvent la dépression ou d’autres formes de maladies mentales constituent un obstacle au libre arbitre. Un traitement psychologique efficace est très utile, parce qu’il est destiné essentiellement à libérer la personne, non seulement pour la rendre capable de voir le « bien » d’une manière plus réaliste, mais également de choisir le « bien ».

Traditionnellement il existait une méfiance réciproque entre la psychologie et les catholiques. La psychologie tendait à voir la foi comme un comportement superstitieux, alors que les croyants tendaient à voir la psychologie comme une science inutile pour eux. Une foi suffisamment forte devait pouvoir venir à bout de tous les problèmes, quels qu’ils soient.

Aucune des deux positions ne reflètent la vérité. Une psychologie enracinée dans la vision catholique de la personne humaine n’est pas seulement fidèle à la science mais aussi à Dieu. La science de la psychologie a beaucoup à offrir aux personnes dont le libre arbitre s’est affaibli.

Prenons par exemple le cas d’une personne excessivement scrupuleuse. Cette personne pourrait en effet être affectée d’une « névrose obsessionnelle compulsive ». S’il n’est pas soigné correctement, ce désordre psychologique peu s’aggraver au point de rendre la personne incapable de vivre normalement.

Des catholiques, bons et fidèles, pourraient par exemple cesser d’aller se confesser pour éviter l’impression d’avoir fait une confession qui ne soit pas valable, ayant oublier de confesser « tous » leurs péchés. Ils pourraient en fait cesser d’aller communier par crainte de recevoir le Seigneur de manière indigne. Ce désordre est facilement diagnostiqué et soigné.

La science de la psychologie est au service de l’Eglise : en aidant cette personne à réacquérir une vie normale, elle la libère de la névrose. Mais la liberté n’est pas seulement une « liberté de », mais également une « liberté pour » : une liberté pour être de meilleurs chrétiens et pour pouvoir bénéficier d’une vie sacramentelle.

Si l’on pose correctement le problème, il n’existe aucun conflit entre une psychologie fondée sur une saine anthropologie et les enseignements de l’Eglise. Le défi est de trouver des psychologues bien formés, dans cette perspective, qui ont la volonté de respecter les valeurs religieuses de leurs patients, sans jamais les mettre en danger.

Zenit : Quelles sont aujourd’hui les erreurs les plus courantes dans le traitement de la dépression ?

G. Sweeney : L’une des erreurs les plus graves et les plus courantes dans le traitement de la dépression est la conviction que « seul » un traitement médical peut soulager la dépression.

Même s’il est vrai que l’usage des anti-dépresseurs a apporté un énorme soulagement aux patients affectés par cette maladie, avoir recours exclusivement au traitement pharmaceutique, en excluant des formes plus traditionnelles de psychothérapies, n’est pas le meilleur traitement.

L’un des traitements les plus efficaces contre la dépression est ce que les psychologues appellent la « restructuration cognitive ». Ce type de traitement tend à réordonner les sentiments selon la raison.

Souvent, dans les cas de dépression, le sentiment de désespoir et d’impuissance envahit toute la personne et le patient n’est plus en mesure de voir la réalité de manière objective. C’est comme s’il voyait le monde à travers des lunettes noires. Un événement sans conséquence peut être interprété par une personne déprimée comme négatif ou agressif, quand en réalité il n’en est rien.

Le traitement consiste à aider la personne à restructurer ses propres pensées, à l’aider à reconstruire ses schémas désordonnés et négatifs. On l’entraîne à ordonner ses sentiments selon la raison et à voir les situations de manière plus objective. Il s’agit d’un traitement qui s’est avéré extrêmement efficace dans l’aide aux personnes affectées par cette pathologie.

Il est important de noter que parfois les personnes dépressives ne réagissent pas bien, au début, à cette thérapie. C’est souvent le cas quand la dépression est profonde.

Dans ce cas, le meilleur traitement est d’associer des médicaments à une thérapie cognitive. Dans tous les cas, la prise de médicaments, seule, n’est jamais une bonne solution au problème à long terme.

Zenit : De quelle manière une vie vécue dans le Christ, c’est-à-dire à travers la participation aux sacrements, une vie de prière, la direction spirituelle, peut-elle aider à soigner les troubles psychologiques ?

G. Sweeney : La participation à la vie sacramentelle, la prière et la direction spirituelle sont tous des moyens à travers lesquels recevoir la grâce divine.

La spiritualité chrétienne signifie vivre dans le Christ, dans la grâce de l’Esprit Saint qui nous fait grandir dans la foi, dans l’espérance fondée sur la foi et surtout dans l’amour comme plénitude de la foi, en marchant sur le droit chemin vers la communion dans la Sainte Trinité.

Puisque la grâce perfectionne la nature, cette spiritualité est en totale harmonie avec la santé psychologique. Mais santé spirituelle et santé psychologique ne sont pas exactement la même chose, et ne sont pas toujours proportionnelles.

Une personne affectée d’une névrose obsessionnelle compulsive, qui n’arrive pas à faire face à la confession, voire même la communion, a besoin de se soigner afin de pouvoir profiter des moyens à travers lesquels recevoir la grâce sanctifiante. Toutefois, la santé mentale, comme la santé physique, n’est pas une condition nécessaire pour la sainteté.

Une personne plongée dans un état d’anxiété n’a pas besoin de soigner ce désordre pour pouvoir ensuite développer les vertus de courage et de force ou grandir dans la confiance en Dieu. Cela aide certes, mais ce n’est pas une condition sine qua non pour grandir dans les vertus humaines. Les difficultés rencontrées dans le combat pour venir à bout de problèmes psychologiques peuvent en effet faire grandir certaines vertus, ou être motifs de plus grandes grâces et d’un approfondissement de la vie spirituelle.

Ainsi, il est extrêmement important que la personne souffrant de problèmes psychologiques participe activement à la vie sacramentelle, même si elle est sous traitement, à moins que les problèmes dont elle souffre empêchent cette participation.

Les effets de la grâce, combinés à un sain traitement psychologique sont très efficaces pour l’obtention de la guérison. Tout catholique souffrant de maladie mentale devrait continuer à recevoir les sacrements le plus souvent et de la manière la plus digne possible, tout en conservant une vie de prière équilibrée.

Un bon directeur spirituel peut être de grande utilité à ce propos, en se prés
entant comme un guide sur le chemin de la croissance spirituelle. Que ce soit à travers la thérapie ou à travers la spiritualité, c’est toujours le Christ qui guérit.

Zenit : Un catholique souffrant de problèmes psychologiques doit-il nécessairement se faire soigner par un médecin catholique ?

G. Sweeney : Chaque théorie psychologique se base sur des thèses déterminées relatives à la nature et au destin de la personne humaine. Ces théories sont toujours laïques par nature et parfois ouvertement anti-religieuses. Parfois elles nient la liberté humaine, les absolus moraux et donc la réalité du péché.

C’est pour cette raison que le Saint-Père dans son exhortation apostolique « Reconciliatio et penitentia », affirme dans le n. 18 : « Ce sens du péché disparaît également dans la société contemporaine à cause des équivoques où l’on tombe en accueillant certains résultats des sciences humaines. Ainsi en partant de quelques unes des affirmations de la psychologie, la préoccupation de ne pas culpabiliser ou de ne pas mettre un frein à la liberté porte à ne jamais reconnaître aucun manquement ».

Ainsi les catholiques doivent être très prudents face à l’assistance psychologique et à l’influence de modes psychologiques sur leurs vies.

En outre, les psychologues en général ont tendance à voir la religion d’une manière plutôt négative, ce qui crée des difficultés supplémentaires aux catholiques. Dans la psychothérapie, le médecin peut influencer son patient de manière subtile et lui ôter progressivement ses convictions religieuses.

Avec un bon psychologue catholique en revanche, la foi et la pratique religieuse des patients sera encouragée et l’on pourra même parler ouvertement de questions religieuses pendant les séances. Un tel psychologue travaille en se basant sur une vision authentique de la personne humaine, fondée sur les enseignements de l’Eglise et renforcée par de solides éléments psychologiques.

Ce type d’approche est absolument essentiel pour n’importe quel catholique qui cherche de l’aide pour une question de santé mentale

Zenit : Qu’est-ce que l’Eglise offre aux chrétiens confrontés à des problèmes psychologiques ?

G. Sweeney : L’Eglise nous offre le Christ, qui est la révélation de l’amour du Père et la révélation de l’homme à l’homme.

Le Christ nous révèle le sens de notre vie et les réponses aux désirs profonds de notre cœur. En nous offrant le Christ, l’Eglise nous donne ce que nous désirons le plus et l’unique chose qui est en mesure de nous satisfaire véritablement.

Dans cette « vallée de larmes », nous trouverons inévitablement désillusions, tragédies et souffrances. Mais l’Eglise nous indique, au-delà de cet horizon, le cœur de la Trinité, où le Christ nous prépare une demeure. Le Christ nous montre ainsi le sens salvifique de la souffrance. A travers les sacrements de l’Eglise, nous rencontrons le Christ et nous sommes continuellement renouvelés et transformés à mesure où grandit notre union avec lui.

Toutefois, l’Eglise doit être consciente du service unique que la science de la psychologie peut offrir, notamment si celle-ci est placée entre les mains de psychologues bien formés et équilibrés, qui comprennent l’enseignement de l’Eglise sur la liberté et la dignité humaine.

La collaboration entre les sciences humaines et le travail pastoral est d’une très grande importance. Une collaboration harmonieuse peut amener des âmes au Christ et favoriser la venue du Royaume de Dieu sur la terre.

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ZENIT Staff

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