ROME, Jeudi 11 mars 2010 (ZENIT.org) – Depuis le 3 mars dernier, le P. John Baptist Luo Wen, 39 ans, est retenu en « détention administrative » dans un centre géré par la police de Fu’an, ville de la province côtière du Fujian, annonce aujourd’hui cette dépêche d’ « Eglises d’Asie » (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris.
Il lui est reproché, ainsi qu’à six autres prêtres qui ont été laissés en liberté, d’avoir organisé, sans en demander l’autorisation aux autorités, un camp pour étudiants durant les vacances du Nouvel An chinois.
Dans le diocèse de Mindong, un diocèse dynamique comptant quelque 70 000 fidèles qui, pour la plupart, appartiennent à la partie « clandestine » de l’Eglise catholique, organiser des camps pour la jeunesse durant les vacances scolaires est un moyen privilégié d’enseigner le catéchisme. Pour les étudiants de l’université, des camps sont également montés afin de garder le contact avec eux et les former à la vie chrétienne. Le camp organisé par le P. Luo Wen et six de ses confrères devait durer quatre jours fin janvier-début février et réunir quelque 300 étudiants catholiques. C’est le 3 février, vers la fin du camp, que la police a fait irruption dans l’église de Saiqi, où étaient réunis les jeunes, et ordonné sa fermeture.
« Nous avons décidé de ne pas obtempérer et nous avons informé les étudiants de la situation. Nous avons demandé à ceux qui avaient peur de retourner chez eux et nous avons dit que nous, les prêtres, resterions auprès de ceux qui choisiraient de rester jusqu’à la fin du camp », a expliqué le P. Luo, interrogé par l’agence Ucanews avant son arrestation (1). Une vingtaine de jeunes ont regagné leur domicile et les autres sont restés, souvent encouragés par leurs parents qu’ils avaient joints par téléphone pour demander conseil. Finalement, la police n’a pas fait évacuer les lieux et ce n’est que le lendemain, 4 février, que les prêtres ont été convoqués pour un entretien au poste de police, d’où ils ressortirent libres. L’arrestation du P. Luo n’est donc intervenue qu’un mois après les faits, un délai que les catholiques sur place expliquent par le fait que les policiers ont eu le sentiment de perdre la face le 3 février et ont ensuite pris le temps de préparer leur vengeance.
Dans l’immédiat, le P. Luo peut être maintenu en détention pour un maximum de quinze jours, comme le prévoit la loi en cas de non-obtempération à un ordre visant à maintenir l’ordre public (2). A l’agence Ucanews, le prêtre avait dit qu’il était prêt à affronter la détention « comme témoin de Dieu et successeur des saints martyrs ». Actif dans l’évangélisation auprès des jeunes, notamment via Internet, le P. Luo appartient à cette génération qui n’a pas connu la Chine maoïste et a grandi dans la Chine des réformes, qui ont transformé la société à grande vitesse.
Quant aux six prêtres qui étaient avec le P. Luo durant le camp, trois d’entre eux, les PP. Guo Xijin, Miu Yong et Liu Maochun, ont reçu un ordre de placement en détention qui, pour l’heure, est resté lettre morte. Les trois autres ont reçu une amende de 500 yuans chacun (53 euros), qu’ils refusent de payer. « Ils préfèrent risquer la prison plutôt que de payer cette amende », affirment des sources catholiques locales.
Le diocèse de Mindong compte une soixantaine de prêtres « clandestins » – et une dizaine de prêtres « officiels ». Depuis la mort de Mgr James Xie Shiguang, décédé le 25 août 2005, il est dirigé par Mgr Vincent Huang Shoucheng, 86 ans et évêque « clandestin » (3).
(1) Ucanews, 11 mars 2010.
(2) Cette détention pour un maximum de quinze jours ne doit pas être confondue avec le laojiao ou ‘rééducation par le travail’, qui s’applique à des infractions dont la gravité est insuffisante pour qu’elles soient punies aux termes du Code pénal. La durée des peines de « rééducation par le travail » peut aller d’un an à trois ans, et peut être prolongée d’un an. Elle est fixée arbitrairement par la police, sans inculpation, ni procès et sans le contrôle d’une autorité judiciaire. Il arrive aussi que des citoyens chinois soient enlevés et maintenus au secret, pendant des durées illimitées, dans des dépendances de camps militaires ou dans des centres d’hébergement gérés par la police ou la Sécurité publique.
(3) A propos du diocèse de Mindong, voir EDA 441
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