CITE DU VATICAN, Lundi 4 avril 2005 (ZENIT.org) – Les fidèles ont commencé à venir rendre hommage à Jean-Paul II sur la place Saint-Pierre, sur son passage et dans la basilique vaticane, dès 18 heures.
Du palais apostolique à la basilique vaticane
La translation du défunt pape a en effet eu lieu entre 17 et 18 heures entre la salle Clémentine du Palais apostolique du Vatican, au deuxième étage – la « seconda loggia » – : une salle qui porte le nom du pape Clément VIII et dont les fresques représentent la vertu de « religion » – et la basilique vaticane.
Depuis dimanche, les personnalités religieuses et politiques, le personnel du Vatican et les religieux du diocèse, ont pu venir rendre hommage en cette salle au pape défunt, ainsi que les journalistes accrédités au Saint-Siège.
Cette translation représente, dans la vaste liturgie des funérailles d’un pape, qui se déploie sur plusieurs jours, la « seconde station », la première étant celle qui a conduit le pape de ses appartements à la salle Clémentine (cf. ci-dessous, première station).
« Le Dieu plein de tendresse de qui vient tout réconfort »
Après l’antienne « Ego sum », reprenant les paroles du Christ : « Je suis la résurrection et la vie », le cardinal Eduardo Martinez Somalo, Camerlingue, a prononcé cette bénédiction inspirée de la seconde épître de saint Paul aux Corinthiens : « Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père plein de tendresse, le Dieu de qui vient tout réconfort, lui qui nous réconforte dans toutes nos détresses (2 Co 1, 3-4) ».
Puis il a ainsi salué ceux qui participaient au rite : « Que l’espérance du Christ, qui est ressuscité d’entre les morts, soit avec vous tous ».
Le pape Jean-Paul II gisait, le visage amaigri et serein, le chef soulevé par trois coussins de velours, revêtu, sur son aube blanche, de la chasuble liturgique de velours rouge, de ses souliers rouges d’apôtre infatigable, du pallium de laine blanche, qui dit la sollicitude du bon pasteur pour ses brebis, la crosse pastorale à son bras gauche.
Le cardinal, en chape rouge et or, a ensuite procédé à l’aspersion rituelle d’eau bénite, qui rappelle aux fidèles le don du baptême et la purification.
Tandis qu’il accomplissait le rite en passant autour du corps de Jean-Paul II, le chœur a entonné l’antienne latine « Ingrediar » – « J’entrerai dans la demeure admirable, dans la maison de mon Dieu » – qui évoque le « splendide cortège » qui conduit à la « maison de Dieu ».
Le cardinal a évoqué ensuite la « grande émotion unanime » avec laquelle le cortège s’apprête à « accompagner la dépouille de Jean-Paul II » en la basilique vaticane « où il a exercé son ministère d’évêque de Rome et de pasteur de l’Eglise universelle ».
« Marcher avec ardeur sur ses traces »
Au moment de « quitter cette maison », le cardinal invite à « rendre grâce pour les dons » que Dieu a accordés à son peuple « par son serviteur ». Il invoquait le réconfort de « la famille pontificale », du « peuple saint de Rome » et de « tous les fidèles dans le monde ».
Après un temps de silence, le Camerlingue a dit cette oraison: « Regarde avec bonté, Seigneur, la vie et les œuvres de ton serviteur, notre Pape Jean-Paul ; reçois-le dans la demeure de la lumière et de la paix sans fin, et accorde à tes fidèles de marcher avec ardeur sur ses traces en témoins de l’Evangile du Christ ».
C’est alors que le diacre, en dalmatique or et rouge, a invité les participants à initier la procession, qui s’est déroulée au chant de psaumes et de cantiques avec leurs antiennes. Le Ps 22 « le Seigneur est mon berger, je ne manque de rien ».
La procession des cardinaux diacres, prêtres et évêques précédait ainsi le souverain pontife, porté par douze « sédiaires », entouré de ses gardes suisses.
« Jean-Paul II le Grand »
Quittant la Salle Clémentine, et la « deuxième loggia », le cortège a descendu la « Scala nobile », noble escalier où le marbre de Sienne jaune adoucit l’austère procession par sa douce lumière couleur rayons de miel.
Elle est passée sous les vitraux des deux grands papes Léon le Grand et Grégoire le Grand. C’est Jean-Paul II « le Grand » qui passe, selon le nom que lui a donné déjà le cardinal secrétaire d’Etat Angelo Sodano, dimanche, lors de la messe de la miséricorde. Il avait déjà donné ce nom à Jean-Paul II dans une interview. « Jean-Paul II le Grand » : c’est d’ailleurs le titre qui barrait lundi la une du quotidien catholique italien « Avvenire ».
Les dix « sédiaires » avaient la charge de porter le pape comme pour un triomphe muet et grave, lui qui jamais n’avait voulu faire usage de la « sedia gestatoria » même pour que les fidèles puissent mieux le voir. Six Gardes suisses l’escortaient.
Ses secrétaires, et les trois religieuses polonaises l’accompagnaient : c’est la famille pontificale en deuil.
Le pèlerinage psalmodié s’est prolongé et a accompagné la lente marche des cardinaux: « Lave-moi de mes fautes, de mon péché, purifie-moi » : la schola chante le Ps 50, puis le Ps 62 – « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube »; le Ps 129 – « Des profondeurs je crie vers toi, Seigneur » ; et les cantiques des Evangiles, le « Benedictus » que l’Eglise chante tous les matins « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël; le « Magnificat », qu’elle chante le soir aux vêpres, – « Mon âme exalte le Seigneur » ; et le « Nunc dimittis », que l’Eglise chante le soir à Complies – « Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix » .
Le cortège est descendu jusqu’à la cour Saint-Damase. Puis dans la sale « ducale », la salle « royale » et l’escalier du même nom, jusqu’au « Portail de bronze ».
Au moment où le pape allait arriver place Saint-Pierre, la liturgie s’est tournée vers les saints, avec les « litanies » : après avoir invoqué le Christ et Marie, « Salut du Peuple romain », les saints anges et saint Joseph, et saint Jean-Baptiste, les patriarches et les prophètes, les apôtres Pierre et Paul, André, invoquaient aussi les saints papes Callixte, Corneille, Sixte, Jean, Martin, Damase, Léon le Grand, Pie X, et les« saints proto-martyrs romains ».
De jour et de nuit, l’hommage
Vers 17 h 25 au moment où le cortège débouchait sur la place, la cloche de Saint Pierre a salué le passage du pontife. Et au moment où il a atteint le parvis de la basilique, les « sédiaires » se sont retournés pour présenter le pape à l’hommage des fidèles. Un moment grave, émouvant et recueilli. Le pape semblait bénir une nouvelle fois son peuple.
Puis le cortège a franchi le narthex et le seuil de la basilique en invoquant le Christ dans les mystères de sa vie, de sa Passion, de sa mort et de sa Résurrection, de sa gloire : « Aie pitié de lui », répond le chœur : « Miserere ei ».
Il supplie encore : « Nous t’en prions, exauce nous » et passe devant la fameuse statue de saint Pierre, pour arrêter ses pas au pied de l’autel de la « confession de Pierre », près des 99 lampes, où le « gisant » pontifical attend l’hommage des fidèles, tous les jours et toutes les nuits, sauf de 2 h à 5 heures, pour la maintenance nécessaire à la basilique.
Le cierge pascal, symbole du Christ, lumière du monde, brûle auprès du pape, qui, « mort, parle encore ».
Le corps du pape a été déposé face au peuple, comme lorsqu’il présidait les célébrations depuis l’estrade de l’autel sous le baldaquin du Bernin. Le Camerlingue l’a aspergé et encensé pendant qu’on chantait le répons « Subvenite » – « Venez, saints du ciel ».
Puis le diacre a lu en latin l’Evangile de
saint Jean où le Christ demande au Père que là « où il est soient aussi ses serviteurs ».
Dans la prière universelle, on a prié pour le pape, pour l’Eglise, pour tous les peuples – « pour qu’en observant la justice, ils constituent une seule famille, établie dans la paix et liée d’un amour fraternel »; pour toute l’assemblée : « Puissions-nous être rassemblés dans le royaume des cieux »
Le « bonheur des élus »
Le cardinal Somalo, submergé par l’émotion, semblait avoir de la peine à articuler cette prière si familière au chrétien. Mais il a conclu : « Exauce-nous, Dieu notre Sauveur, exauce notre supplication unie à celle de tous les saints pour l’âme de ton serviteur, notre pape Jean-Paul, il a compté sur la prière de l’Eglise, fais-lui partager le bonheur de tes élus ».
Puis en procession, les cardinaux et les évêques présents sont venus s’incliner devant la dépouille du pontife défunt.
Après la célébration, les fidèles ont pu accéder près du corps du pape pour lui rendre hommage et prier pour lui. La prière continue se poursuivra jusqu’au moment des obsèques, sous différentes formes: Liturgie de la Parole, Liturgie des Heures, Messe, Rosaire. Les fidèles ont continué à s’approcher du pape toute la soirée, au son paisible et théologal de l’orgue.