Paradis Le bon berger de la création

Paradis Le bon berger de la création

Connaître, aimer et suivre le Pasteur ami, fort et bon, par Mgr Follo

Méditation des lectures du 4e Dimanche de Pâques

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IV Dimanche de Pâques – Année C –  11 mai 2025

Rite romain : Act 13, 14. 43-52; Ps 99; Ap 7, 9. 14-17; Jn 10, 27-30

Le Bon Pasteur

Rite ambrosien : Act 21,8b-14; Ps 15; Fil 1,8-14; Jn 15,9-17

Je vous ai appelé amis: Le Berger d’amis

  1) Le bon et fort Pasteur.

Dans l’Évangile de ce dimanche, Jésus dit : « Mes brebis entendent ma voix, je les connais et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle et ils ne seront pas perdus à jamais et personne ne les arrachera de ma main. Mon Père qui me les a donnés, est plus grand que tous et personne ne peut les arracher de la main du Père. Moi et le Père sommes un » (Jn 10, 27-30). 

Le Ressuscité utilise trois verbes importants : écouter, connaître et suivre. Aujour’hui encore, nous sommes invités à écouter la voix du Seigneur qui nous connaît – et donc nous aime – et à le suivre sur le chemin de l’humilité, comme nous le rappelle la prière du début de la Messe d’aujourd’hui, grâce à laquelle le Célébrant prie de cette manière : « Dieu tout-puissant et toujours vivant, conduis-nous à la communauté des joies célestes, afin que l’humilité du troupeau Lui parvienne à Lui duquel provient la puissance du Pasteur (c’est ma traduction de « Omnípotens sempitérne Deus, deduc nos ad societátem cæléstium gaudiórum, ut eo pervéniat humílitas gregis, quo procéssit fortitúdo pastóris ».

C’est le Christ ressuscité qui est le bon et fort Pasteur B qui nous conduit vers la joie des « pâturages d’herbes fraîches ». Il nous indique la bonne direction. Il nous donne le vrai sens de la vie et nous aide à la construire et à la réaliser en plénitude. C’est le Seigneur, c’est sa Parole. Nous pouvons sentir l’amour profond et concret de Jésus : il nous connaît, il nous connaît avec amour, « il connaît les pensées et les doutes de notre cœur, il vient nous chercher, toujours. Jésus nous connaît, prend soin de nous, nous guérit, nous met en sécurité dans la communauté des croyants sur cette terre, dans la béatitude des enfants de Dieu pour l’éternité. Jésus met tant de confiance en nous, il la renouvelle toujours et avec sa confiance nous pouvons faire beaucoup de choses. L’important est de Le suivre. Il est le chemin, la vérité, la vie. Comment pouvons-nous le suivre ? Dans la foi, dans l’amour, dans l’écoute de sa parole, dans la construction quotidienne de la réponse à la vocation qu’il nous a donnée, dans l’amour du prochain et des nécessiteux, dans le corps et l’esprit, parce que c’est dans notre prochain que Jésus est présent, il nous parle, il nous pousse à le suivre, le bon pasteur. 

Dans notre culture la figure du berger est presqu’inconnue et définir quelqu’un comme une brebis est une offense.
Au contraire, dans la Bible, l’élevage d’ovins est bien connu, et sa signification est positive et profonde. En effet, dans les Saintes Ecritures, Dieu lui-même est représenté sous les traits du berger qui conduit son peuple. « Le Seigneur est mon berger : je ne manque de rien » (Ps 23,1). « Il est notre Dieu ; nous sommes le peuple qu’il conduit » (Ps 95,7). Le futur Messie est lui aussi décrit sous les traits du berger: « Comme un berger il va paître son troupeau : son bras rassemble les agneaux, il les porte dans  son cœur, et il prend soin des brebis qui allaitent leurs petits » (Is 40,11). Cette image idéale du berger trouve sa pleine réalisation en Jésus-Christ. Celui-ci est le bon berger qui va à la recherche de la brebis égarée; il a pitié du peuple parce qu’il le voit « comme des brebis sans berger » (Mt 9,36); il appelle ses disciples « petit troupeau »  (Lc 12, 32). Pierre appelle jésus « le berger de nos âmes »  (1 Pt 2, 25) et la Lettre aux Hébreux « le grand berger des brebis »  ( 13,20).

Donc Jésus est le vrai Berger, car il est celui qui conduit avec amour son troupeau, qui veille à ce qu’il reste uni et  défend ses brebis des dangers. Le bon berger connaît chacune de ses brebis (elles ne sont pas anonymes) et il se préoccupe pour chacune d’elles, il les compte quand elles retournent à la bergerie afin qu’aucune ne soit perdue et s’il en manque une, il quitte les autres et va à la recherche de celle qui s’est égarée.

En appelant « brebis » ses disciples et amis, le Christ souligne la relation vitale qui les unit à lui. Cette relation de salut se traduira ensuite, pour nous chrétiens, par les verbes « ils écoutent et suivent », et pour Jésus, par le verbe « je connais ».

 

        1) Le  bon pasteur, passionné et attentionné

Jésus connaît et aime chacun de ses disciples. Et le fait de nous définir des « brebis » ne pourrait nous sembler étrange car lui-même s’est laissé définir un « agneau », et pour que sa tâche, celle d’ « enlever le péché du monde » devienne notre mission d’apporter son pardon à tout le peuple.

Dans l’Evangile d’aujourd’hui, Il parle de nous comme étant ses brebis et de lui-même comme étant le bon pasteur, qui donne la vie pour ses brebis… Des brebis auxquelles il ne renonce jamais et qu’il aime jusqu’à donner sa vie pour elles: animé par la passion pour nous , il n’a pas hésité à affronter la passion de la Croix. Il est un bon pasteur amoureux de la vie parce que nous avons la vie éternelle. On en vient à se demander tout naturellement comment nous faisons, nous les brebis, avec cette chance-là, à quitter cette Voie pour nous égarer sur les routes qui portent à des ravins … Heureusement lui, le Berger, immensément bon, nous cherche, nous appelle par notre nom et, après nous avoir trouvé, il nous met sur ses épaules et, en bon pasteur divin, miséricordieux, en amoureux fidèle, il nous conduit aux prés éternels du ciel (cf. 1 Pt 2,25).

Nous sommes dans les mains du Bon Berger, qui nous conduit avec amour un à un et nous introduit à la vraie vie, dans la vie des amis, comme l’évangile ambrosien nous le rappelle. Quant à nous, il ne suffira pas de dire que nous sommes des « amis » du Christ. La vraie amitié avec Jésus s’exprime dans la manière de le suivre: avec la bonté du cœur, avec humilité, avec douceur et miséricorde.

Suivre Jésus c’est engager notre volonté et  suivre Celui dont nous avons écouté et aimé la Parole de Vie. Derrière lui nos pas ne vacillent pas, Il nous conduira aux verts pâturages, et quand bien même nous devrions traverser une sombre vallée … nous n’aurions pas peur car il est avec nous (cf. Sal 23).

Mais pour suivre, il faut
écouter, en faisant travailler son esprit et son cœur. La vraie écoute est obéissance (étymologiquement le mot obéir vient du latin ob-oedire = prêter l’oreille), comme ont fait les apôtres qui sont ainsi devenus des pécheurs d’hommes et des pasteurs d’âmes. La vraie obéissance c’est donc prêter l’oreille et appliquer la parole d’amour que le Christ nous dit. L’obéissance doit être vécue en exécutant des gestes et avec le désir d’apprendre de Lui le critère de sa propre vie, en nous mettant dans les pas de la vérité, en nous laissant guider par l’amour d’un bon Berger, d’un vrai Ami.

 

        2) La vocation: un « espace » de liberté

Si les deux verbes « suivre » et « écouter », utilisés dans l’évangile romain d’aujourd’hui, sont des verbes qui indiquent un dialogue profond, une communion dans l’existence, pas seulement dans les idées, le troisième verbe « connaître » fonde la vocation des Apôtres et celle de chacun de nous. Celle-ci est appelée à une relation de communion entre Jésus et ses disciples et elle implique la personne toute entière: idées, amour, comportement. Un appel pour recevoir la vie : « Je leur donne la vie éternelle » et pour la partager avec l’humanité entière.

S’il existe deux notes pour caractériser, comme dit Jésus, ses brebis: écouter et suivre, avec une précision: écouter sa voix et suivre le chemin que lui même est en train de parcourir, se savoir connus et aimés du Christ veut dire ne pas garder ce don pour nous-mêmes. Avec cette connaissance du Christ nous sommes appelés à être « sel » et « lumière » pour le monde. Et puis il est vrai que ce monde est un monde qui change, comme on a l’habitude de dire aujourd’hui, mais cela n’est pas une raison pour perdre le souffle à rechercher de nouvelles idées, de nouveaux projets: la voix de Jésus a déjà résonné et la direction de sa marche est déjà tracée. A la communauté chrétienne il est demandé avant tout d’être fidèle à sa mémoire, et non d’être des génies qui inventent de nouveaux programmes pastoraux.

Un ami qui nous connaît et nous fait comprendre que le cœur est impliqué. On ne connaît vraiment que ce que l’on aime. C’est l’amour qui est capable d’aller au-delà de toute évidence. C’est une « connaissance » de l’intérieur, qui part de l’intime. C’est connaître la Vie, la Vérité en suivant la Voie. C’est une connaissance dans l’Amour, qui libère.

Maintes fois, Jésus  dit que sa liberté ne consiste pas à prendre ses distances du Père, mais à faire toute sa volonté. Liberté et obéissance au Père (qui est toujours l’obéissance au don de soi) coïncident. Le vrai espace de la liberté c’est l’amour, auquel le Christ nous appelle. La vocation est un don à accueillir avec stupeur: « L’émerveillement pour le don que Dieu nous a fait dans le Christ imprime à notre existence un dynamisme nouveau qui nous engage à être témoins de son amour. Nous devenons témoins lorsque, par nos actions, nos paroles et nos comportements, un Autre transparaît et se communique. On peut dire que le témoignage est le moyen par lequel la vérité de l’amour de Dieu rejoint l’homme dans l’histoire, l’invitant à accueillir librement cette nouveauté radicale. Dans le témoignage, Dieu s’expose, pour ainsi dire, au risque de la liberté de l’homme. ». (Benoît XVI, Exhort. Post-Synod. Sacramentum caritatis, n. 85).

Aujourd’hui, nous célébrons le dimanche du Bon Pasteur qui est consacré aux vocations sacerdotales, mais nous ne devons pas oublier les vocations religieuses, car qui s’engage à suivre le Christ dans la pauvreté, l’obéissance et la chasteté, rappelle à tout le Peuple de Dieu que : « La pauvreté, la chasteté, l’obéissance ne valent rien tant que qu’elles ne sont pas expressions d’amour, de cet amour en somme qui nous dépouille dans la pauvreté, qui nous purifie dans la chasteté, qui nous immole dans l’obéissance ». (Divo Barsotti). Les Vierges consacrées en particulier vivent cela en se conformant chaque jour davantage à la prière que l’Évêque a faite pour elles le jour de leur consécration: « Conduis-les sur le chemin du salut, pour qu’elle désirent ce qui te plaît et veillent toujours à y répondre. Par Jésus-Christ, notre Seigneur » (RCV, n21).

  Ainsi les vierges consacrées vivent ce que le Pape François appelle « l’essence des « trois regards » du Seigneur sur Pierre : « Le premier, le regard du choix, avec l’enthousiasme de suivre Jésus ; le second, le regard de la repentance après le péché si grave par lequel il a renié Jésus ; le troisième regard est le regard de la mission : «  Sois le berger de mes agneaux ; sois le pasteur de mes brebis; sois le berger de mes brebis » (cf. 21, 15-17)

Dans leur regard virginal se reflète le regard du Christ : un regard pur, un regard qui pénètre mais ne juge pas, un regard qui voit au-delà des apparences, des comportements, des attitudes et qui va droit au cœur de la personne, dans le sens où il parvient à voir la beauté originelle, il gère et voit ce qui la constitue. Jésus parvient à lire dans les gens la nostalgie de la bonté et de la beauté, il parvient à surmonter la couverture noire du péché qui entoure l’interlocuteur et voit la beauté de la créature, du sommet de la création, de celui qui est fait à l’image de Dieu, de l‘Amour. 

 

I 

Deux suggestions :

Une prière et une lecture.

Dans cette marche vers le ciel, Jésus,  vrai berger et passionné, nous guide d’un amour providentiel, nous pouvons dire ces paroles de prière: « Guide-moi, ô tendre lumière, au milieu de ces ombres. Guide-moi plus avant ! La nuit est sombre, et je suis loin de ma demeure.
Que m’importe de voir le lointain horizon ? Un seul pas me suffit. Trop longtemps, j’en suis sûr, m’a béni Ta puissance pour n’être plus mon Guide, parmi lande et marais, et rocher et torrent, tant que dure la nuit. Oublie tout ce passé:
 Je ne, t’ai pas toujours priée, comme aujourd’hui, d’être ainsi, Toi, mon Guide. J’aimais alors choisir et connaître ma route, désormais, sois mon Guide ! » (Bienheureux J. H. NEWMAN).

Lecture Patristique

Le Christ, bon pasteur

Des « Homélies sur les évangiles » de saint Grégoire le Grand pape

(Hom. 14, 3-6; PL 76, 1129-1130)

«Je suis le Bon Pasteur.» Et il ajoute : « Je connais mes brebis — c’est-à-dire : je les aime — et mes brebis me connaissent» (Jn 10, 14), comme pour dire clairement : «Elles me servent en m’aimant». Car il ne connaît pas encore la Vérité, celui qui ne l’aime pas.
 Maintenant que vous avez entendu, frères très chers, voyez si vous êtes de ses brebis, voyez si vous le connaissez, voyez si vous percevez la lumière de la Vérité. Précisons : si vous la percevez, non par la seule foi, mais par l’amour. Oui, précisons : si vous la percevez, non en vous contentant de croire, mais en agissant. En effet, le même évangéliste Jean qui parle dans l’évangile de ce jour déclare ailleurs : «Celui qui dit connaître Dieu, mais ne garde pas ses commandements, est un menteur.» (1 Jn 2, 4). C’est pourquoi ici le Seigneur ajoute aussitôt : «Comme le Père me connaît et que je connais le Père. Et je donne ma vie pour mes brebis.» (Jn 10. 15). C’est comme s’il disait clairement : « Ce qui prouve que je connais le Père et que je suis connu du Père, c’est que je donne ma vie pour mes brebis; je montre combien j’aime le Père par cette charité qui me fait mourir pour mes brebis ». C’est de ces brebis que le Seigneur dit ailleurs : «Mes brebis écoutent ma voix, et je les connais, et elles me suivent, et je leur donne la vie éternelle.» (Jn 10, 14-16). C’est d’elles qu’il déclare un peu plus haut : «Si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé, et il entrera et il sortira, et il trouvera des pâturages.» (Jn 10, 9). Il entrera en venant à la foi; il sortira en passant de la foi à la vision face à face, de la croyance à la contemplation; et il trouvera pour s’y rassasier des pâturages d’éternité. Les brebis du Seigneur trouvent des pâturages, puisque tous ceux qui le suivent d’un cœur simple se rassasient en pâturant dans des prairies éternellement vertes. Et quels sont les pâturages de ces brebis, sinon les joies intérieures d’un paradis à jamais verdoyant? Car les pâturages des élus sont la présence du visage de Dieu, dont une contemplation ininterrompue rassasie indéfiniment l’âme d’un aliment de vie. Ceux qui ont échappé aux pièges du plaisir fugitif goûtent, dans ces pâturages, la joie d’un éternel rassasiement. Recherchons donc, frères très chers, ces pâturages où nous partagerons la fête et la joie de tels concitoyens. Le bonheur même de ceux qui s’y réjouissent nous y invite. Réveillons donc nos âmes, mes frères! Que notre foi se réchauffe pour ce qu’elle a cru, et que nos désirs s’enflamment pour les biens d’en haut : les aimer, c’est déjà y aller. Ne laissons aucune épreuve nous détourner de la joie de cette fête intérieure : lorsqu’on désire se rendre à un endroit donné, la difficulté de la route, quelle qu’elle soit, ne peut détourner de ce désir. Ne nous laissons pas non plus séduire par les caresses des réussites2. Combien sot, en effet, est le voyageur qui, remarquant d’agréables prairies sur son chemin, oublie d’aller où il voulait. ».

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Mgr Francesco Follo

Mgr Francesco Follo est ordonné prêtre le 28 juin 1970 puis nommé vicaire de San Marco Evangelista à Casirate d’Adda de 1970 à 1976. Il obtient un doctorat en Philosophie à l’Université pontificale grégorienne en 1984. De 1976 à 1984, il travaille comme journaliste au magazine Letture du Centre San Fedele de la Compagnie de Jésus (jésuites) à Milan. Il devient membre de l’Ordre des journalistes en 1978. En 1982, il occupera le poste de directeur-adjoint de l’hebdomadaire La Vita Cattolica. De 1978 à 1983, il est professeur d’Anthropologie culturelle et de Philosophie à l’Université catholique du Sacré Cœur et à l’Institut Supérieur des Assistant Educateurs à Milan. Entre 1984 à 2002, il travaille au sein de la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège, au Vatican. Pendant cette période il sera professeur d’Histoire de la Philosophie grecque à l’Université pontificale Regina Apostolorum à Rome (1988-1989). En 2002, Mgr Francesco Follo est nommé Observateur permanent du Saint Siège auprès de l’UNESCO et de l’Union Latine et Délégué auprès de l’ICOMOS (Conseil international des Monuments et des Sites). Depuis 2004, Mgr Francesco Follo est également membre du Comité scientifique du magazine Oasis (magazine spécialisé dans le dialogue interculturel et interreligieux). Mgr Francesco Follo est Prélat d’Honneur de Sa Sainteté depuis le 27 mai 2000.

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