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Les chiffres du rapport de la Cour des comptes sur le handicap mental

Le 26 juin 2003 la Cour des comptes a rendu un rapport intitulé "La vie avec un handicap" au président de la République. Elle y dresse entre autres un constat sévère sur les actions menées en faveur des personnes handicapées, sur l'utilisation des finances publiques et dénonce notamment l'absence de politique publique de recherche thérapeutique sur le handicap mental.

Des structures inadaptées

Ce rapport fait ressortir le manque de solutions pour les personnes atteintes de déficience mentale à tout âge de leur vie.

- S’agissant des demandes de places dans les établissements pour enfants handicapés, « les listes d’attente de très loin les plus longues concernent les enfants déficients intellectuels. Aucune mesure explicite n’a cependant été prévue pour cette catégorie de personnes handicapées ».
- L’intégration scolaire en milieu ordinaire ne constitue pas une véritable priorité pour l’éducation nationale « compte tenu notamment d’une certaine réticence du personnel enseignant ». Par conséquent plus de 30 % des enfants handicapés mentaux accueillis en établissements médico-sociaux ne sont pas scolarisés du tout et 90 % de ceux qui sont scolarisés ne le sont pas par l’éducation nationale mais par les affaires sociales.
- Dans l’expérimentation des « sites pour la vie autonome » qui devraient conduire les personnes handicapées adultes à accéder à l’autonomie la plus large dans le milieu ordinaire, la Cour relève que « la déficience intellectuelle, en tant que telle, n’a pas fait partie du protocole défini par le comité national de suivi… La manière dont cette action est conduite privilégie de fait les personnes en situation de déficience motrice ou sensorielle pour lesquelles la compensation paraît a priori possible et écarte ab initio les personnes en situation de déficience intellectuelle qui forment pourtant 70 % de la population accueillie dans les institutions ».
- Les réflexions sur le vieillissement des personnes handicapées sont menées « sous la pression des faits » et « aucune disposition législative et réglementaire de portée générale n’a encore été prise dans ce domaine ». En témoigne, de 2001 à 2003, l’inscription budgétaire de la création de 127 places seulement pour les personnes handicapées vieillissantes ! Comme le note la Cour, « il est impossible d’évaluer le besoin, mais l’on peut douter que la création de 127 places suffise à le satisfaire ». Notons que pour le seul exemple de la trisomie 21, l'espérance de vie des personnes atteintes de cette maladie était de 9 ans en 1929, 55 ans en 1986 et tend à rejoindre celle de l'ensemble de la population depuis quelques années...

Des chiffres sévères...

Les chiffres présentés par la Cour pour 1999 révèlent l’absence de recherche thérapeutique sur la trisomie 21.
C'est la première fois que des chiffres officiels dénonçant cet état de fait, sont publiés.

Pour l'année 1999 :
- le coût du dépistage de la trisomie 21 s'élève à 100 millions d’euros,
- 85 434 caryotypes fœtaux ont été faits pour dépister 1 405 enfants trisomiques,
- 357 enfants trisomiques sont nés vivants,

Par ailleurs il n'y a aucun projet de recherche publique à visée thérapeutique pour les personnes trisomiques.

La direction générale de la santé a même indiqué à la Cour que « si l’on exclut les équipes de chercheurs qui travaillent sur le dépistage de la trisomie 21 proprement dit et les facteurs épidémiologiques associés à cette pathologie », elle n’a « connaissance d’aucune équipe dédiée spécifiquement à la relation entre trisomie 21 et retard mental », précisant que « les seules recherches cliniques sur la trisomie 21 sont menées et diffusées par une fondation privée et trois équipes hospitalières ».

Commentaires des associations

Cette absence de recherche :
- est contraire à l’intention affichée par le Pr. Jean-François Mattei, dans son rapport de décembre 1996, d’éviter toute dérive eugénique ;
- signifie que l’espoir thérapeutique est interdit, non seulement pour les enfants trisomiques qui naîtront, mais aussi pour tous les adultes concernés, dont l’espérance de vie a doublé ;
- constitue un grave préjudice pour les 50 000 personnes trisomiques en France. Quels patients accepteraient que l'Etat investisse 100 millions d'euros par an pour les dépister et les "éradiquer" en les privant de toute recherche thérapeutique ? Imagine-t-on un tel rapport sur le cancer ou le sida ?
- conduira à de nouveaux arrêts Perruche : il ne suffit pas d’écrire dans la loi que «nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance », encore faut-il que la solidarité nationale existe.

En cette année européenne des personnes handicapées, et dans le cadre de la priorité du Président de la République, des associations réclament qu’un effort très sensible soit consenti pour améliorer la prise en charge médicale et la recherche en faveur des personnes trisomiques.