Homélie du card. Poupard pour la Journée du refus de la misère

Prier sans cesse pour devenir les missionnaires et les témoins du Christ

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CITE DU VATICAN, Jeudi 28 octobre 2004 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous l’homélie que le cardinal Paul Poupard, président de Conseil pontifical pour la Culture a prononcée lors de la messe pour la Journée mondiale du refus de la misère, le 17 octobre dernier, en la Basilique Saint-Jean-de-Latran, à Rome.

« Yahvé est ton gardien,
Yahvé te protège de tout mal
Yahvé te garde au départ, au retour,
dès lors et à jamais »
(du Psaume 120)

Chers confrères dans le sacerdoce
Chers amis du Mouvement ATD Quart Monde,
Frères et sœurs dans le Christ,

1. Je suis heureux de présider la Célébration solennelle des Divins mystères dans la magnifique cathédrale de Rome, mère de toutes les Eglises qui sont dans le monde, en ce XXIX Dimanche du temps ordinaire, choisi pour célébrer la Journée mondiale du refus de la Misère, en union avec le Saint-Père à Saint-Pierre, en concomitance avec le Congrès eucharistique international de Guadalajara au Mexique, réuni autour du thème : « L’Eucharistie, lumière et vie du nouveau millénaire ».

A cette occasion sont ici présents, nombreux, les Amis du Mouvement Aide à Toute Détresse – Quart Monde, fondé par mon compatriote le Père Joseph Wresinski, promoteur tenace et passionné de cette Journée mondiale contre la pauvreté. Je vous adresse à tous chers amis, mon salut le plus cordial et mon encouragement dans la poursuite de votre œuvre pleine de mérite.

2. Mais aujourd’hui, c’est le Seigneur lui-même, avec les paroles de l’Evangile qui vient d’être proclamé et avec les admonestations de l’Apôtre Paul, qui vous encourage, qui nous encourage tous, à nous faire annonciateurs et témoins de son Evangile, joyeuse annonce pour chaque homme, message de vie, de libération, d’authentique humanité.

L’Evangéliste Luc relie la brève mais intense parabole de la veuve qui implore justice, dans un contexte qui est conforme à sa nature : celui de la prière. La nécessité de toujours prier, sans se lasser est, en effet, l’enseignement de Jésus illustré dans cet épisode.
Ceci doit nous faire profondément réfléchir. La vie du chrétien est avant tout et surtout un dialogue continu, ininterrompu avec le Père à travers le Fils Jésus dans l’Esprit d’Amour et de communion qui les unit.

Chaque jour et à chaque moment de notre vie, nous chrétiens puisons à Dieu la vie intérieure, la lumière pour nos pas, la force pour l’engagement en vue du témoignage et de la mission dans le monde.

La prière est la voie privilégiée, le canal préférentiel à travers lequel passe la sève de l’amour de Dieu et s’écoule dans notre cœur, dans notre existence, pour faire de nous de vrais fils et de dignes disciples, chemin, vérité et vie pour chaque homme.
Comment prier sans cesse et sans jamais se lasser ? C’est la question qui parcourt ce chef d’œuvre littéraire et spirituel qu’est Récits d’un pèlerin russe.
Porter Jésus constamment dans les yeux, dans le cœur, sur les lèvres à travers une prière incessante, nous conduit inévitablement à relire, à revoir profondément notre existence, notre style de vie, nos rapports humains. Cela nous pousse ensuite, comme le rappelle saint Paul, Caritas Christi urget nos, à devenir ses annonciateurs, ses missionnaires et ses témoins, capables de donner et de partager la Parole de Vie et de salut en chaque occasion, opportune ou non, et de formuler une parole claire sur les situations qui dégradent l’homme, sa liberté et sa dignité, qui le rendent inhumain ou sans humanité

« Admoneste et reproche, exhorte avec magnanimité et doctrine » : il ne s’agit pas d’être les juges et les censeurs de nos frères, mais plutôt d’évaluer et de discerner, grâce à la lumière de l’Evangile, ce qui est conforme au projet de Dieu sur l’homme et ce qui, au contraire, le nie ou veut le détruire, minant ainsi l’identité même de l’être humain, son essence la plus intime et sacrée.

3. L’injustice perpétrée à l’égard des plus faibles, la pauvreté qui opprime une grande partie de la population mondiale, les situations de dégradations qui affligent des millions de personnes, surtout les femmes et les enfants, qui vivent dans les périphéries des mégapoles et qui n’ont pas même le minimum pour survivre avec dignité, « crient jour et nuit au Seigneur » et demandent une parole, une action courageuse et passionnée de la part des disciples du Christ.

Le fidèle du Christ comme son Maître, Bon Samaritain, ne peut rester indifférent ou passer outre, ne peut partager l’idée d’un destin cruel qui rassasie les uns jusqu’au gaspillage le plus indécent et les autres victimes de la pauvreté, sans aucune possibilité de rachat et de reconquête des droits humains les plus élémentaires.

La misère est œuvre de l’homme et seul l’homme peut la vaincre, disait le Père Wresinski. C’est de là qu’est né l’engagement du Mouvement ATD en faveur des plus pauvres et pour le refus de la misère. C’est cela la mission des chrétiens, c’est cela leur engagement en faveur de la justice de la solidarité, du partage fraternel, qui se traduit aussi en dénonciation ferme de toutes les injustices, de tout ce qui humilie la dignité et la grandeur de l’homme, l’unique être sur qui Dieu a imprimé son image et qu’il appelle a lui ressembler.

Au cours de ces derniers temps, nous assistons, parfois avec des sentiments d’égarements et d’impuissance, à des événements qui nous touchent profondément : des épisodes de violence incroyable, des scènes de pauvreté extrême, de misère et de dégradation humaine entrent dans nos maisons à travers les medias, la télévision, internet. Que faire ? Nous nous demandons également avec les paroles de l’Evangile : « Et Dieu ne rendra-t-il pas justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit ? Les fera-t-il longtemps attendre ? »
La réponse du Seigneur est claire et immédiate, et ne laisse aucun doute : « Je vous dit que je leur rendrai justice au plutôt ».
Les doutes naissent au contraire de la volonté de l’homme d’accueillir la justice de Dieu et de la faire entrer dans sa propre histoire à travers cette attitude profonde du cœur et de l’intelligence, qui marque toute l’existence et que nous appelons la foi : « Mais le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » Foi et justice, prière et engagement sont intimement liés, se sont des éléments indissociables.

Alors nous aussi comme Moïse, Aaron et Hur en cette célébration solennelle de l’Eucharistie, mémorial de l’amour et de la miséricorde de Dieu, élevons les mains au ciel pour implorer du Seigneur la victoire du bien, de la paix, de la solidarité, du dialogue fraternel, de la dignité de l’homme contre toute forme de barbarie, contre toute forme d’injustice et de pauvreté, contre toute forme de violence qui dégrade l’homme.

Soyons assurés que notre prière, si elle est sincère et jaillit du cœur, si elle est incessante, atteint Dieu, touche son cœur suscitant une réponse qui va bien au-delà de nos demandes et de nos mérites.

Ainsi, adressons-nous, confiant, en ce mois d’octobre, consacré de manière particulière à la Madone et à la prière du Saint Rosaire, à la Bienheureuse Vierge Marie, Advocata nostra, pour demander son affectueuse et maternelle intercession auprès du Père, riche en miséricorde, Dives in misericordia :

Notre Père, Ami très bon de tous les hommes,
qui entends notre cri et notre prière
et ne laisses jamais seuls tes fils les plus petits et les plus faibles,
qui as pitié des misérables et des pauvres
et condamnes la misère, comme tout autre forme de dégradation humaine
donne nous ta miséricorde,
fais croître notre foi,
fortifie notre espérance,
renforce notre témoignage ch
rétien,
pour vivre avec courage et avec joie notre mission quotidienne,
l’annonce salvifique de l’Evangile de Ton Fils,
unique et vrai Sauveur de l’homme.
A lui louange, honneur et gloire pour les siècles des siècles. Amen.

Traduction réalisée par Zenit

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ZENIT Staff

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