Mgr Ivan Jurkovic, © wikipedia

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ONU: migrations et droits de l'homme, déclaration du Saint-Siège

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Le Saint-Siège appelle au «dialogue» et à «l’acceptation mutuelle»

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Le problème des migrants ne peut se résoudre que par le « dialogue » et « l’acceptation mutuelle », estime Mgr Ivan Jurkovic, représentant permanent du Saint-Siège à l’ONU, à Genève.
Mgr Jurkovic est en effet intervenu – en anglais – à propos du Rapport spécial sur les migrants présenté à Genève le 14 juin dernier, lors de la 32e session du Conseil des droits de l’homme qui a achevé son travail vendredi 1er juillet 2016.
Le dialogue et « la compréhension mutuelle » aident à « promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous », estime Mgr Jurkovic.
Il rappelle que « les migrants deviennent des agents du développement culturel et économique » du pays « par l’adoption d’une approche basée sur les droits humains ».
Leur « contribution considérable et positive », poursuit-il, « aux pays qui les reçoivent doit être reconnue et affirmée ». « Leur travail représente une solution pour le problème démographique de populations hôtes vieillissante », ajoute Mgr Jurkovic. Ils contribuent également « à construire des ponts entre cultures ».
Voici notre traduction de cette intervention.
Marina Droujinina
Déclaration de Mgr Ivan Jurkovic
Article 3 – Rapporteur spécial sur les migrants, Genève le 14 juin 2016.
Monsieur le Président,
La délégation du Saint-Siège suit les problèmes de migration avec une attention particulière et tient à féliciter le Rapporteur spécial pour son rapport.
La migration est un phénomène mondial et en 2015, le nombre de migrants a dépassé les 244 millions de personnes, soit une augmentation de 41 pour cent en comparaison avec l’an 2000. (1). Ces mouvements sont souvent la conséquence d’inégalités sociales et économiques, de violents conflits, de catastrophes naturelles et aussi de persécutions religieuses. La grande majorité des migrants dans le monde sont des travailleurs migrants, en quête d’une possibilité d’améliorer leurs conditions économiques et sociales. Nous sommes tous conscients de la récente crise économique et de ses conséquences qui, parfois, résulte dans la perte d’une « perspective humaine » au cœur des bouleversements.
Tout en comprenant le besoin de politiques nationales pour affronter un tel flux de migrants et de réfugiés, ma délégation tient à faire observer les appels répétés du pape François aux responsables mondiaux de la part de tous ces frères et sœurs forcés de fuir en quête d’une vie en sécurité et décente. Ces personnes ne doivent pas être traitées uniquement comme une menace à la stabilité nationale et ainsi livrées à l’exploitation par des personnes sans scrupules ou traitées comme de simples marchandises ou produits, sans véritable préoccupation pour leurs droits et leurs aspirations.
L’Objectif de développement durable 16 de l’Agenda pour le développement 2030 vise à « promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous aux fins du développement durable, assurer l’accès de tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous ». Cet objectif peut être atteint principalement à travers le dialogue et la compréhension mutuelle. En outre, la contribution considérable et positive des migrants aux pays qui les reçoivent doit être reconnue et affirmée. Leur travail représente une solution pour le problème démographique de populations hôtes vieillissante. Ils contribuent à construire des ponts entre cultures et à soutenir le bien-être et le développement de leur pays d’origine par les versements qu’ils envoient à leurs familles et à travers les nouvelles compétences qu’ils acquièrent.
Leur contribution positive est le plus évidente lorsqu’ils deviennent pleinement intégrés dans la nouvelle société qui les accueille et deviennent ainsi conscients qu’un meilleur avenir peut se construire ensemble. Pour cette raison, le dialogue et l’acceptation mutuelle représentent des éléments indispensables pour une intégration réussie. Par l’adoption d’une approche basée sur les droits humains, les migrants deviennent des agents du développement culturel et économique. En outre, l’acceptation des droits humains fondamentaux est nécessaire pour le développement d’un enrichissement mutuel.
Des politiques cohérentes sont essentielles pour assurer une migration sécurisée et ordonnée et le respect des droits des migrants. La migration irrégulière, la traite de personnes et la détention de mineurs non accompagnés sont quelques-uns des problèmes les plus communs liés aux tendances actuelles de migration.  En outre, trop de migrants continuent de travailler et de vivre dans des conditions précaires, dangereuses et indécentes. Ils sont souvent marginalisés et sujets à discrimination et à des stéréotypes négatifs et n’ont pas droit à l’accès aux services de soins sociaux, éducatifs et de santé.
Il est important de surmonter les facteurs négatifs favorisant la migration ainsi que de mettre en œuvre et d’exécuter des politiques et des projets qui visent  à limiter les effets néfastes de la migration tout en fournissant une protection particulière aux catégories les plus vulnérables : les enfants, les femmes et les personnes âgées. Les personnes ne devraient pas être forcées à immigrer, mais être libres de le faire dans des conditions planifiées et volontaires. Les États et les organisations internationales, en lien avec la société civile, ont la responsabilité d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques, des stratégies et des accords de migration pour rendre l’expérience de la migration plus humaine et pour faire en sorte que le phénomène ait des conséquences positives pour tous.
L’éducation demeure l’un des instruments les plus efficaces pour surmonter les causes négatives de la migration et pour remédier aux soupçons, à l’indifférence et aux préjugés expérimentés par de nombreux migrants. Il y a un besoin urgent de davantage de partage des connaissances pour assurer une intégration culturelle et sociale. L’éducation peut jouer un rôle vital dans ce processus et dans la production de politiques nationales et internationales qui promeuvent un sens de la responsabilité et de la solidarité sur lequel toute société devrait être basée. En outre, les migrants sont les acteurs entreprenants au sein du processus de migration : ils doivent comprendre leurs droits, et avoir les moyens de prendre des décisions conscientes à cet égard.
Monsieur le Président,
J’aimerais conclure en citant le pape François : « Nous sommes invités à promouvoir une culture du dialogue en cherchant par tous les moyens à ouvrir des instances afin qu’il soit possible et que cela nous permette de reconstruire le tissu social. La culture du dialogue implique un apprentissage authentique, une ascèse qui nous aide à reconnaître l’autre comme un interlocuteur valable ; qui nous permet de regarder l’étranger, le migrant, celui qui appartient à une autre culture comme un sujet à écouter, considéré et apprécié. Il est urgent pour nous aujourd’hui d’impliquer tous les acteurs sociaux dans la promotion d’une culture qui privilégie le dialogue comme forme de rencontre’, en promouvant ‘la recherche de consensus et d’accords, mais sans la séparer de la préoccupation d’une société juste, capable de mémoire, et sans exclusions’ (Evangelii Gaudium, 239) ». (2)
NOTES

  1. Département des Affaires sociales et économiques des Nations Unies, « Instruments internationaux relatifs aux migrations internationales : Révision 2015 ».
  2. Pape François, discours à la cérémonie de la remise du Prix Charlemagne, 6 mai 2016.

© Traduction de Zenit, Constance Roques

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Constance Roques

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