Le P. Federico Lombardi

ZENIT - HSM

Le p. Lombardi évoque les "charismes spécifiques" de Benoît XVI et du pape François

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Retour sur ses années au service de la communication du Saint-Siège

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« Je me suis toujours considéré comme un serviteur (…) qui cherche à valoriser le charisme spécifique du pape, plus que quelqu’un qui va lui enseigner ce qu’il doit faire », explique le père Federico Lombardi, qui fut directeur du Bureau de presse du Saint-Siège durant 10 ans (2006-2016). Dans un entretien à l’hebdomadaire diocésain de Padoue La Difesa del popolo, il rend hommage au don de « clarté » et de « concision » de Benoît XVI et à l’efficacité « extraordinaire » des gestes du pape François.

Six mois après son départ du Bureau de presse, le jésuite raconte son parcours : « Quand j’étudiais la théologie en Allemagne, au début des années 70, je travaillais énormément avec les émigrés italiens … j’ai commencé à faire le catéchisme aux jeunes, des visites aux familles… Un jour, un jésuite de la Civiltà cattolica (…) m’a demandé de faire un article pour la revue. Et je lui ai répondu que l’unique chose sur laquelle cela avait du sens que j’écrive était la réalité des immigrés italiens du point de vue social et spirituel. Et j’ai ainsi fait deux articles. À la Civiltà cattolica, ils les ont appréciés et ainsi, quand j’ai terminé la théologie et que j’étais sur le point d’aller enseigner la philosophie des sciences à Gallarate, mes supérieurs m’ont fait dévier par là. J’y suis resté douze ans, y compris comme vice-directeur ».

Après un intervalle de 1984 à 1990, durant lequel le père Lombardi a été provincial des jésuites en Italie, il fut nommé directeur des programmes de Radio Vatican : « la radio était complètement nouvelle : j’étais habitué à faire des articles de quinze pages, là je devais faire des services d’une minute. Mais j’ai toujours eu l’idée que, pour communiquer, il fallait avoir des idées claires et chercher à les formuler de manière ordonnée ; le langage spécifique, je l’ai appris par la suite ».

En 2006, il fut appelé à la direction du Bureau de presse du Saint-Siège où il resta 10 ans. « Je me suis toujours considéré comme un serviteur, confie-t-il, comme quelqu’un qui cherche à valoriser le charisme spécifique du pape, plus que quelqu’un qui va lui enseigner ce qu’il doit faire ».

Le don de clarté, de concision de Benoît

Il évoque la communication de Benoît XVI : « La linéarité, la profondeur et la clarté du discours étaient totales. Et cela, c’est déjà en soi de la communication. La communication n’est pas le discours dialogué devant un million de jeunes : c’est aussi faire un discours conceptuel qui fait émerger des idées profondes ».

Le pape allemand « savait aussi dialoguer » notamment avec ses étudiants, mais « il préférait faire les choses de façon plus systématique », ajoute-t-il. Ainsi les questions étaient sélectionnées à l’avance lors des conférences de presse. « Non par censure, précise le p. Lombardi : je n’ai jamais annulé les questions plus difficiles ; mais je choisissais celles qui pouvaient intéresser le plus tous les journalistes ».

Benoît XVI « était très bon, en fait, pour saisir les idées et les exprimer. C’est pourquoi en un quart d’heure, (il) répondait à cinq questions et fournissait une quantité de concepts denses, riches et précis. Son don est dans les contenus, dans la concision, dans la clarté ».

En revanche, se souvient le jésuite, « il n’aimait pas les applaudissements qui l’interrompaient dans le fil du discours qu’il faisait. Jean-Paul II, et encore plus François, au contraire, vivent du dialogue. Tu dis une chose, celui qui écoute réagit ; ou plutôt ils provoquent une réaction, ce qui est très beau. Mais Benoît, non : il voulait dire sa pensée. Et cela en valait la peine. Cela aurait été un contresens de dire à Benoît, étant donné ce qu’il était, de faire une plaisanterie ».

Le père Lombardi témoigne aussi de la disponibilité du pape allemand pour s’améliorer : « Après chaque voyage, le pape rencontrait ses collaborateurs qui s’occupaient de communication pour faire le point sur la façon dont cela s’était passé. Il y avait le pape, moi, le directeur de L’Osservatore, un responsable pour la radio. Et Benoît nous sollicitait : ‘Dites, dites’… ».

L’efficacité extraordinaire de François

Si Benoît XVI a parfois été incompris, le pape François « peut compter sur une prémisse positive tellement forte qu’il peut y avoir une étourderie » dans ses propos, constate le père Lombardi.

Il souligne « sa proximité des personnes et de la vie, une proximité pleine d’attention et de miséricorde ». Un message qu’il a voulu donner « dès les premiers jours du pontificat : … Dieu t’aime, … il est miséricordieux, il est père ».

« Cela a été compris en substance, au-delà de la curiosité ou des sympathies superficielles », estime le jésuite : « les gens ordinaires sont contents qu’il embrasse un malade effrayant, en disant : c’est l’amour chrétien… François le fait avec une dimension physique et une spontanéité extraordinaire… Et puis il élimine les papamobiles et les blindés et cela, les gens le comprennent ».

« En tant que qualité individuelle, je ne pense pas qu’il soit très différent des autres papes, mais comme efficacité de manifestation pour un peuple, François est extraordinaire », affirme-t-il.

Le « danger » de cette communication serait « une concentration excessive sur la figure du pape », déclare le père Lombardi : « Une concentration qu’il ne veut pas : il dit : ‘vive Jésus’ et non ‘vive le pape’. Mais le pape est partout et le reste des dimensions de l’Église risquent de rester un peu dans l’ombre ».

Si le pape argentin souhaite « amener l’Église à un style nouveau », cependant « la logique des médias ne facilite vraiment pas ce changement en attirant toujours l’attention sur le sommet de la visibilité ».

Avec une traduction de Constance Roques

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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