Réflexion du père Lombardi sur les abus sexuels sur mineurs

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ROME, Lundi 12 avril 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous la réflexion du père Federico Lombardi, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, concernant les abus sexuels sur mineurs de la part de membres du clergé. Ce texte a été publié par Radio Vatican le 9 avril dernier.

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« La polémique sur les abus sexuels du clergé se poursuit, entre informations et commentaires en tout genre. Comment avancer dans la tempête en gardant le cap, en accord avec le ‘Duc in Altum – Avance au large évangélique ?

Avant tout en continuant à chercher la vérité et le bien de celui qui a été offensé. On demeure impressionné de voir tant de blessures anciennes mais toujours ouvertes revenir à la surface, après des décennies parfois. Nombre de victimes ne recherchent aucun dédommagement matériel mais une libération, la reconnaissance de leur cas. Pour mieux comprendre, il faut probablement approfondir les événements qui ont si négativement marqué la vie de personnes, de l’Eglise et de la société, autant que la violence et la haine de conflits si difficiles à régler dans la réconciliation. Ces abus sur mineurs blessent les êtres au plus profond, et les épiscopats concernés ont eu raison de donner libre cours à la parole et à l’écoute des victimes, sans prétendre que la question aurait été réglée par les centres d’écoute depuis longtemps en fonction. De même, les prélats qui, avec un grand sens paternel, ont accordé une attention spéciale, spirituelle et liturgique, aux victimes ont bien fait. Manifestement, le nombre des dénonciations diminuera comme cela s’est produit après la crise aux Etats-Unis. Mais pour beaucoup, le processus de guérison ne fait que commencer, tandis que pour d’autres il n’est pas même entrepris. Le Pape a dit être lui aussi prêt à rencontrer à nouveau des victimes, car il est lui aussi engagé dans ce chemin de conversion ecclésiale. Or, ce chemin, pour avoir des effets profonds, doit être parcouru dans le respect des personnes et la recherche de la paix.

Parallèlement à l’attention envers les victimes, il convient de poursuivre avec décision et précision les justes procédures canoniques contre les coupables, et de collaborer avec les autorités civiles quant à leurs compétences judiciaires, selon les spécificités des ordonnancements nationaux. Ainsi sera-t-il possible de rétablir un climat de justice et de confiance en l’institution ecclésiale. Par inexpérience ou mauvaise préparation, souvent pris de court devant les accusations, des responsables et institutions ecclésiales ne disposent pas encore des critères et des mécanismes d’intervention nécessaires quoique douloureux. Si la loi civile dispose de critères généraux, la loi canonique doit tenir compte de l’extrême gravité morale que constitue un abus de confiance commis par des personnes ayant des responsabilités au sein de la communauté, et de la criante contradiction entre leurs actes et leurs engagements. La transparence et la rigueur s’imposent dans un gouvernement juste et sage de l’Eglise, loin des préoccupations malvenues de sauvegarder à tout prix la réputation de l’Eglise.

La sélection et la formation des candidats au sacerdoce, comme des agents pastoraux et éducatifs de l’Eglise, doit être marquée par la prévention de ce type d’abus, la préparation à une personnalité équilibrée et à une affectivité mature, y compris sexuelle. Plus que jamais ce but est difficile à atteindre, même si les meilleures connaissances psychologiques et médicales viennent en renfort de la formation spirituelle et morale. Certains ont observé que la plupart de ces abus ont eu lieu à l’apogée de la période dénommée ‘Révolution sexuelle’, et la formation sacerdotale doit tenir compte d’un phénomène allant de pair avec la sécularisation. Il s’agit au fond de redécouvrir et de réaffirmer le sens et l’importance de la signification de la sexualité, de la chasteté et des relations affectives dans le monde d’aujourd’hui, concrètement et non plus seulement sous une forme abstraite. Sa violation comme sa sous-évaluation est source de désordres et de souffrances. Dans sa lettre aux catholiques irlandais, le Saint-Père souligne qu’une vie chrétienne et sacerdotale peut répondre aujourd’hui aux exigences de la vocation en s’alimentant de la foi et de l’amitié du Christ.

Celui qui aime la vérité et la juste évaluation des problèmes trouvera facilement les moyens et les informations permettant une approche globale de la pédophilie, des abus sur mineurs et de la diffusion du phénomène. Ainsi verra-t-on que l’Eglise catholique n’est pas la seule touchée, même si ces crimes sont pour elle d’une extrême gravité, et s’ils nécessitent des interventions spécifiques. Ainsi verra-t-on également que ce qu’elle a entrepris peut être utile à d’autres institutions comme plus généralement à toute la société. Les media, surtout ceux des pays où l’Eglise est très présente, semblent ne pas avoir suffisamment approfondi la problématique, se laissant porter trop facilement à la critique. Des documents comme le Rapport national américain sur le mauvais traitement des enfants devraient être mieux connus afin de comprendre les dimensions du problème, où sont les points critiques et les interventions sociales d’urgence. En 2008, 62 000 auteurs d’abus commis sur mineurs ont été identifié aux Etats-Unis, le groupe des prêtres catholique étant tellement réduit qu’il n’a pu être proportionnellement quantifié.

Œuvrer à la protection des enfants et des adolescents constitue une tache immense et continuelle, qui dépasse largement les agissements de membres du clergé. Ceux qui se consacrent à cette mission avec sensibilité, générosité et attention méritent gratitude, respect et encouragement, notamment des autorités ecclésiales et civiles. Leur rôle est essentiel pour le succès et la crédibilité de l’éducation et de la formation au sein de l’Eglise comme en dehors d’elle. Dans sa récente lettre, le Pape a d’ailleurs manifesté son appréciation pour ces fidèles, étendant sa pensée à un horizon dépassant celui de l’Eglise.

Benoît XVI, qui guide l’Eglise dans la voie de la rigueur et de la vérité et mérite le respect et le soutien de tous, reçoit de nombreux témoignages au sein de l’Eglise. Il est le pasteur en mesure d’affronter avec rectitude et sûreté ce moment difficile, par-delà critiques et insinuations sans fondement. On peut affirmer que ce Pape a toujours parlé de la vérité de Dieu et du respect de la vérité, dont il est le témoin suprême. Accompagnons-le en apprenant de lui la constance nécessaire pour grandir en vérité et transparence, pour affronter les drames de ce monde et répondre avec patience à l’avalanche de révélations supposées telles ou pour le moins partielles, dont le but est d’affaiblir sa crédibilité, celle de l’institution ecclésiale, d’autres membres de la hiérarchie. L’Eglise a besoin de cette patience et de son amour de la vérité, tout comme notre société de la communication et de l’expression, qu’elle entend servir sans troubler des personnes ».

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