David Lodge @ babelio.com

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L’autobiographie de David Lodge, par Lucetta Scaraffia

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« Humour et lucidité d’un écrivain catholique »

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« Humour et lucidité d’un écrivain catholique » titre L’Osservatore Romano en italien du 11 janvier 2018, à propos de l’autobiographie du romancier, dramaturge et essayiste britannique David Lodge – aujourd’hui âgé de 82 ans – lue par Lucetta Scaraffia.
Voici notre traduction intégrale de cet article passionnant.
Humour et lucidité d’un écrivain catholique
David Lodge, dont est sortie en Italie l’autobiographie (Un bon moment pour naître. Mémoires 1935-75, Milan, Bompiani, 2017, pages XVI + 496), fait partie de la grande tradition de romanciers catholiques anglais qui a marqué le XXème siècle. Lodge a été professeur de littérature anglaise pendant des décennies dans les universités britanniques et américaines. Il a étudié non seulement les écrivains catholiques qui l’ont précédé et sur lesquels il a écrit des essais éclairants, mais a également été capable de raconter, avec humour et lucidité, la vie quotidienne des catholiques au Royaume-Uni, une minorité, sous divers aspects, rejetée aux marges de la vie académique et sociale. Les catholiques anglais étaient en effet pour la plupart relégués aux plus bas niveaux de l’échelle sociale, à partir du moment où le groupe était constitué surtout d’Irlandais émigrés à Londres en quête de travail.
L’auteur n’y fait pas exception, mais justement parce qu’il est né à un moment historique particulièrement favorable, c’est-à-dire juste avant la seconde guerre mondiale, il peut bénéficier pleinement des facilités que les gouvernements travaillistes de l’après-guerre mirent en œuvre pour ouvrir les portes des universités aux étudiants plus méritants même s’ils étaient pauvres. Ainsi, bien que venant de collèges catholiques jugé d’un niveau moyen à faible, il a pu devenir, grâce à son intelligence et à sa volonté, un professeur universitaire.
Dans son autobiographie, il raconte, avec un regard à la fois critique et affectueux, son parcours dans les écoles catholiques, dont le frappent surtout les carences dans l’enseignement de la religion chrétienne. Il est en effet éduqué dans un climat centré principalement sur la dévotion, où la richesse de la foi et de ses sources révélées est remplacée par un système de règles comportementales, qui concerne surtout la sphère sexuelle. Expérience qui n’est pas différente chez ceux qui, dans d’autres pays comme l’Italie, ont fréquenté le catéchisme à l’époque pré-conciliaire. David Lodge, sur ce point aussi, se plie aux règles catholiques, au point que, tout au long de ses longues fiançailles qui précèdent les noces avec sa belle épouse Mary, catholique d’origine irlandaise, il ne cède jamais à la tentation de rapports pré-matrimoniaux.
Un couple modèle, donc, pour des raisons qui seront remises en question seulement au contact avec les catholiques américains, comme il l’explique clairement dans son ouvrage : « Il est difficile pour ceux qui n’ont pas reçu le genre d’éducation catholique impartie à Mary et à moi, de comprendre comment la foi instillée couvrait et contrôlait toute chose. La situation était plus ressentie dans le nord de l’Europe, où le catholicisme avait absorbé quelque chose de la spiritualité scrupuleuse des protestants, et moins dans les pays latins du sud, où les laïcs avaient une attitude vraiment détendue sur la contradiction entre principes et comportements. Pour nous, l’Eglise était comme un club : elle avait un livre de règles qui couvrait toutes les contingences possibles de l’existence et, si on s’y tenait ou recherchait l’absolution après les avoir enfreintes, on avait la garantie de la vie éternelle et l’aide de Dieu dans les épreuves difficiles de cette vie. Il semblait évident que l’on ne pouvait ignorer les règles jugées inconfortables sans perdre l’inscription au club, et pour cette raison tant de catholiques avaient « abandonné » la foi à cause du problème du contrôle des naissances ».
Le réseau d’amitiés dans lequel David Lodge navigue reste longtemps marqué par l’identité catholique, même quand il passe de longues périodes comme professeur invité dans les universités américaines, et nombre de ses romans les plus réussis aussi ont au centre du récit le rapport entre la religion catholique et le monde contemporain. On peut citer par exemple La chute du British Musem, où le protagoniste, alter ego transparent de Lodge, déjà père de trois enfants et encore sans un travail fixe, vit dans l’obsession d’échouer dans l’utilisation de la méthode naturelle de contrôle des naissances, conformément à Humanae vitae. L’ironie, jointe à une fidèle adhésion au credo catholique typique de ceux qui appartiennent à une minorité non valorisée socialement, lui permettent de faire comprendre beaucoup de choses sur la crise de la famille, et l’éloignement de nombreux fidèles de l’Eglise, dans la seconde moitié du XXème siècle Dans ses récits être catholique n’est jamais une adhésion abstraite, mais une façon de vivre quotidienne, qui se vit concrètement dans les difficultés de chaque jour.
Encore une fois, d’un catholicisme marginal mais vivant comme le catholicisme anglais, arrivent des inspirations critiques auxquelles s’ajoute l’invitation à une adhésion plus consciente et sentie à notre credo.
Traduction de ZENIT, Océane Le Gall

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Océane Le Gall

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