ROME, Lundi 12 avril 2010 (ZENIT.org) - Le sociologue italien Massimo Introvigne fait éclater la nouvelle bulle lancée dans la presse à propos d'une lettre du cardinal Ratzinger de 1985 : le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi n'a pas « protégé » Kiesle, un prêtre californien soupçonné de pédophilie. La réalité est tout autre que ce qu'en dit un organe de presse d'Outre-Atlantique, comme il l'a expliqué à ZENIT Massimo Introvigne rappelle que la perte de l'état clérical peut survenir dans deux situations très différentes. Ou il s'agit d'une « sanction » infligée à la suite d'un délit très grave comme dans le cas de pédophilie. Dans ce cas, jusqu'en 2001 ce sont les tribunaux diocésains qui sont compétents. Ou bien il s'agit d'une « faveur » demandée par un prêtre, qui souhaite ne plus exercer son ministère, qu'il veuille se marier ou, comme le suggère Massimo Introvigne, échapper à des sanctions ecclésiastiques. Dans ce cas, l'examen des demandes relève de la Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF). Et le droit canonique dit : « pas avant 40 ans ». « Dans le premier cas, on punit un prêtre pédophile. Dans le second, on lui fait une faveur », résume le sociologue. Voilà le cadre juridique nécessaire pour « comprendre la signification de la lettre du 6 novembre 1985 du cardinal Ratzinger à Mgr John Stephen Cummins (et non « Cummings »), évêque d'Oakland (Californie) ». Stephen Miller Kiesle, accusé de sévices sur mineurs, demande - comme une faveur - d'être dispensé de l'état clérical, pour se marier. La règle des 40 ans intervient : Kiesle en a 38. L'évêque Cummins demande à Rome une exception. Or, fait observer Massimo Introvigne, si la CDF l'avait accordée, Kiesle n'aurait pas été « puni ». Rome dit non. Le cardinal Ratzinger, préfet de la CDF, « répond en exprimant sa sympathie pour la position délicate de l'évêque ». « En termes moins curiaux », traduit Introvigne : il comprend bien que « l'évêque aimerait que Rome lui retire cette épine du pied ». Mais le cardinal considère que « pour le bien de l'Eglise », l'évêque doit « respecter rigoureusement » les procédures, « c'est-à-dire considérer que l'âge du demandeur ne permet pas d'accueillir sa demande de dispense de l'état clérical ». « Considérer le bien universel de l'Eglise » ne signifie pas, rectifie Introvigne, « pour éviter des scandales ». Le sociologue rappelle en effet que l'on avait « amplement parlé en Californie » du cas d'abus sexuels attribués à Kiesle et que « le scandale avait déjà eu lieu ». Mais cela signifie : « pour ne pas créer de précédents qui ouvriraient la porte à de nombreuses autres demandes de dispenses de prêtres de moins de quarante ans ». Autrement dit, continue l'argumentation : « le cardinal Ratzinger explique à l'évêque que l'on devra prudemment attendre, comme c'est toujours le cas pour des demandes venant de prêtres qui n'ont pas quarante ans ». En attendant, le diocèse d'Oakland pourra « poursuivre son enquête pénale susceptible de conduire Kiesle à la démission de l'état clérical », non plus en réponse à sa demande, pour se marier, mais comme une « sanction pénale pour les sévices dont il s'est rendu coupable », explique le sociologue. De fait, le diocèse d'Oakland continue d'enquêter et, en 1987, il exclut Kiesle de tout ministère. Il a quarante ans. La congrégation romaine lui accorde alors la dispense de l'état clérical. Kiesle se marie. Massimo Introvigne ajoute :  « Il est bien connu des services de police comme personnalité perturbée et soupconné de sévices sur mineurs. Les affaires impliquant Kiesle après 1987 évidemment ne concernent aucune personnalité de l'Eglise, mais seulement les tribunaux civils et la police. S'il a commis de nouveaux abus, la faute n'en est pas à l'Eglise - que Kiesle avait quittée et qui n'avait plus aucune compétence pour le surveiller - mais aux autorités civiles ». Anita S. Bourdin