CITE DU VATICAN, Mercredi 5 mars 2003 (ZENIT.org) - "Que chaque être vivant loue le Seigneur!", par ce verset du Ps 150. L'Osservatore Romano hebdomadaire en français du 4 mars propose la traduction intégrale que voici (cf. www.vatican.va) de la catéchèse de Jean-Paul II en italien donnée au cours de l'audience générale du 26 février. "La communauté chrétienne, explique le pape en commentant ce psaume, doit faire un examen de conscience afin que revienne toujours plus dans la liturgie la beauté de la musique et du chant".

Lecture: Ps 150, 1-5

1. Pour la deuxième fois retentit dans la Liturgie des Laudes le Psaume 150, que nous venons de proclamer: un hymne de fête, un alléluia rythmé par de la musique. Il est le sceau idéal de tout le Psautier, le livre de la louange, du chant, de la liturgie d'Israël.

Le texte est d'une admirable simplicité et transparence. Nous devons seulement nous laisser attirer par l'appel insistant à louer le Seigneur: "Louez Dieu... louez-le... louez-le!". Dieu est présenté, en ouverture, sous deux aspects fondamentaux de son mystère. Il est sans aucun doute transcendant, mystérieux, distinct de notre horizon: sa demeure royale est le "sanctuaire" céleste, le "firmament de sa puissance", semblable à une forteresse inaccessible à l'homme. Et pourtant il est proche de nous: il est présent dans le "sanctuaire" de Sion et agit dans l'histoire à travers ses "prodiges" qui révèlent et rendent tangible "toute sa grandeur" (cf. vv. 1-2).

2. Entre le ciel et la terre s'établit donc comme un canal de communication, dans lequel se rencontrent l'action du Seigneur et le chant de louange des fidèles. La liturgie unit les deux sanc-tuaires, le temple éternel et le ciel infini, Dieu et l'homme, le temps et l'éternité.

Au cours de la prière nous accomplissons une sorte d'ascension vers la lumière divine et, en même temps, nous faisons l'expérience d'une descente de Dieu qui s'adapte à nos limites pour nous écouter et nous parler, pour nous rencontrer et nous sauver. Le Psalmiste nous pousse instantanément à utiliser un accessoire lors de cette rencontre de prière: le recours aux instruments musicaux de l'orchestre du temple de Jérusalem, tels que le cor, la harpe, la cithare, les tambours, les flûtes, les cymbales. Le fait d'avancer en cortège faisait également partie du rituel hyérosolimitain (cf. Ps 117, 27). Le même appel retentit dans le Psaume 46, 8: "Chantez des hymnes avec art!".

3. Il est donc nécessaire de découvrir et de vivre constamment la beauté de la prière et de la liturgie. Il faut prier Dieu non seulement avec des formules théologiquement exactes, mais également d'une façon belle et digne.

A ce propos, la communauté chrétienne doit faire un examen de conscience afin que revienne toujours plus dans la liturgie la beauté de la musique et du chant. Il faut purifier le culte d'erreurs de style, de formes d'expression médiocres, de musiques et de textes plats, peu adaptés à la grandeur de l'acte que l'on célèbre.

L'appel qui est fait à ce sujet dans la Lettre aux Ephésiens à éviter l'intempérance et les vulgarités pour laisser place à la pureté de l'hymne liturgique est significatif: "Ne vous enivrez pas de vin: on n'y trouve que libertinage; mais cherchez dans l'Esprit votre plénitude. Récitez entre vous des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirés; chantez et célébrez le Seigneur de tout votre coeur. En tout temps et à tout propos, rendez grâces à Dieu le Père, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ" (5, 18-20).

4. Le Psalmiste termine en invitant à la louange "tout vivant" (cf. Ps 150, 5), littéralement "tout souffle", "toute haleine", une expression qui en hébreu signifie "tout être qui respire", en particulier "chaque homme vivant" (cf. Dt 20, 16; Jos 10, 40; 11, 11.14). C'est donc la créature humaine avec sa voix et son coeur qui participe tout d'abord à la louange divine. En même temps qu'elle, sont convoqués de façon idéale tous les êtres vivants, toutes les créatures chez lesquelles se trouve un souffle de vie (cf. Gn 7, 22), afin qu'elles élèvent leur hymne de gratitude au Créateur pour le don de l'existence.

Saint François prendra place dans le sillage de cette invitation universelle avec son suggestif "Cantique de Frère Soleil", dans lequel il invite à louer et à bénir le Seigneur pour toutes les créatures, reflet de sa beauté et de sa bonté (cf. Sources franciscaines, 263).

5. Tous les fidèles doivent participer de façon particulière à ce chant, comme le suggère la Lettre aux Colossiens: "Que la Parole du Christ réside chez vous en abondance: instruisez-vous en toute sagesse par des admonitions réciproques. Chantez à Dieu de tout votre coeur avec reconnaissance, par des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirés" (3, 16).

A ce propos, dans ses Discours sur les Psaumes, saint Augustin voit les saints qui louent Dieu symbolisés dans les instruments musicaux: "Vous, les saints, vous êtes le cor, la psaltérion, la cithare, le tambour, le choeur, les cordes et l'orgue, et les cymbales du jubilé qui émettent de beaux sons, c'est-à-dire qui jouent harmonieusement. Vous êtes toutes ces choses. Que l'on ne pense pas, en écoutant le Psaume, à des choses de peu de valeur, à des choses tran-sitoires, ni à des instruments de théâtre". En réalité, la voix qui chante Dieu est "tout esprit qui loue le Seigneur". (Discours sur les Psaumes, IV, Rome 1977, pp. 934-935).

La musique la plus élevée est donc celle qui monte de nos cæurs. Et c'est précisément cette harmonie que Dieu attend d'entendre dans nos liturgies.

© L'Osservatore Romano - 4 mars 2000