Dernière volonté de Jean-Paul II: la mise en œuvre de Vatican II

CITE DU VATICAN, Jeudi 7 avril 2005 (ZENIT.org) – La dernière volonté du pape Jean-Paul II est la mise en œuvre de Vatican II, comme il le demande dans son testament spirituel.

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« Totus Tuus ego sum »: c’est ainsi, par sa devise, que le pape commence son testament, le 6 mars 1979. Il ajoute: « Au nom de la Très Sainte trinité. Amen ».

Le testament de Jean-Paul II qui contient quelque 15 pages manuscrites, et 5 pages dactylographiées, a en effet été lu lors de la quatrième congrégation des cardinaux mercredi matin, en italien d’après l’original en polonais, et publié en italien par la salle de presse du Saint-Siège jeudi.

Ce n’est pas « un » testament en un seul jet, mais différentes réflexions ajoutées lors de six retraites de carême prêchées au Vatican. La première, en mars 1979, première retraite de Karol Wojtyla comme pape, et la dernière, la partie la plus longue, en l’an 2000, au cœur du Jubilé, où le pape dit son « Nunc dimittis ».

Quelles sont ses dernières volontés ? Dans le 4e paragraphe de ce testament spirituel de l’an 2000, Jean-Paul II remercie l’Esprit saint pour le don du concile Vatican II qu’il a suivi, rappelle-t-il, du début – donc sous Jean XXIII – à la fin, sous Paul VI. Lui, l’Eglise, l’épiscopat ont là une dette, explique Jean-Paul II. Avec quelque solennité, il déclare: « je suis convaincu que pendant longtemps encore, il sera donné aux nouvelles générations de puiser aux richesses que ce concile du XXe siècle nous a offertes ».

« Je désire confier ce grand patrimoine à tous ceux qui sont et seront à l’avenir appelés à le mettre en œuvre », déclare le pape.

Ce dont Karol Wojtyla dit avoir fait particulièrement l’expérience pendant le concile, c’est de la « communion fraternelle de l’épiscopat » de toute l’Eglise, comme, dit-il, il avait, à Cracovie, fait l’expérience de la « communion fraternelle du presbyterium ».

Dans l’avant dernier paragraphe de ce testament du jubilé, le pape ouvre encore davantage l’horizon en évoquant la collaboration « bienveillante » et « féconde », avec les cardinaux, les archevêques et évêques, les prêtres, les personnes consacrées, les laïcs.

Il souligne en particulier les rencontres avec les évêques lors des visites ad limina. Et puis ses rencontres avec des « frères » d’autres confessions chrétiennes, avec le Rabbin de Rome, des représentants de religions non chrétiennes, des mondes « de la culture, de la science, de la politique, des moyens de communications sociales ».

Les premiers feuillets
Mais revenons aux premiers feuillets du testament de Jean-Paul II. Le 6 mars 1979, Jean-Paul II donne les consignes les plus concrètes : il vient de relire le testament de Paul VI et demande comme lui à être inhumé dans la terre, et que ses notes personnelles soient brûlées. Il confie cela à son secrétaire particulier qui l’a suivi depuis 40 ans, depuis Cracovie, et qu’il a lui-même ordonné évêque, Mgr Stanislas Dziwisz.

Le pape est pauvre. Ses effets personnels nécessaires au quotidien, qu’on en dispose comme ce sera opportun, sinon, dit-il, il ne possède rien : même les royalties de ses livres, le pape donnait tout. Les remerciements, il tient à les faire à Don Stanislas.

D’autres personnes sont citées avec admiration: Paul VI et le cardinal Wyszynski. Une autre personne est citée avec gratitude, en 2000, le Grand rabbin de Rome, mais sous son titre de grand rabbin : c’est lui qui l’a accueilli en 1986 à la grande synagogue de Rome. Il s’agit du Grand rabbin émérite, Elio Toaff.

Dès le testament de 1979, le pape remercie chacun, et demande « pardon » à tous. Ce premier texte commence par cette citation de Saint Mattieu : « Veillez, car vous ne savez pas le jour où votre Seigneur viendra ».

Il ajoute à ce premier jet, en 1990, cette notation: « après la mort, je demande saintes messes et prières ».

Dans un feuillet sans date, il exprime sa confiance qu’en dépit de sa « faiblesse » le Seigneur lui accordera les grâces nécessaies pour qu’il « affronte selon sa volonté toutes les tâches qui lui seront confiées, les épreuves et les souffrances ».

Prêt à se présenter devant le Seigneur
En 1980, au cours de la retraite prêchée par Mgr Lucas Moreira Neves, brésilien, secrétaire de la Congrégation pour les Evêques, et plus tard cardinal, aujourd’hui défunt, il relit le testament de 1979, et celui de Paul VI, et il reconnaît le caractère « provisoire » de ce testament.

Mais son message spirituel est alors le suivant: « Aujourd’hui, je désire ajouter que chacun doit avoir présent à (l’esprit) la perspective de la mort. Et doit être prêt à se présenter devant le Seigneur et le Juge – et contemporainement Rédempteur et Père. Alors moi aussi je prends cela continuellement en considération, en confiant ce moment décisif à la Mère du Christ et de l’Eglise – à la Mère de mon espérance ».

Cette année-là il évoque les persécutions dont l’Eglise est victime dans certains pays: « une période de persécution telle qu’elle n’est pas moindre que celle des premiers siècles, elle est même plus grande, par le degré de cruauté et de haine. Sanguis martyrum – semen christianorum ».

Il redit alors son « Totus Tuus » à Dieu, « dans la vie et dans la mort », « par l’Immaculée ». « J’accepte déjà cette mort, écrit Jean-Paul II, j’espère que le Christ me donnera la grâce pour le passage ultime, c’est-à-dire ma Pâque. J’espère aussi qu’il la rendera utile pour cette grande cause que je cherche à servir: le salut des hommes, la sauvegarde de la famille humaine, et en elle de toutes les nations et de tous les peuples (il cite sa « patrie terrestre ») (…) ».

Après l’attentat
Après l’attentat, lors de la retraite de mars 1982, prêchée par le jésuite français Stanislas Lyonnet, professeur à la Grégorienne, il relit le testament de 1979, le considère toujours comme provisoire. Il ajoute seulement: « L’attentat à ma vie, le 13.5.1981, a confirmé d’une certaine façon l’exactitude des paroles écrites dans la période des Exercices spirituels de 1980 ».

Un moment, pendant cette retraite, le pape hésite sur le lieu de sa sépulture, songe à être enterré en Pologne. Il demande à ce que le collège cardinalice écoute éventuellement les demandes de l’archevêque métropolitain de Cracovie et du conseil général de l’Episcopat polonais. En 1985, il « clarifie » en écrivant que le collège cardinalice n’a aucune « obligation » d’interpeller ses « co-nationaux » à ce sujet. Il peut le faire s’il l’estime « juste ».

A ce sujet, le cardinal Jacques Martin raconte que le pape sollicite un jour son avis à ce sujet. Le cardinal répond en substance: Ce serait une très grande joie pour la Pologne mais une tristesse pour tout le reste de la chrétienté.

Le testament du Jubilé
Les deux dernières pages sont écrites entre le 12 et le 18 mars 2000, pendant la retraite prêchée par le défunt cardinal François-Xavier Ngyên van Thuan, qui n’était pas encore cardinal mais déjà président du Conseil pontifical Justice et Paix. Une retraite dont le texte a été publié en français et a obtenu un grand succès.

Tout d’abord, le pape évoque la tâche de « faire entrer l’Eglise dans le IIIe millénaire » selon les paroles du cardinal Stefan Wyszynski, le 16 octobre 1978. Il souligne que ces paroles venaient de « l’Homme qui est passé à l’histoire comme le Primat du millénaire. Un grand Primat ».

Il ajoute: « J’ai été témoin de sa mission, de son offrande totale. De ses luttes: de sa victoire ». Il souligne que le primat « du millénaire » avait l’habitude de répéter: « Lorsque la victoire viendra, ce sera par Marie ». Une allusion à la fin de l’oppression communiste en Pologne et dans le bloc soviétique.

Il a vu s’accomplir ces paroles sur son pontificat. « Au moment où j’éc
ris ces paroles, l’Année jubilaire de l’An 2000 est déjà une réalité en acte ». Il évoque l’ouverture des portes saintes des quatre basiliques patriarcales, depuis celle de Saint-Pierre, « la nuit du 24 décembre 1999 » et celle de Saint-Paul hors les Murs, le 18 janvier 2000, pour l’ouverture de la Semaine de prière pour l’Unité des chrétiens. Le pape souligne le caractère « œcuménique » de cette ouverture particulièrement « imprimée » dans sa « mémoire »: il était entouré à sa gauche, par le métropolite orthodoxe Athanasios, et à sa droite, par le Président de la communion anglicane, l’archevêque de Cantorbéry, Georges Carey.

Nunc Dimittis
Le pape dit ensuite qu’au seuil de ses quatre-vingt ans, il disait au Seigneur comme le Vieillard Siméon de l’Evangile de Luc: « Nunc Dimittis »: « Maintenant, Seigneur, tu peux laisser s’en aller ton serviteur en paix selon ta parole ». De quoi faire taire le bruit de toute idée de démission!

Le pape revient alors sur l’attentat de 1981. « La divine Providence, écrit-il, m’a sauvé de la mort de façon miraculeuse. Celui qui seul est le Seigneur de la vie et de la mort a lui-même prolongé cette vie, d’une certaine façon, il me l’a donnée de nouveau. Depuis ce moment là elle lui appartient encore davantage ».

« J’espère, précise le pape, qu’il m’aidera à reconnaître jusqu’à quand je dois continuer ce service auquel il m’a appelé le jour du 16 octobre 1978. Je lui demande de bien vouloir me rappeler à lui quand il le voudra (…). J’espère aussi que tant qu’il me sera donné d’accomplir le service pétrinien dans l’Eglise, la Miséricorde de Dieu voudra m’accorder les forces nécessaires à ce service ».

La fin de la Guerre froide
Cette année-là encore, dans ce testament qui ressemble à un journal spirituel, Jean-Paul II indique qu’il a relu le testament de 1979. Il constate que cette année-là et les suivantes ses annotations « reflètent » les tensions auquel le monde était soumis, et il remercie la « Providence divine » que la « guerre froide » se soit achevée sans le « violent conflit nucléaire » dont le « danger pesait sur le monde ».

Enfin, voici les dernières phrases, touchantes et fortes, du testament de Jean-Paul II, qui, à quatre vingt ans, se souvient des siens et de Wadowice « cette ville de ma jeunesse », écrit-il: « A mesure qu’avance la limite de ma vie terrestre je retourne par la pensée au début, à mes parents, à mon frère et ma sœur (que je n’ai pas connue car elle est morte avant ma naissance), à la paroisse de Wadowice, où j’ai été baptisé, à cette ville de ma jeunesse, à mes concitoyens, à mes camarades, garçons et filles, de l’école élémentaire, du lycée, de l’université, jusqu’à la période de l’occupation, lorsque je travaillai comme ouvrier, et ensuite à la paroisse de Niegowić, à la paroisse de S. Floriano à Cracovie, à la pastorale des universitaires, dans le milieu… dans tous les milieux… à Cracovie et à Rome… aux personnes qui m’ont été confiées de façon spéciale par le Seigneur. A tous, je voudrais dire une seule chose : « Que Dieu vous récompense ».

Ses derniers mots sont ceux du Christ qui meurt en croix : « In manus Tuas, Domine, commendo spiritum meum ».

Il date de l’Année du Seigneur 2000, le 17 mars.

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ZENIT Staff

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