Discours du président italien Napolitano à une délégation du synode

Un événement « historique »

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ROME, Mardi 19 octobre 2010 (ZENIT.org) – Le président de la République italienne, M. Giorgio Napolitano a reçu, au palais présidentiel du Quirinal, mercredi dernier, 13 octobre 2010, une délégation de pères synodaux. Il a lancé un appel à « réconcilier les civilisations » et il a qualifié le synode d’événement « historique ».

Étaient présents le Président délégué ad honorem du synode, le card. Nasrallah Pierre Sfeir, Patriarche d’Antioche des Maronites, Évêque de Joubbé, Sarba et Jounieh des Maronites; et les Présidents délégués: le card. Leonardo Sandri, Préfet de la Congrégation pour les Eglises orientales et Ignace Youssif III Younan, Patriarche d’Antioche des Syriens.

Faisaient également partie de cette délégation, le Rapporteur général, Antonios Naguib, Patriarche d’Alexandrie des Coptes; Gregorios III Laham, Patriarche d’Antioche des Grecs-Melkites, Archevêque de Damas des Grecs-Melkites; Nerses Bedros XIX Tarmouni, Patriarche de Cilicie des Arméniens, Archevêque de Beyrouth des Arméniens, et Fouad Twal, Patriarche de Jérusalem des Latins.

Se sont également rendus au Quirinal le Secrétaire général du synode, Mgr Nikola Eterovic, Archevêque titulaire de Cibale, le Sous-Secrétaire, Mgr Fortunato Frezza et le P. Ambrogio Ivan Samus.

Pour l’Italie, étaient présents Mme Stefania Craxi, Sous-Secrétaire d’État aux Affaires étrangères et M. Antonio Zanardi Landi, Ambassadeur d’Italie près le Saint-Siège.

Après les interventions de Mgr Nicola Eterovic, des Patriarches Antonios Naguib et Ignace Youssif III Younan et du cardinal Leonardo Sandri, le Chef de l’État italien a adressé un discours aux participants.

L’Osservatore Romano en français publie in extenso cette intervention du président italien, dans son édition de ce 19 octobre 2010.

Monsieur le cardinal Sandri, Béatitudes,

Je vous remercie profondément d’avoir voulu nous rendre visite et nous donner témoignage d’un événement très significatif que nous pourrions sans doute qualifier, sans exagérer, d’événement historique: le Synode pour le Moyen-Orient. Vous avez voulu vous rendre dans ce Palais dans lequel les Présidents de la République sont les derniers arrivés; en effet, mes prédécesseurs et moi-même sommes depuis soixante ans seulement dans ce lieu qui, près de trois siècles durant, a été la résidence des Papes.

Je voudrais d’emblée vous remercier de votre « bon italien ». J’ai écouté le Patriarche Naguib: personnellement, je serais incapable de dialoguer avec vous en latin parce que l’époque de mes études est bien trop éloignée. Cette conversion du latin à l’italien est quelque chose que, en tant que Président de la République, j’apprécie profondément.

Votre engagement, si j’ai bien compris, est un engagement à renouveler, relancer et valoriser la présence catholique et, d’une manière plus générale, les communautés chrétiennes au Moyen-Orient. C’est un engagement qui, j’en suis convaincu, peut apporter de grands avantages et donner de l’élan à la cause du pluralisme religieux, à la cause du dialogue, à la cause de la paix dans cette région tourmentée. Naturellement, sans confondre les responsabilités de la politique et celles des Églises, je crois qu’il existe quelque chose de profondément commun, bien que distinct, entre l’engagement des autorités politiques, comme celles italiennes, et votre engagement, surtout en faveur de la paix.

Au cours de cette année et précédemment, je me suis rendu dans différents pays de la région: à Jérusalem pour une rencontre aussi bien avec les autorités israéliennes qu’avec les représentations palestiniennes, parce que nous sommes toujours et profondément hantés par la solution de paix qui depuis trop longtemps est attendue entre Israël et les populations et représentations palestiniennes. L’Italie a toujours oeuvré – et c’est là une constante de la politique étrangère italienne, indépendamment des gouvernements qui se sont succédé – dans un esprit d’amitié avec Israël et, en même temps, dans un esprit d’amitié authentique avec les pays arabes, en faveur d’une résolution de ce conflit, afin que l’on parvienne enfin à la cohabitation pacifique, dans le respect réciproque, de l’État d’Israël et d’un État palestinien indépendant, stable et prospère.

Nous ne savons pas si, au cours de cette phase, des voies nouvelles s’ouvrent enfin – c’est ce que nous souhaitons vivement -, mais c’est à cet effet qu’oeuvre notre gouvernement, ici représenté par la sous-secrétaire Mme Craxi qui justement, dans le cadre du Ministère des Affaires étrangères, se consacre avec un élan particulier à la réalisation de ce grand objectif. Nous souhaitons qu’il en sera ainsi et que chacun puisse réellement contribuer à ce que l’on puisse enfin sortir de cette situation d’énorme souffrance, notamment pour les populations palestiniennes, et qui a une incidence extrêmement grave sur l’ensemble du cadre régional du Moyen-Orient, ou – comme l’on dit aujourd’hui – du grand Moyen-Orient. Nous savons que, si la question du conflit israélo-palestinien est enfin résolue – et elle l’est avec justice – on pourra se diriger vers la résolution d’autres tensions, nombreuses et inquiétantes, dans toute la région.

Vous avez parlé à juste titre, d’une manière plus générale, de « droits humains »: jadis, on parlait de « droits de l’homme », ce qui est une traduction discutable parce que les droits humains sont les droits de la personne – de l’homme comme de la femme – et c’est là une des dimensions fondamentales de l’engagement de l’Union européenne. Je crois qu’il s’agit d’un engagement que nous devrions toujours mettre au premier plan, même quand nous sommes hantés par la crise économique et que, par conséquent, l’on discute beaucoup d’économie, on regarde les chiffres et les courbes, on fait des prévisions. Or, nous ne pouvons pas oublier que l’Union européenne, et avant celle-ci la Communauté européenne, est née en tant que communauté de valeurs, et parmi ces valeurs les « droits humains » représentent un pivot fondamental qui – je le répète – devrait toujours guider l’action de l’Union européenne, même quand l’attention est si fortement attirée par d’autres problématiques.

Cette année, je me suis rendu également au Liban et en Syrie, et dans ces deux pays, les conditions sont certainement meilleures, notamment grâce à l’oeuvre des catholiques et des chrétiens: il y a plus de pluralisme, plus de respect, et je pense qu’ils représentent vraiment un exemple qui devrait être suivi par d’autres contextes étatiques dans cette région du monde. L’Union européenne, quant à elle, en développant ses relations avec ses pays, ne devrait jamais oublier de poser avec vigueur la question de la liberté de culte et, d’une manière plus générale, de la liberté de religion. À vrai dire, j’ai personnellement rencontré à Damas les représentants de toutes les confessions – je ne sais pas si quelqu’un d’entre vous était présent – et je me souviens qu’il y avait aussi les représentants de la communauté musulmane et de la communauté juive. Je crois, en effet, que ce grand courant du dialogue entre les religions monothéistes, que l’Église catholique promeut avec beaucoup de conviction – le Souverain Pontife actuel le fait personnellement – est réellement une des voies fondamentales pour assurer ce qui a été appelé par certains, à mon avis de façon appropriée, la réconciliation entre les civilisations.

Au fond, pour faire face à des défis aussi complexes, aussi ardus en cette phase historique, et qui touchent même les questions de la survie de la planète et, par conséquent, les thèmes liés à notre destin commun, je crois que la réconciliation entre les civilisations, qui est possible et qu’il faut rech
ercher de manière active, est la plus grande ressource dont nous disposons pour nourrir notre espoir et poursuivre nos idéaux, nos objectifs.

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ZENIT Staff

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