Symposium sur le sacerdoce, 7 fév. 2022© Vatican Media

Symposium sur le sacerdoce, 7 fév. 2022© Vatican Media

Pour identifier la racine des différents abus, par le card. Ouellet

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Symposium sur le sacerdoce dans l’Eglise catholique

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 » J’ai cru nécessaire d’organiser un événement comme celui-ci pour faire le point sur les études sociologiques en cours et analyser les causes historiques, culturelles et aussi théologiques qui pourraient révéler la racine de ce que le Pape François appelle le « cléricalisme ». Ce terme est un mot générique et en même temps concret, qui décrit un ensemble de phénomènes : abus de pouvoir, abus spirituel, abus de conscience, dont l’abus sexuel n’est que la pointe de l’iceberg, visible et pervers, qui émerge de déviations plus profondes à identifier et à démasquer« : le cardinal Marc Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, a expliqué, dans son discours inaugural, les raisons de la tenue d’un symposium intitulé « Pour une théologie fondamentale du sacerdoce » (Vatican, 17-19 février 2022), ce jeudi 17 février, dans la Salle Paul VI du Vatican.

Il situe la tenue de ce symposium, qui rassemble quelque 500 participants – évêques, prêtres, consacrés… -, dans le cadre de la crise des abus: « Que peut-on attendre d’une « théologie fondamentale du sacerdoce » dans le contexte historique actuel, dominé par le drame des abus sexuels perpétrés par des clercs ? Ne faudrait-il pas plutôt s’abstenir de parler du sacerdoce, alors que des péchés et des crimes de ministres indignes font la une de la presse internationale, pour avoir trahi leur engagement ou pour avoir couvert honteusement les coupables de telles dépravations ? Ne faudrait-il pas plutôt se taire, se repentir et rechercher les causes de tels méfaits ? »

Voici notre traduction rapide, de travail de l’allocution du cardinal Ouellet, d’après le texte original en italien.

AB

Discours du card. Ouellet

« « Priez donc le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson ! (Mt 9, 38) » » Le Seigneur appelle des ouvriers de toutes sortes pour travailler à sa vigne. Certains sont embauchés tôt le matin, d’autres en milieu de journée, d’autres encore à la dernière heure ; tous reçoivent un juste salaire, non pas en argent selon les critères de ce monde, mais en communion avec le Maître, dont la gentillesse et la générosité sont inégalables.

Que peut-on attendre d’une « théologie fondamentale du sacerdoce » dans le contexte historique actuel, dominé par le drame des abus sexuels perpétrés par des clercs ? Ne faudrait-il pas plutôt s’abstenir de parler du sacerdoce, alors que des péchés et des crimes de ministres indignes font la une de la presse internationale, pour avoir trahi leur engagement ou pour avoir couvert honteusement les coupables de telles dépravations ? Ne faudrait-il pas plutôt se taire, se repentir et rechercher les causes de tels méfaits ?

Nous sommes tous déchirés et humiliés par ces questions cruciales qui nous interrogent chaque jour en tant que membres de l’Église de Jésus-Christ. Cette occasion est propice pour exprimer nos sincères regrets et demander à nouveau pardon aux victimes, qui souffrent de leur vie détruite par des comportements d’abus et criminels, restés trop longtemps cachés et traités avec légèreté, du fait de la volonté de protéger l’Institution et les coupables au lieu des victimes. Ce symposium prend acte de la clameur et de la colère du peuple de Dieu ; nous sommes donc ici pour unir notre voix à celle de ceux qui revendiquent vérité et justice, et pour élever une prière vers le Maître de la moisson afin d’obtenir la grâce de répondre adéquatement aux défis posés par la crise sacerdotale de notre temps.

A ce sujet, j’ai cru nécessaire d’organiser un événement comme celui-ci pour faire le point sur les études sociologiques en cours et analyser les causes historiques, culturelles et aussi théologiques qui pourraient révéler la racine de ce que le Pape François appelle le « cléricalisme ». Ce terme est un mot générique et en même temps concret, qui décrit un ensemble de phénomènes : abus de pouvoir, abus spirituel, abus de conscience, dont l’abus sexuel n’est que la pointe de l’iceberg, visible et pervers, qui émerge de déviations plus profondes à identifier et à démasquer.

Chers amis, je crois sincèrement que nous n’avons pas encore les outils pour cet exercice douloureux et pourtant nécessaire, pour cet examen de conscience théologique, spirituel et pastoral.

Nous devons nous y préparer par des étapes de réflexion qui reconstruisent d’abord l’horizon global du sacerdoce et les dimensions complémentaires de sa médiation ; à la base de ces phénomènes il y a en fait un déséquilibre, la surestimation d’une forme de sacerdoce au détriment de l’autre forme, baptismale, hélas presque oubliée dans le monde catholique !

Historiquement, la défense par le Magistère du sacerdoce ministériel, en opposition à la Réforme protestante, a laissé dans l’ombre l’autre dimension essentielle, entérinant en quelque sorte une mentalité cléricale de pouvoir et une attitude de contrôle excessif des clercs sur l’ensemble de la communauté ecclésiale. La recherche synodale en cours réveille l’espérance d’un nouvel équilibre.

L’objectif de ce Symposium est d’approfondir cet horizon global du sacerdoce du Christ donné à partager d’abord aux baptisés, puis aux ministres ordonnés, afin que les relations concrètes entre les différents membres du Peuple de Dieu s’y inscrivent activement dans le cadre d’une ecclésiologie de communion, avec un engagement fondamental et multiforme qui conduise à une Église synodale.

L’Esprit Saint appelle l’Église du troisième millénaire à être synodale et à universaliser ainsi sa mission en annonçant la Bonne Nouvelle comme un Peuple en chemin dans l’histoire, comme un Corps articulé qui s’appuie sur chacun de ses membres pour offrir l’Évangile à toute l’humanité.

Redécouvrir l’horizon global du sacerdoce dans ses deux formes de participation – baptismale et ministérielle -, à l’unique sacerdoce du Christ, est la condition préalable à une analyse théologique complète de la tragédie des abus ; cela permet aussi d’aborder la question du rôle des femmes dans l’Église d’une manière plus ouverte et plus sensible à la dimension charismatique de la communauté ; cela devrait aussi encourager et soutenir l’enthousiasme pour toutes les vocations, grâce à une vision attractive de leur communion. Pourquoi ne pas permettre, dans un monde saturé de mauvaises nouvelles, que la joie et l’enthousiasme de suivre le Christ aient leur place ?

Nous sommes extrêmement honorés et encouragés, Saint-Père, par votre présence à l’ouverture de cet événement, que vous soutenez depuis le début. En vous remerciant de tout cœur, je remercie également et je souhaite la plus cordiale bienvenue à vous tous qui vous êtes inscrits malgré les incertitudes de la pandémie. Je salue à nouveau tous ceux qui suivront cette rencontre en mode virtuel.

Très Saint-Père, nous avons hâte de vous écouter et de nous laisser stimuler pour marcher dans le sens de votre discernement de l’Esprit Saint à l’œuvre aujourd’hui pour une conversion missionnaire de l’Église.

Avec vous, nous prions le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson.

Card. Marc Ouellet

Préfet de la congrégation pour les évêques

 

© Traduction de Zenit, Anita Bourdin

 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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