ROME, Jeudi 21 juin 2007 (ZENIT.org) – « La politique de l’enfant unique et « la culture de l’avortement en Chine » : « Eglises d’Asie », l’agence des Missions étrangères de Paris (EDA 465) publie cette réflexion de Kent Ewing, professeur à la Hong Kong International School. Nous publions ce troisième et dernier volet (cf. Zenit des 19 et 20 juin 2007 pour les deux premiers volets).
A cela, il faudrait ajouter un long article paru le 13 mai dernier dans les colonnes du New York Times. Son auteur y décrit la hausse du taux d’avortement chez les jeunes fem-mes célibataires en Chine. Décrivant en filigrane les consé-quences d’une absence d’éducation sexuelle dans la jeunes-se chinoise, le journaliste Jim Yardley a rassemblé des témoignages tirés de journaux et sites Internet chinois, d’interviews de professionnels de la santé et d’universi-taires spécialises de santé publique, d’études statistiques officielles, pour décrire ce qu’il qualifie de culture alarmante de l’avortement au sein de la jeunesse chinoise, tout spécialement parmi les jeunes femmes.
L’article décrit par le menu un sous-produit embarrassant du matérialisme proéminent qui accompagne l’extra-ordinaire croissance économique de ce pays. En l’absence d’une éducation, même basique, en matière de contracep-tion, une classe sociale urbaine et en pleine essor de jeunes femmes célibataires, aux mœurs sexuelles plus libérées qu’auparavant, recourt massivement à l’avortement pour échapper à la stigmatisation sociale qui continue de peser sur les « filles-mères ». En quittant leurs campagnes pour trouver à s’employer dans les villes, des millions de jeunes femmes ont laissé derrière elles une bonne partie des valeurs traditionnelles qui restent fortes dans le pays.
Les relations sexuelles avant le mariage, autrefois taboues, sont désormais devenues banales dans les grandes villes, de même que le recours à l’avortement pour se débarrasser d’une grossesse non désirée. Et tandis que le gouvernement concentre son action sur la limitation de la période durant laquelle les femmes mariées sont autorisées à procréer, bien peu de choses ont été mises en place pour fournir ne serait-ce qu’une éducation sexuelle minimale à celles qui sont célibataires – une éducation qui pourrait commencer par une information sur les risques pour la fécondité d’un recours à répétition à l’avortement.
A l’heure où des jeunes femmes interrogées par le journa-liste du New York Times ne se souviennent même plus avec précision du nombre d’avortements qu’elles ont subis – six ou sept –, il est grand temps que les responsables de la santé publique commencent à réfléchir au-delà du cadre fixé il y a près de trente ans par le planning familial. Un sondage réalisé à Shanghai indique que 69 % des femmes célibataires sont actives sexuellement et d’autres études montrent qu’entre 20 et 55 % des femmes célibataires vivant dans les villes ont subi au moins un avortement.
Selon l’International Planned Parenthood Association, il y environ sept millions d’avortements par an en Chine. Une estimation fondée sur des statistiques pas toujours très fiables du ministère de la Santé, qui minore sans doute le nombre des avortements pratiqués dans les hôpitaux publics et ne prend pas en compte ceux pratiqués dans les cliniques privés, des établissements qui font ouvertement de la publicité pour cet acte malgré l’interdiction des autorités l’an dernier. De plus, aucune statistique ne comptabilise les femmes qui ont recours à la pilule du lendemain. Au final, il se pourrait que le chiffre réel des avortements en Chine soit deux fois plus élevé que le chiffre officiel.
Les experts de la santé publique estiment qu’en dépit du caractère terrible des avortements forcés tels que ceux qui ont eu lieu au Guangxi, le taux d’avortement parmi les femmes mariées serait plutôt à la baisse en Chine. Mais ce taux est clairement à la hausse chez les jeunes femmes célibataires.
Les dirigeants chinois mettent en avant le fait que la politique de l’enfant unique a permis de contrôler la croissance démographique du pays, évitant ainsi une explosion. Si l’objectif fixé pour 2010 d’une population à 1,36 milliard d’individus peut être tenu, c’est grâce à cette politique, font-ils valoir. De fait, la gestion d’une population de la taille de celle de la Chine n’est pas une tâche aisée, mais on peut penser qu’un programme d’éducation bien pensé aurait permis de parvenir au même résultat en faisant l’économie de « dégâts collatéraux » terrifiants. La politique de l’enfant unique combinée à une préférence traditionnelle pour un descendant mâle a conduit à une ratio de 119 garçons pour 100 filles âgés de moins de 5 ans. Dans certaines régions, le déséquilibre peut grimper à 130 garçons pour 100 filles. Aujourd’hui, les classes moyennes urbaines portent la culture de l’avortement à un autre niveau. Quel que soit le jugement moral que chacun peut porter sur l’avortement, le recours à l’avortement revêt une nouvelle signification dans la Chine d’aujourd’hui.
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Jun 21, 2007 00:00