ROME, Jeudi 6 septembre 2007 (ZENIT.org) – Le 22 avril 2001, les deux présidents et secrétaires de la Conférence des Eglises européennes (KEK) et du Conseil des Conférences épiscopales d’Europe (CCEE) signaient la « Charte Œcuménique: Lignes directrices en vue d’une collaboration croissante entre les Eglises en Europe », la confiant symboliquement aux jeunes chrétiens et la remettant aux Eglises afin qu’elles s’imprègnent de son esprit et s’inspirent de son contenu et des engagements énoncés. Il s’agit d’une sorte de Magna Carta sur la manière de servir Dieu en s’intéressant aux problèmes et aux nécessités des hommes et des femmes de notre société contemporaine, qui interpellent les Eglises et les communautés chrétiennes en vue d’écrire ensemble une nouvelle page d’unité.
Cette charte est née dans le sillage des deux rassemblements œcuméniques européens tenus à Bâle (Suisse), en mai 1989, sur le thème « Paix et justice pour la création entière », et à Graz (Autriche), en juin 1997, sur le thème « Réconciliation, don de Dieu et source de vie nouvelle ».
Articulé autour de douze paragraphes, le document énonce les principes sur lesquels doit se baser une culture œcuménique tous azimuts ainsi qu’une vaste collaboration entre les Eglises d’Europe: de l’unité de la foi à l’annonce commune de l’Evangile, de l’ouverture mutuelle et du dialogue à l’action et à la prière commune, de l’engagement à donner un visage à l’Europe et à réconcilier les peuples et les cultures, jusqu’à la sauvegarde de la création et aux rapports interreligieux avec l’hébraïsme, l’islam et les autres religions ou croyances du monde.
Ce document, prévient-on dans le prologue de la Charte, ne revêt « aucun caractère magistériel, dogmatique ou canonique ». « Son caractère obligatoire consiste plutôt dans le devoir que se s’imposent les Églises elles-mêmes et les organisations œcuméniques signataires », précise le texte en insistant sur l’importance d’un engagement commun.
A noter cependant le caractère ouvert de cette Charte qui invite les Eglises et les organisations œcuméniques à « formuler, sur la base de ce texte, des adjonctions propres et des perspectives communes qui se conjuguent concrètement avec leurs défis particuliers et les obligations qui en découlent ».
Le document a été traduit dans une trentaine de langues, dont l’arabe et l’esperanto, sous la direction des Eglises et des autres organisations œcuméniques locales.
Il est le fruit d’une collaboration entre le CCEE, un organisme fondé en 1971 qui réunit les présidents de 34 conférences épiscopales catholiques et la KEK, fondée en 1959, en pleine guerre froide, qui regroupe 126 églises différentes (catholiques, anglicans, baptistes, luthériens, méthodistes, orthodoxes, pentecôtistes et réformés) et 43 organisations associées de tous les pays d’Europe.
Un Comité rédactionnel composé de six représentants du KEK et du CCEE avait élaboré, en octobre 1998 à Cartigny, près de Genève, une première mouture qui, en mai 1999, à Graz, fut revue et réélaborée par un groupe plus large de 40 représentants.
Successivement, en juillet 1999, les deux organisations ont envoyé à toutes les Eglises membres et à toute les Conférences épiscopales d’Europe un projet de Charte, les invitant à donner leur avis. Les quelques 150 suggestions émises par les Eglises furent prises en considération dans l’élaboration du document final.
A sa sortie, le document a été accueilli comme un signe d’éloquence prophétique dans le processus d’unification de l’Europe en cours et dans la prise de conscience des racines chrétiennes du Vieux continent.
Au regard du défi posé par l’évangélisation et devant l’exigence de réconciliation entre les chrétiens, cette Charte avait par ailleurs toute sa place, en lien avec sa situation historique et les exigences contenues dans l’Evangile, renforçant ainsi la crédibilité des Eglises qui ont pour rôle d’annoncer et de témoigner la vie chrétienne.
Une urgence dont Jean-Paul II s’était fait l’écho à Bucarest, le 8 mai 1999: « Qu’est-ce qui peut inciter les hommes d’aujourd’hui à croire en Lui, si nous continuons à déchirer la tunique sans couture de l’Église ?.. Qui nous pardonnera ce manque de témoignage? ».
A cet égard, une recommandation spécifique avait été faite aux Eglises d’Europe, à l’occasion du deuxième rassemblement œcuménique européen de Graz. Les églises étaient invitées à « rédiger une charte commune des droits et des devoirs œcuméniques fondamentaux, et à se mettre d’accord sur une série de directives, règles et critères, afin d’aider les Églises, leurs responsables et tous leurs membres, à distinguer entre le prosélytisme et le témoignage chrétien, entre le fondamentalisme et la vraie fidélité à la foi, et de donner enfin aux relations entre Églises majoritaires et minoritaires une forme qui s’accorde avec l’esprit œcuménique ».
En réalité, les dialogues qui ont suivi le rassemblement de Graz n’ont pas permis d’élaborer un texte commun sur la question du discernement entre prosélytisme et témoignage chrétien, et la Charte oecuménique n’affronte pas la question.
D’emblée, le document précise que l’Europe est celle qui va « de l’Atlantique à l’Oural, du Cap Nord à la Méditerranée » et met l’accent sur la contribution des Eglises à la « réconciliation entre les peuples et les cultures », qui nécessite un engagement pour la paix, la justice et la sauvegarde de la création.
Dans le premier chapitre de la Charte nous trouvons l’expression: « Jésus-Christ, sur la croix, nous a révélé son amour et le mystère de la réconciliation. A sa suite, nous voulons faire tout notre possible pour surmonter les problèmes et les obstacles qui séparent encore les Eglises ».
La Charte oecuménique n’est donc pas un texte mais un processus qui s’appuie sur cette constatation: « La communauté œcuménique se trouve à l’heure actuelle confrontée à une situation difficile résultant de divers facteurs. Cet état de fait nécessite des contre-stratégies conscientes. Il semble nécessaire de promouvoir une culture œcuménique pour vivre et travailler ensemble, et il est indispensable de lui offrir une base solide ».