"Nous avons tous en nous un champ de bataille"

Dialogue du pape François avec des petits chanteurs (3/3)

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Le pape a reçu dans la salle Paul VI au Vatican, ce 31 décembre, les quelque 6 000 participants du 40e congrès international des Pueri Cantores, réunis à Rome du 28 décembre 2015 au 1er janvier 2016.

Le pape François a dialogué librement avec les jeunes, répondant à trois séries de questions. Voici sa réponse à la troisième série de questions.

 

Troisième question – Quand vous étiez petit, vous rêviez de devenir quoi plus tard ? Le soir, quand je regarde la télévision avec ma famille, je vois tant d’histoires tristes, dramatiques : le monde sera-t-il toujours comme ça, quand je serai grand aussi ?

Pape François – Pour la première question, si je vous disais la vérité, je vous ferais rire… Mais je dirai la vérité. La question était : « Quand vous étiez petit, vous rêviez de devenir quoi ? » Petit, j’allais souvent avec ma grand-mère, avec ma mère aussi, faire les courses au marché. A cette époque, il n’y avait pas de supermarchés, par de télévision non plus, il n’y avait rien… Le marché était dans la rue et il y avait des étals pour les légumes, les fruits, la viande, le poisson. On achetait de tout. Un jour, à la maison, à table, on m’a demandé : que voudrais tu-faire plus tard ? Vous savez ce que j’ai dit ? « Boucher. » Pourquoi ? Parce que le boucher qui était au marché – il y avait trois ou quatre étals pour la viande – prenait un couteau, coupait des morceaux…c’est un art, et j’aimais voir ça. Maintenant j’ai changé d’avis, bien entendu ; mais pour répondre à ta question, quand j’étais petit je rêvais  de devenir boucher. Cela m’aurait plu.

Puis la seconde question – celle-là est sérieuse ! – : « Le soir, alors que je dîne avec ma famille, en regardant la télévision, j’entends parler de nouvelles tristes et dramatiques… Mais le monde sera-t-il toujours comme ça, quand je serai grand aussi ? » C’est vrai ce que tu dis. Il y a beaucoup de gens qui souffrent dans le monde aujourd’hui. Il y a les guerres. Mais combien de guerres y a-t-il ? En Afrique, vous n’imaginez pas combien il y en a. Le Moyen-Orient, là où est né Jésus, c’est la guerre partout. En Ukraine, la guerre. Dans tant d’endroits. En Amérique latine il y a des guerres. C’est vraiment moche ! Et que font les guerres ? Elles sèment la pauvreté, la souffrance, elles font mal. Que des choses tristes… Pensez aux enfants. Vous les enfants, jeunes garçons et jeunes filles, vous avez ce don de Dieu de pouvoir chanter, d’être heureux, de vivre la vie chrétienne comme disait saint Augustin – que disait saint Augustin ? [Réponse des enfants : « Chante et marche ! »] –, mais il y a des enfants, dans le monde, qui n’ont rien à manger, qui ne peuvent pas aller à l’école, parce qu’il y a la guerre, la pauvreté, et pas d’écoles ; il y a des enfants qui, quand ils tombent malades, n’ont pas la possibilité d’aller à l’hôpital. Priez pour ces enfants. Priez ! Mais le monde sera-t-il toujours comme ça ? Il peut s’améliorer. Mais il y a une chose dont on n’aime pas parler mais dont il faut parler : dans le monde il y a la lutte entre le bien et le mal – disent les philosophes –, la lutte entre le diable et Dieu. Ça existe toujours. Quand, à chacun de nous, vient l’envie de faire une méchanceté, cette petite méchanceté est une inspiration du diable qui, à travers la faiblesse que nous a laissée le péché originel, t’amène à cela. On commet le mal dans les petites comme dans les grandes choses ; dans les guerres, comme – par exemple – un garçon ou une fille qui ment : c’est une guerre contre la vérité de Dieu, contre la vérité de la vie, contre la joie. Cette lutte entre le diable et Dieu, dit la Bible, continuera jusqu’à la fin. Est-ce clair ? Vous avez compris ? Nous avons tous en nous un champ de bataille. On lutte entre le bien et le mal, tout le monde. Nous avons des grâces et des tentations, et devons parler avec le curé, avec le catéchiste de ces choses pour bien les connaître. Ça c’est la première chose.

Deuxièmement : il y a tant de bonnes choses dans le monde, et je me demande: pourquoi ne pas le faire savoir ? Parce qu’on dirait que les gens préfèrent voir des choses méchantes ou entendre de mauvaises nouvelles. Pensons à l’Afrique : tant de méchancetés, tant de guerres – comme j’ai dit – mais il y a des missionnaires, des prêtres, des religieuses, qui ont dépensé toute leur vie là-bas, prêchant l’Evangile, dans la pauvreté… Quand le mois dernier je suis allé en Afrique, j’ai trouvé des petites sœurs… je pense à une sœur italienne de 83 ans qui m’a dit : « Je suis ici depuis l’âge de 26 ans. » Et il y a tant de saintes familles, tant de parents qui élèvent bien leurs enfants. Pourquoi ne voit-on pas à la télévision une famille qui élève bien ses enfants, qui éduque bien son enfant ? On n’en voit pas ! Parce qu’il y a une attirance pour le mal : on dirait que regarder ce qui est moche plaît davantage que regarder ce qui est beau, les grandes choses. Le diable joue son rôle – c’est vrai –, mais Dieu aussi joue son rôle : que de saintes personnes ! Pas seulement dans les missions mais dans le monde, dans le travail, dans les familles ; tant de parents, tant de grands-parents avec des maladies à supporter, des problèmes ; et ça on ne le voit pas à la télé. Pourquoi ? Parce que ça ne rapporte pas, ne fait pas publicité… Ici, en Italie, j’ai découvert tant d’associations, d’hommes et de femmes, qui donnent une partie de leur temps pour assister, accompagner des malades, s’occuper d’eux. C’est bien. Mais on ne le voit pas dans la publicité. Pas vrai ? Si tu veux avoir du rating – en journalisme, à la télé, ou ce que tu veux – ne fais voir que les mauvaises choses ; les bonnes choses ennuient les gens. Ou bien ils ne savent pas présenter et bien faire les choses, ne savent pas bien faire voir les bonnes choses.

Quand tu regardes la télévision [le pape s’adresse à la petite fille qui a posé la question] chez toi, souviens-toi de ces deux choses : il y a une lutte entre le bien et le mal, tant d’enfants qui souffrent, des guerres, de mauvaises choses parce que la lutte est entre Dieu et le diable ; mais pense aussi à toutes ces saintes personnes, tant de personnes, qui donnent leur vie pour aider les autres, pour prier pour les autres. Mais pourquoi ne voit-on pas à la télévision les religieuses cloîtrées qui passent leur vie à prier pour tout le monde ? Parce que ça n’intéresse pas… regarder les bijoux d’une célèbre enseigne est probablement plus intéressant, alors on les montre… on montre les choses qui flattent notre vanité. Ne nous laissons pas berner ! Le monde est plein de choses moches, moches, moches, c’est le diable qui agit contre Dieu ; mais il y a aussi de très bonnes choses, des choses saintes qui sont œuvre de Dieu. Il y a les saints cachés. N’oublions pas ce mot : saints cachés, ces saints qu’on ne voit pas. Entendu?

Je vous remercie pour tout. Mais je voudrais entendre une autre chanson pour dire si j’aime ou pas comment vous chantez… Et autre chose : je voudrais entendre répéter comment était la vie chrétienne selon saint Augustin ? Comment doit-elle être ? [Réponse des enfants : « Chante et marche ! »] Chante et marche ! Deuxièmement : qui est bon ? [« Seul Dieu est bon. »]

Voilà. Et maintenant j’attends une belle chanson… Merci !

© Traduction de Zenit, Océane Le Gall

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ZENIT Staff

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