Bénin: L´engagement de promouvoir un esprit et un comportement de paix

Par le Chef Amadou Gasseto

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CITE DU VATICAN, Dimanche 27 janvier 2002 (ZENIT.org) – « En acceptant de participer à cette prière, je prends l´engagement de promouvoir chez mes fidèles un esprit et un comportement de paix susceptibles d´avoir un impact favorable sur la société béninoise ». C´est dans cet esprit que le Chef Amadou Gasseto, représentant des religions traditionnelles africaines à la Journée de prière pour la paix à Assise, le 24 janvier dernier, a prononcé le témoignage suivant pour la paix.

Nous le reproduisons intégralement dans son original en français sans nous autoriser de coupure, dans l´esprit d´écoute et de respect promus par la rencontre d´Assise. Le Chef Amadou insiste en particulier sur la préservation de la nature et sur le dialogue, sous la forme de « l´art de la palabre » pour résoudre les conflits.

Rappelons à ce propos que le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux a publié en 1999 un volume intitulé « Cheminer ensemble. L´Eglise catholique en dialogue avec les traditions religieuses du monde » (Libreria Editrice Vaticana).

Le livre consacre quelques pages aux religions traditionnelles et souligne les valeurs distinctives de ces religions, dont la place de la famille, considérée comme « un précieux trésor », un « grand respect pour le caractère sacré de la vie », la « haute estime » des personnes âgées, et l´absence de « dichotomie entre l´engagement social, politique ou économique et la religion ».

-Intervention du Chef Amadou –

« L´initiative du Pape Jean-Paul II en faveur de la paix a toujours suscité en moi beaucoup de joie et d´espoir pour notre monde souvent déchiré par la violence et les guerres. L´invitation qui m´a été faite de participer à Assise à la Prière pour la Paix m´honore grandement et honore tous les fidèles adeptes du Vodum Avélékété dont je suis le grand prêtre. En acceptant de participer à cette prière, je prends l´engagement de promouvoir chez mes fidèles un esprit et un comportement de paix susceptibles d´avoir un impact favorable sur la société béninoise.

Mais je reconnais tout d´abord que la paix est un don que Dieu fait aux hommes. Cependant ce don est laissé à la responsabilité de l´homme appelé par son Créateur à construire la paix en ce monde. C´est une responsabilité universelle qui concerne toute la création.

Pour moi, responsable de la Religion traditionnelle Vodun, la paix n´est pas possible tant que subsistent des déchirements, des divisions, et des antagonismes entre les hommes. Nous devons commencer par nous maîtriser nous-mêmes pour ne pas être auteurs de paroles qui génèrent des sentiments d´opposition, d´exclusion et de violence. Nous devons être responsables de l´esprit que produit nos paroles. Ce devrait être responsables de l´esprit que produit nos paroles. Ce devrait être un esprit qui crée la concorde, la convivialité et la fraternité. Alors la paix aura un terrain favorable pour s´instaurer parmi les hommes.

Il y a une chose dont je suis convaincu: la paix dans le monde dépend de la paix entre les hommes. La responsabilité de l´homme dans le monde, influe non seulement sur la société mais également sur la Création entière. Quand il n´y a pas la paix entre les hommes, il n´y a pas non plus la paix entre le reste de la Création et l´homme. Les saisons sont perturbées et la terre ne porte plus les semences pour donner de la nourriture aux hommes. Mais quand les hommes travaillent à la paix dans une Nations, sa terre devient généreuse et les troupeaux se multiplient pour que le plus grand bien de l´homme. Cela est une loi de la nature qui vient du Créateur, qui a lié le destin de la Création à la responsabilité de l´homme.

C´est pourquoi il est bon d´inviter chaque année les hommes à changer leur coeur en renonçant à la haine, à la violence, à l´injustice. Les responsables des Religions dans le monde ne devraient ni oublier ni négliger cette pratique. Il s´agit de réparer le mal qui a été fait contre la Création par la responsabilité de l´homme, de demander pardon aux esprits tutélaires des zones qui ont été touchées par la violence et par le mal commis par l´homme, de demander pardon et de procéder aux sacrifices réparateurs et purificateurs et de restaurer ainsi la paix. Je déclare que cette purification de la nature est d´importance capitale pour ramener la paix entre les hommes et le reste de la Création. Dans les temps anciens, aux temps des rois, le Bénin respectait scrupuleusement cette pratique et le pays jouissait de la paix et des bienfaits de la nature. Les chefs des temps actuels doivent s´en soucier. Et nous voulons le leur rappeler après notre retour d´Assise comme actualisation au niveau du Bénin de ce que nous aurons vécu ensemble au niveau mondial en Italie.

Je veux également souligner une chose essentielle: le respect des mânes des ancêtres. Nous devons nous rappeler que les ancêtres qui nous ont précédés dans ce monde ont vécu dans un rapport de respect envers Dieu et la nature pour nous laisser un monde encore habitable et bienfaisant pour l´homme. Le monde tel qu´il l´ont organisé en leur temps n´est pas parfait en tous points mais il avait l´avantage de maintenir une grande cohésion entre les hommes et la nature. Des interdits préservaient les sources, les forêts, et les zones de renouvellement de la faune et de la flore. Des interdits déterminaient les rapports humains au sein de la famille et de la société. La préservation de l´écosystème et d´un grand équilibre au sein de la société contribuait efficacement à maintenir cette cohésion entre les hommes et la nature. On ne peut aujourd´hui parler de paix sans le respect de ce monde légué par les ancêtres dans une recherche permanente pour l´améliorer en faveur des hommes de notre temps.

Parmi les pratiques sociales que nous ont légué nos ancêtres sur la terre africaine du Bénin, se trouve l´art de la palabre pour régler les conflits interpersonnels et sociaux. On y apprend l´art de savoir respecter son adversaire, de savoir tolérer sa différence et de comprendre les convictions d´autrui. Cette pratique doit inspirer les divers responsables de la paix dans le monde pour qu´ils sachent ramener les antagonistes au dialogue qui seul peut permettre de restaurer la paix dans les coeurs et dans les nations. Rien ne vaut le dialogue qui permet de se séparer dans la compréhension réciproque. On passe alors de la haine à l´estime mutuelle. Ce rôle important de la palabre doit être sauvegardé dans les instances internationales qui décident de la paix entre les nations et dans les nations entre les personnes. La palabre doit nous apporter aujourd´hui son concours pour nous permettre de gérer le monde de notre temps avec toutes ses difficultés qui relèvent toujours de la responsabilité de l´homme.

Je viens de proclamer dans ce que vous venez de lire mes convictions religieuses sur mon engagement en faveur de la paix dans mon pays et dans le monde. Et je ne saurais finir ici sans affirmer avec force que la justice et l´amour fraternel demeurent les deux piliers incontournables de la véritable paix entre les hommes. Le problème du développement des pays pauvres, dont le mien, constitue sans doute la plus grande menace contre la paix dans le monde. La solidarité entre les peuples doit conduire à un partage des richesses du monde plus équitable. Les pays développés doivent soutenir les pays moins avancés dans leurs efforts vers le développement. Le commerce international ne doit pas favoriser seulement ceux qui possèdent une économie plus foret mais respecter l´effort réel de travail et de production de chaque peuple. Le XXIe siècle dans lequel nous sommes entrés doit devenir un siècle de construction d´un monde plus juste et plus fraternel. Les valeurs que nous devons promouvoir en tant que chefs religieux sont certes de l´amour et de la c
onvivialité, dans un monde où nous sommes en réalité tous frères. C´est en oeuvrant ainsi que nous construirons la paix dans le monde.

Que Dieu bénisse la Rencontre d´Assise et qu´il accorde à notre monde la paix.

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ZENIT Staff

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