France : Loi de bioéthique, un silence "consternant" pour le card. Barbarin

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« L’essentiel de notre mission, nous le savons, c’est l’annonce de l’Évangile »

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CITE DU VATICAN, Samedi 7 février 2004 (ZENIT.org) – Le cardinal archevêque de Lyon Philippe Barbarin, primat des Gaules, n’hésite pas à confier à Jean-Paul II « deux soucis dans l’actualité » et deux « souffrances » pour l’Eglise en France, dans une « adresse » centrée la mission: « l’essentiel de notre mission, nous le savons, c’est l’annonce de l’Évangile », conclut le cardinal.

Le cardinal Barbarin s’adressait en effet ce matin à Jean-Paul II au nom de ses confrères des provinces de Lyon et Clermont lors de leur rencontre ensemble avec Jean-Paul II, au terme de leur visite ad limina (cf. ci-dessous, texte intégral).

Les évêques de France, pas favorables à l’instauration d’une loi
« Depuis quelques mois, la société française s’agite beaucoup autour des questions qui touchent à la laïcité, en particulier aux signes extérieurs d’appartenance religieuse. Vous l’avez vous-même évoqué récemment lors des vœux au Corps diplomatique. Les évêques de France ont exprimé leur opinion, qui n’est pas favorable à l’instauration d’une loi interdisant les signes religieux ostensibles, dans les écoles publiques et dans les hôpitaux. L’ensemble de la communauté chrétienne manifeste sur ce sujet des opinions différentes, et même opposées, qui ne manquent pas de fondement ni de justesse d’analyse. Au mois de décembre, Mgr Jean-Pierre Ricard, Président de notre Conférence, a bien noté, dans un souci de paix et avec une grande clairvoyance, que «le vote d’une loi ne sera jamais la réponse miracle à toutes les difficultés rencontrées». Dans un débat qui manque de sérénité, il est important que l’on perçoive à quel point les chrétiens sont engagés dans ce domaine et désireux de vivre en bonne intelligence et en paix avec les croyants des autres religions, nombreux en notre pays. L’enjeu en est aussi l’intégration de toutes les composantes sociales au sein de la Nation ».

La loi de bioéthique
« À l’inverse, déclare le cardinal Barbarin, j’ai été consterné du silence qui a entouré le vote de la nouvelle loi de bioéthique. Est-ce un signe d’indifférence ? Comment des députés catholiques peuvent-ils voter une loi qui manque de clarté dans le refus du clonage et qui laisse entendre que l’embryon humain n’est qu’un matériel de laboratoire, en autorisant son utilisation à des fins thérapeutiques. Nous avons assez d’estime et de confiance dans la recherche médicale pour penser qu’elle saura trouver les moyens de répondre à l’espérance des malades et de leurs familles, sans blesser nos convictions personnes. Conscient de l’importance et de la grandeur de la recherche médicale, j’ai encore à l’esprit la déclaration limpide de mon prédécesseur, le regretté cardinal Billé : «L’embryon humain n’est pas une chose». La situation est d’autant plus révoltante que la loi française déclare «garantir le respect de tout être humain, dès le commencement de la vie». Que veulent donc dire ces mots ? »

Le cardinal Barbarin confiait vendredi au journaliste qu’il ne voulait pas passer sous silence les « souffrances », et confiait aussi au pape ce samedi matin deux « blessures » de l’Eglise en France.

« Nous avons des souffrances à partager avec vous, dit-il. Plusieurs de nos diocèses ont vu récemment de jeunes prêtres quitter le ministère. Nous n’arrivons pas à comprendre, ni à voir les raisons de ces départs, qui interrogent les Évêques et les responsables de la formation. Y a-t-il eu des défauts dans la formation, des manques de discernement, des erreurs évitables dans la vie fraternelle, dans les ministères confiés ? Certes, il ne s’agit plus des terribles hémorragies des années où soufflaient les vents de la contestation et la bourrasque d’après 1968, mais nos jeunes prêtres sont peu nombreux et les départs sont d’autant plus fortement ressentis. Avec tous les frères prêtres qui ont quitté le ministère durant ces années-là, nous essayons de renouer des liens et parfois nous vivons des contacts respectueux et nourris d’affection fraternelle. Mais que se passe-t-il au juste aujourd’hui ? S’agit-il d’un manque d’espérance ? Le ministère est-il trop difficile à vivre ? Comment conforter les prêtres, ainsi que les diacres, qui sont touchés aussi, quoique différemment, par cette question ? Nous constatons que les jeunes générations sont généreuses et pleines d’enthousiasme; cependant leur fragilité humaine, affective, psychologique et sociale ne les aide pas à acquérir une véritable maturité, d’autant plus que la société est elle-même très fragile et n’incite pas à la prise d’engagements définitifs, fondés sur des principes moraux droits ».

Au cours de l’échange de vendredi avec la presse, Mgr René Séjourné, évêque de Saint-Flour, a aussi fait remarquer que certains prêtres reviennent à leur ministère au bout d’un certain temps: ils étaient partis « trop vite ».

La seconde « blessure » que le cardinal Barbarin a confié à Jean-Paul II concerne la pédophilie. « Dans nos presbytérium, disait-il, les cas de prêtres pédophiles, heureusement peu nombreux, sont pour nous très douloureux. Ils sont aussi une blessure dramatique pour tout le corps ecclésial. En évoquant cela, nous pensons d’abord aux enfants et à ceux qui, aujourd’hui adultes, ont eu à subir de telles violences de la part de certains de nos frères, et qui en restent pour toujours marqués et meurtris. Nous avons conscience que ce sont des vies à jamais blessées et détruites. C’est à ces personnes, à leurs familles et à tous leurs proches que nous disons notre compassion. Oui, nous comprenons leur souffrance et nous en mesurons la profondeur ; nous voulons leur rappeler qu’ils ont une place dans notre prière et que nous souhaitons qu’ils soient entourés, par leurs familles, par leurs amis et par l’Église, pour retrouver goût à la vie et pour construire leur avenir. Les chrétiens réagissent avec foi, unis à leurs pasteurs, et ils essaient d’avancer sur les chemins de la vérité et de la justice. Espérer pour tous, prier pour ceux qui ont commis de telles horreurs, ce n’est pas facile, mais c’est aussi un ordre du Seigneur qui «veut que tous les hommes soient sauvés». Face à ces difficultés, les prêtres sont appelés à une droiture de vie simple, claire et exigeante. Leur engagement se fonde sur une relation profonde au christ, qui comble nos existences et nous donne l’audace pour la mission ».

Il revenait ensuite à « la mission principale : évangéliser ». « Ce n’est pas nous qui allons faire disparaître le péché du monde, observait-il. Mais nous voulons lutter, dans tous les domaines, pour que l’amour gagne. L’essentiel de notre mission, nous le savons, c’est l’annonce de l’Évangile ».

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ZENIT Staff

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