Selon l’édition datée du 19 octobre dernier du Quotidien de Shanghai, le Bureau pour les recherches académiques de la Commission pour l’éducation de la municipalité de Shanghai s’apprête à placer la Bible et des livres de kung-fu dans la liste des ouvrages dont la lecture est conseillée aux élèves des écoles secondaires de la ville. Plus exactement, l’Ancien Testament et les ouvrages de Jin Yong, célèbre auteur de romans d’arts martiaux chinois (1), sont distingués, les jeunes shanghaïens étant incités, durant leur temps libre, à lire ces ouvrages en lieu et place de classiques de la littérature chinoise tels que Le Rêve dans le pavillon rouge ou bien certaines œuvres du patrimoine littéraire occidental. Selon le journal, « les officiels ont souligné que la liste était publiée à titre de recommandation et que les élèves n’étaient pas dans l’obligation de lire ces ouvrages ».
Pour Wang Wengjia, élève du secondaire interrogé par le journal, la nouvelle de ce changement est une bonne chose. « Enfin, ils ont révisé la liste des recommandations, a-t-il commenté. On ne nous ne demande plus de lire ces classiques si monotones. » Pour certains parents, la réaction est moins positive. « Je ne veux pas que mon jeune fils soit mis trop tôt en contact avec la religion, a déclaré une mère citée par le quotidien. Lire la Bible à un si jeune âge n’est pas bon pour lui. » Par ailleurs, le quotidien signale que neuf écoles primaires et secondaires de la ville vont expérimenter l’usage de films tels que Shrek dans leur programme de littérature. « Les films sont supposés aider les élèves à mieux comprendre les œuvres littéraires qu’ils étudient, bien que certains de ces films, tels que Shrek, ne sont pas exactement adaptés de Shakespeare », souligne le journal.
Sur le fond, estiment les observateurs, il est difficile d’estimer la portée de l’inscription de la Bible au programme des écoles secondaires de Shanghai. Au plan national, les règlements en vigueur interdisent l’enseignement de la religion aux jeunes âgés de moins de 18 ans, la municipalité de Shanghai constituant toutefois une exception, la catéchèse des enfants y étant autorisée. En juillet dernier, des informations faisaient état d’une refonte en cours des « Règlements sur les Affaires religieuses » de la municipalité de Shanghai. Il était question d’une ouverture en direction des religions autres que celles reconnues à ce jour par les autorités chinoises (bouddhisme, taoïsme, catholicisme, protestantisme et islam) ainsi que d’une meilleure prise en compte des demandes dans le domaine religieux émanant des communautés étrangères vivant à Shanghai (2). A cette occasion, des universitaires avaient appelé à promouvoir « la tolérance religieuse, la liberté religieuse et le pluralisme culturel ».
(1) Cha Liangyong (Louis Cha), Jin Yong de son nom de plume, est un grand nom d’un genre très particulier de la littérature chinoise, le wuxia xiaoshuo (roman de kung-fu ou, littéralement, ‘roman de preux combattants’), comparable aux romans de cape et d’épée de la littérature occidentale du XIXe siècle. Extrêmement populaires, ces romans sont souvent publiés en feuilletons dans les journaux. Ce fut le cas de La Légende du héros chasseur d’aigles de Jin Yong dont la parution a débuté à Hongkong en 1958. En avril 2004, à Paris, la librairie You-Feng en a publié une traduction française.
(2) Voir EDA 402
© EDA