ROME, Vendredi 26 mai 2006 (ZENIT.org) –
« Communication, communion et coopération »: ces trois piliers pour des médias efficaces aujourd’hui sont proposés par Benoît XVI dans son message pour la Journée mondiale des Communications sociales, dimanche prochain, 28 mai. Le Père Thomas Rosica, c.s.b. président, de la télévision catholique canadienne « Sel et Lumière » revient sur l’enseignement de Benoît XVI et de Jean-Paul II en la matière.
Zenit : Selon vous, Père Rosica quel est le « point » fort du message du pape pour la Journée 2006 des moyens de communication sociales ?
P. Thomas Rosica : Dans son premier message pour la Journée mondiale des communications sociales qui aura lieu le 28 mai, le pape Benoît XVI espère que les communications ne deviennent pas, paradoxalement, un moyen de « manque » de communication.
Zenit : Pourquoi cette image négative des médias ?
P. Thomas Rosica : Dans ce message qui a pour thème « Les médias: réseaux de communication, de communion et de coopération », Benoît XVI écrit: « Quotidiennement notre expérience nous rappelle que la relation directe de la communication n’édifie pas nécessairement la coopération et la communion dans la société. »
Zenit : En quoi ce serait incompatible ?
P. Thomas Rosica : Pour le pape, « certaines tendances dans les médias font naître un genre de monoculture qui réduit le génie créatif, restreint la subtilité d’une pensée complexe et sous-estime le spécificité des pratiques culturelles et de la particularité des croyances religieuses. » « Ce sont des distorsions qui se produisent quand l’industrie médiatique devient un organe d’auto-promotion ou uniquement inspirée au profit, au point de perdre le sens de la responsabilité au bien commun » ajoute-t-il.
Zenit : Sur quels points plus spécifiques porte le diagnostic du pape.
P. Thomas Rosica : Le pape interroge: «Nos coeurs ne se désolent-ils pas, plus spécialement, quand nos jeunes sont soumis à d’avilissantes ou fausses expressions d’amour qui ridiculisent la dignité donnée par Dieu à chaque personne humaine et sape les intérêts de la famille?» Sous cet angle, le message du pape devient un examen de conscience sur la façon dont les médias adresse la vie conjugale et familiale qui est «d’importance particulière, précisément parce qu’elle concerne les fondements de chaque culture et société».
Zenit : Mais après le diagnostic, le pape propose des remèdes…
P. Thomas Rosica : Pour promouvoir une présence constructive et une perception positive des médias dans notre société, Benoît XVI présente trois propositions : «la formation, la participation et le dialogue.» Rappelant la dernière lettre apostolique du pape Jean-Paul II, « Le progrès rapide », diffusée seulement quelques semaines avant la phase terminale de sa maladie et sa mort l’an dernier, Benoît XVI déclare que «la formation à l’usage responsable et critique des médias aide les personnes à les utiliser intelligemment et de manière appropriée. »
Zenit : Mais derrière les media, il y a surtout un « marché », c’est-à-dire des produits à vendre et des consommateurs !
P. Thomas Rosica : Benoît XVI poursuit en effet son analyse en mentionnant que «la participation aux mass media résulte de leur nature comme bien destiné à tous. Comme service public, la communication sociale exige un esprit de coopération et une co-responsabilité empreinte d’une prise en considération vigoureuse de l’usage des ressources publiques et de la performance de rôles de la confiance publique, y compris le recours à des critères régulateurs et à d’autres mesures ou structures conçus pour atteindre cet objectif. »
Zenit : Pour le pape, à quelle condition, l’influence des media est positive ?
P. Thomas Rosica : Finalement, le pape écrit que «la promotion du dialogue par les échanges d’enseignement, par l’expression de la solidarité et l’instauration de la paix présente une grande chance pour les mass media, qu’il faut reconnaître et exercer. De cette manière ils deviennent des ressources influentes et a appréciées pour construire la civilisation d’amour à laquelle tous les peuples aspirent.»
Zenit : Mais, pour reprendre un terme conciliaire il n’y a pas que la communication « ad extra », mais aussi « ad intra » qu’il faut peut-être examiner…
P. Thomas Rosica : La communication à l’intérieur de l’Église et entre l’Église et le monde demande une ouverture et une nouvelle approche devant les questions entourant le monde des médias. Cette communication doit mener à un dialogue constructif de façon à promouvoir une opinion publique bien informée au sein même de la communauté chrétienne.
Zenit : On entend souvent dans les homélies critiquer les média: quel effet a cette critique ?
P. Thomas Rosica : Il y a beaucoup de travail à faire pour bien informer et ce, autant de la part des médias que de l’Église. Les barrières et les hostilités qui existent entre eux doivent être surmontées. Il ne sert à rien pour leaders de l’Église de dénigrer les personnes engagées dans les médias, de leur tourner le dos en refusant, par exemple, de répondre à ces appels toujours «urgents» de tel journaliste, tel producteur ou éditeur. C’est la nature de la bête. Ce n’est pas sans raison qu’on parle de nouvelles de dernière heure!
Zenit : Mais, on l’a vu à propos du Da Vinci Code, il est aussi difficile d’entendre dans les médias des choses positives sur l’Eglise…
P. Thomas Rosica : Pourtant, il n’est pas non plus dans l’intérêt des médias d’ignorer et de marginaliser l’Église et les religions comme étant quelque chose de banal, d’insignifiant ne méritant aucune sérieuse réflexion. Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres et nous devons travailler ensemble afin de servir la vérité et la décence dans un monde qui devient de plus en plus exempt de valeurs, de vertus et de sens.
Zenit : Il faut davantage de « professionnels » des médias dans l’Eglise ?
P. Thomas Rosica : Interagir avec les médias aujourd’hui n’est pas seulement l’affaire du personnel des communications travaillant pour l’Église – certains connaissent le milieu et l’importance d’être proactif pendant que d’autres, pensant qu’ils sont des experts, connaissent très peu le milieu et demeurent toujours dans une attitude de peur, défensive, tel un grand inquisiteur!
Zenit : Jean-Paul II a été salué comme un grand communicateur: quel enseignement retenir de son magistère dans ce domaine ?
P. Thomas Rosica : Tout au long de ses quelques 27 années de pontificat, Jean Paul II nous a enseigné que la communication est le pouvoir. Il nous a dit d’utiliser cette ce pouvoir avec sagesse. Jean Paul II communiquait à travers ses actions à la fois spontanées et symboliques, parfois même plus éloquentes que quelques uns de ses discours, ses homélies et ses encycliques, spécialement lors de ses derniers moments sur la scène mondiale. Toutes ces actions représentaient souvent de puissants symboles.
Zenit : Vous pouvez préciser…
P. Thomas Rosica : Le mot symbole provient du mot grec: symbolein, qui signifie rassembler, contrairement au mot grec : diabolein, qui signifie briser, séparer, origine du mot diabolique. Les actions symboliques aident à rassembler les gens dans l’amour et la paix. Jusqu’au jour de sa mort, et même après, Jean Paul II rassemblait les gens dans l’amour et la paix. La communication était alors au service de la vérité.
Zenit : S’il y avai
t un seul mot à retenir de l’enseignement de Jean-Paul II sur els relations avec les médias, quel serait-il, selon vous ?
P. Thomas Rosica : Jean Paul II a débuté son service au monde entier sur ces mots, qui deviendront par la suite le refrain de son ministère à la suite de Pierre: «N’ayez pas peur!» Si nous tous, médias et membres de l’Église, prenions ces mots à coeur, pensez à toutes les barrières qui pourraient tomber! Imaginez les ponts qui pourraient être construits! Pensez à la merveilleuse communication, communion et coopération dont nous pourrions tous bénéficier si nous travaillions ensemble à servir la vérité et redonner espoir à l’humanité!