Cardinal Bo @ Fides.org

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Myanmar: «Nous travaillerons pour la paix et le dialogue entre les religions», déclare le card. Bo

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Entretien du card. Bo à l’agence catholique italienne SIR

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« Notre pays a besoin de paix », a scandé le cardinal Charles Bo, archevêque de Rangoun, dans un entretien à l’agence catholique italienne SIR, alors que le pape François s’apprête à se rendre dans le pays du 27 au 30 novembre 2017 : ce sera le premier voyage d’un pape au Myanmar.
Interrogé sur les attentes des 700 000 catholiques du Myanmar, le cardinal a souligné « le grand amour » du peuple birman pour le pape François qui, a-t-il dit, arrivera parmi eux en pèlerin de paix pour apporter « le début d’une nouvelle ère de paix ».
C’est en effet le thème du voyage : Paix et Amour. Le Pape est un leader mondial, sa visite aidera d’autres personnes religieuses, spécialement la majorité bouddhiste, à mieux comprendre l’Eglise, estime l’archevêque : « On a grand besoin d’amour et de paix, à tous les niveaux, a poursuivi le cardinal Bo : famille, communauté, nation. Nos gens ont un riche patrimoine ethnique et beaucoup ont été discriminés. Que de réfugiés et personnes déplacées ! La présence du pape sera donc une guérison pour notre peuple bien-aimé ».
Au Myanmar, le pape rencontrera également les moines bouddhistes (la religion majoritaire est le bouddhisme theravada) et d’autres chefs religieux. Il apportera le message que « les religions peuvent s’unir pour construire la paix ».
Le cardinal Bo est convaincu que la personnalité et le message du pape « dénoueront les cœurs des personnes intransigeantes qui abusent de la religion, et parviendra à faire de leur religion un outil de paix ».
Après sa visite, prévoit l’archevêque de Rangoun, l’Eglise au Myanmar travaillera dur pour mettre en place des initiatives interreligieuses : « Nous travaillerons pour la paix et l’amitié entre les communautés. L’Eglise catholique s’est gagnée la confiance de toutes les communautés et peut les mobiliser en faveur de la paix ».
La situation des Rohingyas, triste et complexe
L’exode des Rohingyas « est très triste et émouvante » mais la situation au Myanmar est compliquée car la population a le sentiment que «  de violents extrémistes provenant de Syrie sont en train de venir au Myanmar pour ouvrir un nouveau front », fait observer l’archevêque. Pour lui, la solution serait que le gouvernement s’ouvre aux « droits des minorités » et que la communauté internationale « comprenne la complexité de la situation » : « Au cours de ces 60 dernières années, notre population a subi les effets d’une économie fondée sur la favoritisme et l’exploitation des ressources naturelles, a-t-il expliqué. Ces deux maux ont appauvri 80% de la population, dont 40% sont dans une pauvreté absolue. La pauvreté est une réalité asphyxiante. Le sentiment d’injustice a poussé tant de groupes à chercher des solutions, tantôt pacifiques, tantôt conflictuelles par le biais des armes. Le prix payé est très élevé : des milliers de réfugiés et des centaines de victimes ». « Nos gens appartiennent à des minorités ethniques », a poursuivi le cardinal Bo.
Pour eux, « les droits économiques, sociaux et culturels sont importants et tristement absents », et « c’est ce qui exacerbe les conflits, devenus alors chroniques ». La crise des Rohingya, par exemple, « est un sujet très compliqué – a expliqué l’archevêque de Rangoun, rendu encore plus compliqué par les médias.
Le Myanmar compte environ un million de personnes déplacées à l’intérieur du pays. Les Kachin, en majorité chrétiens, vivent dans des camps de réfugiés, rappelle le cardinal Bo, qui regrette que les médias internationaux se concentrent uniquement sur la question des Rohingyas, et oublient les autres tristes crises humanitaires. Il évoque les chrétiens d’origine indienne « qui n’ont pas le droit à la citoyenneté, alors qu’ils vivent ici depuis plus de quatre générations ».
Pour le cardinal birman le gouvernement – « qui aurait pu mieux gérer la situation » -, a « un rôle limité pour gérer le pays », l’action des militaires sur le terrain lui échappe sous tant de formes ».
L’archevêque explique aussi que la population soutient l’action de l’armée dans l’Etat de Rakhine (où des attaques terroristes ont mis le feu aux poudres et déclenché la persécution) à cause de la « perception que de violents extrémistes provenant de Syrie sont en train de venir au Myanmar pour ouvrir un nouveau front ».
La solution consisterait, pour le cardinal Bo, à ce que « chacun comprenne vraiment la situation sur le terrain, sans s’empresser de condamner. Le gouvernement de Myanmar doit comprendre que les lois sur les droits de citoyenneté doivent être revues par des corps neutres. La communauté internationale doit comprendre la peur de la population du Myanmar et du gouvernement face à des réactions radicales provenant de l’extérieur ».
Le rôle de Aung San Suu Kyi
Aung San Suu Kyi est « comme une infirmière qui doit s’occuper d’un patient qui sort d’une grave maladie. Le Myanmar a souffert de totalitarisme pendant 60 ans », rappelle le cardinal Charles Bo, toujours à propos de la question musulmane dans l’Etat de di Rakhine : « Il est vrai qu’elle a tardé à se prononcer (…). Elle a promis de remettre à la justice tous ceux qui ont violé la loi et les droits humains. Mais la tâche est ardue. Malheureusement, elle a été stigmatisée par les médias internationaux. Mais un vide de pouvoir pourrait être utile à l’armée et la nation pourrait revenir à la triste époque de jadis ».
C’est pourquoi, explique-t-il, la majorité des citoyens du pays la soutient ». L’histoire la jugera, affirme le cardinal Bo. Et de poursuivre : « Tant de partisans occidentaux lui ont retirés leur soutien. Elle a besoin d’eux et eux ont besoin d’elle si une vraie démocratie devait refleurir dans cette nation. Elle a 72 ans et a besoin de toutes nos prières et de toute notre aide ».
L’archevêque fait aussi remarquer que la ministre « a pris les rênes du pays il n’y a que 18 mois. Il y des défis énormes à relever, et il lui faut passer par une boucle très serrée. Un mauvais pas peut coûter cher. Tout le monde devrait comprendre que pour traiter avec l’armée il faut une grande démocratie. L’armée a pris deux fois le contrôle du gouvernement. En 1990, quand Aung San Suu Kyi obtint une victoire écrasante, l‘armée refusa de la reconnaître et la renvoya en pison. Elle veut que la démocratie se stabilise, c’est pourquoi elle a besoin de la bonne volonté de l’armée ».

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Océane Le Gall

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