Père Michael Czerny SJ © jesuits.org

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UNODC: le Saint-Siège demande un «cadre légal» pour les migrants

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Pour prévenir le trafic d’êtres humains

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Face au phénomène croissant du trafic et de l’esclavage d’êtres humains auquel les migrants sont exposés partout dans le monde, le Saint-Siège souligne « l’importance d’assurer des cadres légaux adéquats et des voies fiables pour empêcher les migrants de devenir des victimes de la traite d’êtres humains ».
Le père Michael Czerny, sous-secrétaire de la section Migrant et Réfugié du Saint-Siège, est intervenu au Bureau des Nations Unies sur les drogues et le crime, à la cinquième session thématique sur le Pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière. Intitulée « Contrebande de migrants, traite des personnes et formes contemporaines d’esclavage, y compris identification, protection et assistance appropriées pour les migrants et les victimes de la traite », la session s’est tenue à Vienne les 4 et 5 septembre 2017.
« Les facteurs qui contribuent à la vulnérabilité, comme la pauvreté, l’apatridie, le chômage, le manque d’éducation, la discrimination des femmes et des filles, ne conduisent pas nécessairement en soi au trafic », précise le p. Czerny. « Mais c’est l’interaction de facteurs qui se renforcent mutuellement qui accroit la vulnérabilité ».
« En même temps, poursuit-il, chaque société a besoin de reconnaître les forces de la demande – par exemple pour la prostitution ou pour le travail en-deçà des standards minimum nationaux – qui fonctionnent dans le pays, rendant la traite d’êtres humains très rentable. »
« Les investigations doivent être coordonnées aux niveaux national, régional et international, insiste le représentant du Saint-Siège. Le partage des données et des informations clé doit être assuré ainsi que la protection légale pour les victimes, tandis que les auteurs de crime doivent être poursuivis et traduits en justice ».
Voici notre traduction de la déclaration en anglais du p. Czerny
HG
Intervention du Saint-Siège à l’UNODC
Ma délégation souhaite accueillir les deux co-facilitateurs et le représentant spécial pour la migration internationale et remercier les panélistes pour leurs présentations perspicaces.
Dans la préparation du Pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière, le Saint-Siège se félicite grandement de l’examen approfondi de problèmes comme la traite et l’esclavage contemporain qui causent tant de souffrances à un nombre toujours croissant de victimes malheureuses partout dans le monde. Le scénario complexe des migrations aujourd’hui est tristement caractérisé par « de nouvelles formes d’esclavage imposées par des organisations criminelles qui achètent et vendent des hommes, des femmes et des enfants » (1).
En dépit des grandes réalisations d’accords internationaux, les demandeurs d’asile et les migrants, qui risquent leur vie à la recherche de la sécurité et d’un nouveau foyer, sont encore et toujours plus vulnérables, en particulier aux organisations criminelles.
Le processus de la migration commence habituellement avec des espoirs et des attentes élevés pour une plus grande sécurité et de meilleures opportunités. Puisque les routes sûres, régulières et abordables ne sont généralement pas accessibles, de nombreux migrants emploient des passeurs. Des éléments de traite d’êtres humains sont présents dans beaucoup du trafic humain contemporain et c’est une des raisons pour lesquelles le projet de migration peut être une erreur désastreuse. Les trafiquants peuvent facilement profiter du désespoir des migrants et des demandeurs d’asile. Se retrouvant en situation irrégulière et sans papiers, ceux-ci courent un risque très élevé d’être abusés et exploités, y compris par la traite et l’esclavage. Le Saint-Siège souligne donc l’importance d’assurer des cadres légaux adéquats et des voies fiables pour empêcher les migrants de devenir des victimes de la traite d’êtres humains.
Les facteurs qui contribuent à la vulnérabilité, comme la pauvreté, l’apatridie, le chômage, le manque d’éducation, la discrimination des femmes et des filles, ne conduisent pas nécessairement en soi au trafic. Mais c’est l’interaction de facteurs qui se renforcent mutuellement qui accroit la vulnérabilité. En même temps, chaque société a besoin de reconnaître les forces de la demande – par exemple pour la prostitution ou pour le travail en-deçà des standards minimum nationaux – qui fonctionnent dans le pays, rendant la traite d’êtres humains très rentable.
Le nombre des trafiquants et des migrants victimes de la traite ne cesse de croître de façon alarmante (2). D’après le Rapport mondial 2016 sur la traite des personnes, 51 pour cent des victimes sont des femmes, 21 pour cent sont des hommes, 20 pour cent sont des filles et 8 pour cent des garçons.
La traite d’êtres humains est une industrie de plusieurs milliards de dollars, parmi les plus grandes au monde avec, selon les estimations, 21 à 46 millions de personnes victimes du travail forcé, de la servitude de la dette, du sexe et d’autres formes de trafic L’esclavage ne doit pas être un aspect inévitable des économies. En revanche, les entreprises devraient être à l’avant-garde pour combattre et empêcher cette parodie.
Les investigations doivent être coordonnées aux niveaux national, régional et international. Le partage des données et des informations clé doit être assuré ainsi que la protection légale pour les victimes, tandis que les auteurs de crime doivent être poursuivis et traduits en justice. Pour protéger la dignité humaine, la formation des agents publics et l’établissement de politiques nationales qui garantissent aux étrangers l’accès à la justice, sont très importants.
L’assistance des victimes doit être garantie dans les pays d’accueil et le principe de « non-refoulement » doit s’appliquer aux victimes de la traite, leur assurant conseil psychologique et tout autre soutien et réhabilitation. Les victimes devraient avoir le droit de rester régulièrement dans le pays aussi longtemps qu’elles ont besoin d’une thérapie de guérison et enfin voir leur séjour prolongé en cas d’opportunité de travail.
« Nous devons reconnaître que nous sommes confrontés à un phénomène mondial qui dépasse la compétence d’une communauté ou d’un pays. Afin de l’éliminer, nous avons besoin d’une mobilisation comparable en taille à celle du phénomène lui-même » (3). C’est pourquoi les contributions des organes politiques, des entreprises et des académies, de la société civile et des communautés religieuses sont toutes indispensables, chacune selon ses propres capacités et responsabilités.
Une mesure du succès du Pacte mondial pour la migration sera si les mouvements migratoires de demain ne sont plus inévitablement marqués par le trafic d’êtres humains comme le sont ceux d’aujourd’hui. Car la migration irrégulière n’est pas librement choisie mais plutôt imposée aux personnes parce que les canaux légaux et sûrs ne sont simplement pas accessibles.
Le Saint-Siège attend avec impatience de participer à la réunion de haut niveau pour examiner les progrès fait sur la mise en œuvre du Plan d’action mondial des Nations Unies pour combattre la traite des personnes, les 27 et 28 septembre à New York, où il renouvellera ses engagements forts.
Merci.
NOTES
(1) Pape François, Message pour la Journée mondiale des migrants et des réfugiés 2016, le 12 septembre 2015
(2) E.g., UNODC, Rapport mondial sur la traite des personnes, 2016, pp. 30, 39, 40.
(3) Pape François, Message pour la célébration de la Journée mondiale de la paix, 1erjanvier 2015.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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