ROME, Lundi 30 novembre 2009 (ZENIT.org) - Au Sri Lanka, un prêtre catholique apporte secours et réconfort à d'anciens soldats des Tigres tamouls, rapporte aujourd'hui « Eglises d'Asie » (EDA), l'agence des Missions étrangères de Paris (MEP).  

Depuis la fin des combats en mai dernier et le désarmement des Tigres tamouls, des camps spéciaux ont été montés par les autorités sri-lankaises afin de détenir les anciens soldats du LTTE (Tigres de libération de l'Eelam tamoul) dans des lieux distincts de ceux où ont été parquées les populations civiles ayant fui les combats. Selon un prêtre catholique qui a été autorisé à pénétrer dans les camps, les ex-soldats tamouls vivent dans des conditions très difficiles ; ils sont « plongés dans la plus profonde désespérance » alors qu'ils devraient, pour la plupart, être relâchés, explique le P. Paul Jayanthan Pachchek.  

Oblat de Marie immaculée, congrégation religieuse très présente au Sri Lanka, le P. Jayanthan Pachchek a longtemps dirigé l'OSS (Oblate Social Service), la branche caritative des Oblats. A ce titre, il a pu pénétrer dans un camp situé à Vavuniya, ancien bastion des Tigres dans le nord du pays, où il a rencontré des Tamouls retenus par les autorités pour leur appartenance supposée aux forces armées des Tigres. La plupart d'entre eux avaient été recrutés, de force le plus souvent, lorsqu'ils étaient encore des enfants, explique le prêtre, certains ont été blessés physiquement, la plupart présentent des traumatismes psychologiques du fait de ce qu'ils ont vécu et de ne pas savoir ce que sont devenus leurs parents et les membres de leur famille. Beaucoup des détenus sont encore très jeunes, souffrent de dépression ou de troubles du sommeil.  

Selon le religieux catholique, ces hommes et ces femmes, même s'ils ont combattu sous l'uniforme du LTTE, ne doivent pas être maintenus en détention car, du temps où ils combattaient, ils n'avaient pas le choix : le LTTE les maintenaient sous la contrainte les armes à la main. Dans les cinq camps spéciaux où le P. Jayanthan Pachchek a pu intervenir, des secours ont été distribués à près de 2 000 détenus. Des nécessaires de toilette, des journaux et des magazines, parfois des vivres frais, comme du poisson, de la viande et des légumes, ont été ainsi passés aux détenus. L'OSS a également été autorisé à faire passer des bibles et des chapelets aux chrétiens ainsi que des livres de prière aux hindous.  

Au total, il est estimé que Colombo maintient dans ces camps spéciaux quelque 11 000 personnes, hommes et femmes, suspectés d'avoir fait partie des Tigres. Les organismes internationaux, y compris  la Croix-Rouge internationale, et les grandes ONG n'ont pas eu accès aux 17 camps où l'armée sri-lankaise organise l'interrogatoire de ces détenus. Le 24 novembre dernier, Human Rights Watch a dénoncé l'opacité maintenue par Colombo autour de ces camps, dénommés par les autorités « centres de réhabilitation ». L'organisation de défense des droits de l'homme a souligné que, si Colombo avait accepté, sous les pressions internationales, de vider peu à peu les camps qui abritent des populations civiles tamoules (1), il ne devait pas en profiter pour prolonger la détention sans jugement de ceux qu'il soupçonne d'être des ex-rebelles. « Le gouvernement retient de nombreux Tamouls soupçonnés d'appartenance au LTTE sans que leurs droits fondamentaux, garantis par les lois sri-lankaises et le droit international, soient respectés. L'ouverture des camps de personnes déplacées ne doit pas servir d'excuse pour cacher un nouveau mouvement de détentions arbitraires », peut-on lire dans le communiqué de Human Rights Watch.  

Ces dernières semaines, la Commission européenne et le département d'Etat américain ont émis de virulentes critiques à l'encontre du gouvernement sri-lankais et de sa politique de respect des droits de l'homme. Le rapport de la Commission mentionnait ainsi plusieurs assassinats perpétrés par la police, des soldats et des groupes paramilitaires progouvernementaux, de nombreux cas de torture et des disparitions. Il précisait aussi le manque de volonté et de moyens dans la police pour enquêter sur ces violations des droits de l'homme. Enfin, il ajoutait qu'un certain nombre de lois d'urgence déjà existantes avaient été prorogées et autorisaient la détention arbitraire sans aucun contrôle. Ainsi soumis à la pression de la communauté internationale, Colombo répond en mettant en avant sa bonne volonté. Récemment, Mahinda Samarasinghe, ministre des droits de l'homme, a ainsi déclaré dans la presse locale que le ministère de la Justice étudiait une mesure d'amnistie et un plan de retour à la vie civile pour les soldats de base de l'ex-rébellion tamoule.  

(1) Voir EDA 518

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