Messieurs les Cardinaux,
Vénérables frères dans l’Episcopat et le Sacerdoce,
Chers Frères et Sœurs dans le Seigneur,
Je rends grâce à Dieu qui, au début de mon ministère de Successeur de Pierre, m’accorde de m’arrêter pour prier auprès du tombeau de l’apôtre Paul. C’est pour moi un pèlerinage très désiré, un geste de foi, que j’accomplis en mon nom propre, mais aussi au nom du bien-aimé diocèse de Rome, dont le Seigneur m’a constitué Evêque et Pasteur, et de l’Eglise universelle confiée à mon soin pastoral. Un pèlerinage, pour ainsi dire, aux racines de la mission, de cette mission que le Christ ressuscité a confiée à Pierre, aux Apôtres et, de façon singulière, aussi à Paul, en le poussant à annoncer l’Evangile aux nations, jusqu’à arriver en cette ville, où, après avoir longtemps prêché le Royaume de Dieu (Actes des Apôtres 28,31), il a rendu par le sang l’extrême témoignage à son Seigneur, qui l’avait « conquis » (Philippiens 3,12) et envoyé.
Avant même que la Providence le conduise à Rome, l’Apôtre avait écrit aux chrétiens de cette cité, capitale de l’empire, sa lettre la plus importante du point de vue doctrinal. Son commencement vient d’être lu, un dense préambule où l’Apôtre salue la communauté de Rome en se présentant comme « le serviteur du Christ Jésus, apôtre par vocation » (Romains 1,1). Et plus loin, il ajoute: « Par Lui [le Christ], nous avons reçu la grâce de l’apostolat pour obtenir l’obéissance de la foi de la part de toutes les nations » (Romains 1,5).
Chers amis, en tant que Successeur de Pierre, je suis ici pour raviver dans la foi cette « grâce de l’apostolat », parce que Dieu, selon une autre expression de l’Apôtre des nations, m’a confié « la sollicitude de toutes les Eglises » (2 Corinthiens 11,28). L’exemple de mon bien aimé et vénéré prédécesseur Jean-paul II, un pape missionnaire, est devant nous: son activité si intense, dont témoignent plus de cent voyages apostolique au-delà des frontières de l’Italie, est vraiment inimitable. Qu’est-ce qui le poussait à un tel dynamisme sinon le même amour du Christ qui a transformé l’existence de saint Paul (cf. 2 Corinthiens 5,14)? Daigne le Seigneur nourrir aussi en moi un tel amour, afin que je n’aie pas de paix devant l’urgence de l’annonce évangélique dans le monde d’aujourd’hui. L’Eglise est par nature missionnaire, sa tâche première est l’évangélisation. Le concile Vatican II a consacré à l’activité missionnaire le décret appelé justement « Ad Gentes », qui rappelle comment « les apôtres … suivant l’exemple du Christ, « ont prêché la parole de la vérité et ont engendré les Eglises » (S. Augustin, Commentaire du psaume 44,23: PL 36,508) » et que « c’est la tâche de leurs successeurs de d’assurer la continuité de cette œuvre, afin que « la parole de Dieu courre et soit glorifiée » (2 Thessaloniciens 3,1) et que le Royaume de Dieu soit annoncé et stable sur toute la terre » (n. 1).
Au début du troisième millénaire, l’Eglise sent avec une vivacité renouvelée que le mandat missionnaire du Christ est plus que jamais actuel. Le Grand Jubilé de l’An 2000 l’a conduite à « repartir du Christ », contemplé dans la prière, afin que la lumière de sa vérité soit irradiée par tous les hommes, avant tout par le témoignage de la sainteté. J’ai à cœur de rappeler la devise que saint Benoît a placée dans sa Règle, en exhortant ses moines à « ne rien préférer absolument à l’amour du Christ » (ch. 4). En effet, la vocation sur le chemin de Damas a conduit Paul à cela justement: à faire du Christ le centre de sa vie, en laissant tout pour la sublime connaissance de Lui et de son mystère d’amour, et en s’engageant ensuite à l’annoncer à tous, spécialement aux païens, « à la gloire de son nom » (Romains, 1,5). Sa passion pour le Christ l’a conduit à prêcher l’Evangile non seulement par la parole mais par sa propre vie, toujours plus en conformité avec son Seigneur. A la fin, Paul a annoncé le Christ par le martyre, et son sang, uni à celui de Pierre, et de tant d’autres témoins de l’Evangile, qui a irrigué cette terre et rendu féconde l’Eglise de Rome, qui préside à la communion universelle de la charité (cf. s. Ignace d’Antioche, Aux Romains, Inscr.: Funk, I, 252).
Le XXe siècle a été un temps de martyre. Le pape Jean-Paul II l’a fortement mis en relief, en demandant à l’Eglise de « mettre à jour le martyrologe », et a canonisé et béatifié de nombreux martyrs de l’histoire récente. Si donc le sang des martyrs est semence de nouveaux chrétiens, au début du IIIe millénaire, il est licite de s’attendre à une nouvelle floraison de l’Eglise, spécialement là où elle a davantage souffert pour la foi et pour le témoignage de l’Evangile.
Nous confions ce souhait à l’intercession de saint Paul. Qu’il daigne obtenir pour l’Eglise de Rome, en particulier pour son évêque, et pour tout le Peuple de Dieu, la joie d’annoncer et de témoigner à tous la Bonne Nouvelle du Christ Sauveur.
[Traduction de l’original italien réalisée par Zenit]