ROME, Vendredi 20 janvier 2006 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile de ce dimanche, proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.
Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle !
Evangile de Jésus Christ selon saint Marc 1,14-20.
Après l’arrestation de Jean Baptiste, Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait :
« Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. »
Passant au bord du lac de Galilée, il vit Simon et son frère André en train de jeter leurs filets : c’étaient des pêcheurs.
Jésus leur dit : « Venez derrière moi. Je ferai de vous des pêcheurs d’hommes. »
Aussitôt, laissant là leurs filets, ils le suivirent.
Un peu plus loin, Jésus vit Jacques, fils de Zébédée, et son frère Jean, qui étaient aussi dans leur barque et préparaient leurs filets.
Jésus les appela aussitôt. Alors, laissant dans la barque leur père avec ses ouvriers, ils partirent derrière lui.
© AELF
« Après l’arrestation de Jean-Baptiste, Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait : «Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle» »(Mc 1, 14). Nous devons nous débarrasser tout de suite de deux préjugés. Premièrement, la conversion ne concerne pas seulement les non croyants, ou ceux qui se disent « laïcs » ; nous avons tous indifféremment besoin de nous convertir ; deuxièmement, la conversion, comprise dans le sens authentiquement évangélique, n’est pas synonyme de renoncement, effort et tristesse, mais de liberté et de joie ; il ne s’agit pas d’un état régressif mais progressif.
Avant la venue de Jésus, se convertir signifiait toujours « revenir en arrière » (le terme hébreu shub signifie faire demi-tour, revenir sur ses pas). Il indiquait l’acte de celui qui, à un moment de sa vie, se rend compte de s’être « trompé de route » ; il s’arrête, se ravise ; décide de changer de comportement, de recommencer à observer la loi et d’entrer à nouveau dans l’alliance avec Dieu. Il fait un vrai demi-tour, une « conversion en U ». Dans ce sens, la conversion a une signification morale ; elle consiste à changer de coutumes, à réformer sa vie.
Dans la bouche de Jésus cette signification change. Se convertir ne signifie plus revenir en arrière, à l’ancienne alliance et au respect de la loi mais plutôt faire un bond en avant et entrer dans le Royaume, saisir le salut qui est venu aux hommes gratuitement, à travers l’initiative libre et souveraine de Dieu.
La conversion et le salut ont interverti leurs places. Il n’y a plus, d’abord, la conversion de la part de l’homme et ensuite le salut, comme récompense de la part de Dieu ; mais d’abord le salut, comme offre généreuse et gratuite de Dieu, puis la conversion comme réponse de l’homme. C’est en cela que consiste la « Bonne Nouvelle », le caractère joyeux de la conversion évangélique. Dieu n’attend pas que l’homme fasse le premier pas, qu’il change de vie, qu’il fasse de bonnes œuvres, comme si le salut était une récompense due à ses efforts. Non, il y a d’abord la grâce, l’initiative de Dieu. En cela, le christianisme se distingue de toute autre religion : elle ne commence pas par prêcher le devoir mais le don ; elle ne commence pas par la loi mais par la grâce.
« Convertissez-vous et croyez » : cette phrase ne signifie donc pas deux choses différentes et successives mais une même action fondamentale : convertissez-vous, c’est-à-dire croyez ! Convertissez-vous en croyant ! La foi est la porte par laquelle on entre dans le Royaume. Si on nous avait dit : la porte est l’innocence, la porte est l’observation rigoureuse de tous les commandements, la porte est la patience, la pureté, on pourrait dire : ce n’est pas pour moi ; je ne suis pas innocent, je n’ai pas telle ou telle autre vertu. Mais il nous est dit : la porte est la foi. Toute personne peut croire car Dieu nous a créés libres et intelligents, précisément pour nous permettre d’accomplir l’acte de foi en lui. La foi a différentes faces : il y a la foi-consentement de l’intelligence, la foi-confiance. Dans notre cas il s’agit d’une foi-appropriation. D’un acte par lequel on s’approprie une chose, presque de façon tyrannique. Saint Bernard utilise même le terme usurper : « Moi, ce qui me manque je l’usurpe du côté du Christ ! ».
« Se convertir et croire » signifie véritablement faire une sorte d’assaut. De cette manière, avant encore d’avoir peiné et acquis des mérites, nous obtenons le salut, nous prenons même possession d’un « royaume ». Mais c’est Dieu lui-même qui nous invite à le faire ; il aime subir ces assauts, et il est le premier à s’étonner que « si peu de personnes le fassent ».
L’expression « Convertissez-vous ! » n’est pas, comme elle le semble à première vue, une menace, une chose qui rend triste et oblige à avancer la tête basse, et par conséquent une chose à retarder le plus possible. Au contraire, c’est une offre incroyable, une invitation à la liberté et à la joie. C’est la « bonne nouvelle » de Jésus aux hommes de tous les temps.