Messe à Sainte-Marthe, 6 déc. 2016 © L'Osservatore Romano

Messe à Sainte-Marthe, 6 déc. 2016 © L'Osservatore Romano

Noël: Dieu vient consoler son peuple, homélie du 6 décembre 2016

Judas, brebis perdue

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La « joyeuse annonce de Noël » c’est que « le Seigneur vient avec sa puissance », mais surtout que cette puissance, « ce sont ses caresses », sa « tendresse », il vient consoler son peuple, a expliqué le pape François dans son homélie pour la messe matinale en la chapelle de la Maison Sainte-Marthe du Vatican ce mardi 6 décembre 2016.
Il a suggéré la grâce à demander: « Que le Seigneur nous donne cette grâce, d’attendre Noël avec nos blessures, avec nos péchés, sincèrement reconnus, d’attendre la puissance de ce Dieu qui vient nous consoler, qui vient avec pouvoir, mais son pouvoir est la tendresse, les caresses qui sont nées de son cœur, son cœur si bon qu’il a donné sa vie pour nous ».
Le pape a commenté les lectures – Isaïe qui annonce la consolation d’Israël et la parabole d ela brebis perdue -, en invitant à une « exultation sincère »: « devant Noël, a dit le pape, nous demandons cette grâce de recevoir cette joyeuse annonce avec une sincère exultation et de nous réjouir », mais aussi « de laisser le Seigneur nous consoler ».
Et d’expliquer: « le Seigneur vient et quand le Seigneur vient, il touche l’âme avec ses sentiments », « il vient comme un juge, oui, mais un juge qui caresse, un juge qui est plein de tendresse » et « fait tout pour nous sauver ». Car Dieu « juge avec amour, tellement, tellement, tellement qu’il a envoyé son fils, et Jean souligne : non par pour juger mais pour sauver, non pas pour condamner mais pour sauver »: c’est pourquoi le jugement de Dieu « porte toujours à cette espérance d’être sauvés ».
Le pape a commenté l’attitude du berger : « Qu’en pensez-vous ? Si l’une de ses brebis se perd, ne laissera-t-il pas les 99 sur les montagnes pour aller chercher celle qui s’est perdue ? »:  le Seigneur, lorsqu’il vient, « ne dit pas : « mais je fais les compte et j’en perds une… 99… c’est raisonnable ». Non, non. Chacune est unique ». En effet, le pasteur ne possède pas simplement 99 brebis mais il « en a une, une, une, une, une… » : c’est-à-dire que « chacune est différente ». Et il « aime chacune personnellement. Il n’aime pas une masse indistincte. Non ! Il nous aime par notre nom, il nous aime tel que nous sommes. »
Le pape a fait observer que la brebis ne s’est pas égarée par mégarde: « elle connaissait bien le chemin » ; mais elle s’était perdue « parce qu’elle avait le cœur perdu, elle avait le cœur malade. Elle était aveuglée par quelque chose d’intérieur et, poussé par cette dissociation intérieure, elle avait fui dans l’obscurité pour se défouler ». Mais « ce n’était pas une blague, ce qu’elle a fait… Elle s’est enfuie : une véritable fugue pour s’éloigner du Seigneur, pour rassasier cette obscurité intérieure qui la menait à une double vie », à « être dans le troupeau et à fuir l’obscurité dans l’obscurité ». Or, voici le message de consolation : « Le Seigneur connaît ces choses et lui, il va la chercher ».
Et puis le pape François a évoqué la figure de l’apôtre Judas: « Pour moi, la figure qui me fait le mieux comprendre l’attitude du Seigneur avec la brebis perdue est l’attitude du Seigneur avec Juda. La brebis perdue la plus parfaite de l’Évangile est Juda ».
En effet, a rappelé le pape, c’est « un homme qui avait toujours, toujours, quelque amertume dans le cœur, quelque chose à critiquer chez les autres, toujours à distance » : un homme qui ne connaissait pas « la douceur de la gratuité de la vie avec tous les autres ». Et puisque cette « brebis » « n’était pas satisfaite », alors « elle s’échappait ».
Judas, a dit le pape, « s’échappait parce qu’il était un voleur », d’autres « sont luxurieux » et « ils s’échappent parce qu’il y a cette obscurité dans leur cœur qui les détache du troupeau ». Il a fustigé « cette double vie » qui est celle « de tant de chrétiens » et aussi, a-t-il ajouté « douloureusement » de prêtres et d’évêques. D’ailleurs, « Judas était un évêque, c’était l’un des premiers évêques ».
Judas aussi est une « brebis perdue » a conclu le pape François en ajoutant : « Le pauvre, le pauvre, ce frère Judas, comme l’appelait don Mazzolari, dans ce si beau sermon : « Frère Judas, que se passe-t-il dans ton cœur ? ».
Puis le pape a proposé une actualisation de la parabole: « nous devons nous aussi comprendre les brebis perdues », car « nous avons nous aussi un petit quelque chose, tout petit ou moins petit, des brebis perdues ». Or, « ce qu’a fait la brebis perdue n’était pas une erreur ; c’est une maladie, c’est une maladie qu’elle avait dans le cœur » et dont le diable profite.
Revenant à Judas, le pape a continué : « quand il est allé au Temple mener une double vie », quand il a donné « le baiser au Seigneur dans le jardin » et ensuite « les pièces qu’il a reçu des prêtres… », « ce n’est pas une erreur. Il l’a fait… Il était dans l’obscurité ! Il avait le cœur divisé, dissocié. « Judas, Judas… », c’est pourquoi on peut dire qu’il « est l’image de la brebis perdue ».
Jésus, « le berger, va le chercher : « Fais ce que tu dois faire, mon ami » et il l’embrasse ». Mais Judas « ne comprend pas ». Et à la fin, quand il se rend compte de ce que « sa double vie a fait dans la communauté, le mal qu’il a semé, avec son obscurité intérieure, qui le poussait à échapper toujours, à la recherche de lumières qui n’étaient pas la lumière du Seigneur » – mais des « lumières artificielles » comme celle des « décorations de Noël » -, quand il comprend tout cela, à la fin, « il se désespère » comme « les brebis perdues qui n’acceptent pas les caresses du Seigneur ».
Le pape a évoqué le repentir de Judas: « le Seigneur est bon, même pour ces brebis » et il ne cesse jamais d’aller les chercher », et il y a « un mot qui dit que Judas s’est pendu, pendu et « repenti » : « Je crois que le Seigneur prendra ce mot et le portera avec lui, je ne sais pas, c’est possible, mais ce mot nous fait douter ». « Mais que signifie ce mot ? Que jusqu’à la fin l’amour de Dieu travaillait dans cette âme, jusqu’au moment du désespoir », a fait observer le pape, avant d’ajouter que telle est « l’attitude du bon pasteur avec les brebis perdues ».
C’est donc le fondement de « la joyeuse annonce qui nous apporte Noël et qui nous demande cette sincère exultation qui change le cœur, qui nous pousse à nous laisser consoler par le Seigneur et non par les consolations que nous allons chercher pour nous défouler, pour fuir la réalité, fuir la torture intérieure, la division intérieure ». La « joyeuse annonce », la « sincère exultation », la « consolation », « se réjouir dans le Seigneur », tout cela jaillit du fait que « le Seigneur vient avec puissance. Et quelle est la puissance du Seigneur ? Les caresses du Seigneur ! » Il est comme le bon pasteur qui « quand il a trouvé la brebis perdue, il ne l’a pas insultée, non », au contraire, il lui aura dit : « Mais tu as fait tant de mal ? Viens, viens… » Et de la même manière, « dans le jardin des olives », qu’a-t-il dit à la « brebis perdue », Judas ? Il l’a appellé « ami. Toujours les caresses ».
« Qui ne connaît pas les caresses du Seigneur ne connaît pas la doctrine chrétienne, a conclu le pape. Qui ne se laisse pas caresser par le Seigneur est perdu ». Et c’est précisément « cela, la joyeuse annonce, c’est la sincère exultation que nous voulons aujourd’hui. C’est la joie, c’est la consolation que nous cherchons : que le Seigneur vienne avec sa puissance que sont les caresses, pour nous trouver, nous sauver, comme la brebis perdue et nous rapporter dans le troupeau de son Église ».
Avec une traduction de Constance Roques

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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