Benoît XVI et les prêtres : La paroisse et les jeunes (3)

Rencontre avec le clergé de Rome (Jeudi 26 février)

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ROME, Mercredi 4 mars 2009 (ZENIT.org) – Le 26 février, le pape Benoît XVI a rencontré les curés et les prêtres du diocèse de Rome, comme il le fait chaque année en début du carême. Les prêtres ont posé huit questions, sur différents thèmes, au pape.

Nous publions ci-dessous une synthèse de la troisième question, et la réponse de Benoît XVI.Question 3

Le père Giuseppe Forlai, vicaire de la paroisse « San Giovanni Crisostomo », située au nord du diocèse, a souhaité interroger le pape sur deux aspects de « l’urgence éducative ». Alors que les jeunes prêtres sont souvent appelés à changer de paroisse, le père Giuseppe Forlai a tout d’abord évoqué l’importance d’une présence continue du prêtre aux côtés des jeunes, d’une certaine « stabilité » pour pouvoir « éduquer » sur la durée. Il a ensuite mis en avant la nécessité de former les jeunes culturellement, parce qu’un « jeune sans culture peut devenir le pauvre de demain ».

Benoît XVI – Commençons par le second point. Disons qu’il est plus vaste et, dans un certain sens, plus facile aussi. Il est certain qu’un patronage paroissial dans lequel on ne ferait que des jeux, dans lequel on ne ferait que consommer des boissons, serait absolument superflu. Le sens d’un patronage doit réellement être celui de la formation culturelle, humaine et chrétienne d’une personnalité qui doit devenir mature. Sur ce point, nous sommes parfaitement d’accord et il me semble qu’il y a, aujourd’hui particulièrement, une pauvreté culturelle : on sait beaucoup de choses mais il n’y a pas de cœur, il n’y a pas de lien intérieur parce qu’il manque une vision commune du monde. Et c’est pourquoi une solution culturelle inspirée de la foi de l’Eglise, de la connaissance de Dieu qu’elle nous a donnée, est absolument nécessaire. Je dirais que c’est cela la fonction d’un patronage : qu’un jeune trouve non seulement des activités pour son temps libre, mais qu’il trouve surtout une formation humaine intégrale qui complète sa personnalité.

Naturellement, le prêtre éducateur doit lui-même être bien formé et être présent dans la culture d’aujourd’hui. Il doit posséder une grande culture, pour pouvoir aider les jeunes à entrer dans une culture inspirée de la foi. J’ajouterais naturellement que le point d’orientation de toute culture est finalement Dieu, Dieu présent dans le Christ. Nous voyons aujourd’hui qu’il y a des personnes qui ont beaucoup de connaissances mais qui n’ont pas d’orientation intérieure. Dans ce cas, la science peut être dangereuse pour l’homme parce que si l’homme n’a pas d’orientations éthiques profondes, elle l’abandonne à l’arbitraire, et il avance, privé des orientations nécessaires pour devenir réellement un homme. En ce sens, le cœur de toute formation culturelle, particulièrement nécessaire, doit sans aucun doute être la foi : connaître le visage de Dieu qui s’est révélé dans le Christ, et avoir ainsi un point d’orientation pour toute la culture, qui, autrement, est désorientée et déstabilisante. Une culture sans connaissance personnelle de Dieu et sans connaissance du visage de Dieu dans le Christ est une culture qui pourrait être destructrice, parce qu’elle ne reconnaît pas les orientations éthiques nécessaires. En ce sens, il me semble que nous avons réellement une mission de formation culturelle et humaine profonde, qui s’ouvre à toutes les richesses de la culture de notre temps, mais qui nous donne aussi un critère, un discernement pour montrer dans quelle mesure il s’agit d’une culture véritable et dans quelle mesure elle pourrait devenir une anti-culture.

La première question est beaucoup plus difficile pour moi – la question est aussi adressée à Son Eminence -. Elle concerne la durée du séjour du jeune prêtre pour que celui-ci puisse donner une orientation aux jeunes. La relation personnelle (du jeune) avec l’éducateur est sans aucun doute importante, de même que celle de pouvoir compter sur une certaine durée pour s’orienter ensemble. Et, en ce sens, je suis d’accord sur le fait que le prêtre, point de référence pour les jeunes, ne peut changer tous les jours, sinon les jeunes perdent justement cette orientation. Mais d’un autre côté, le jeune prêtre doit aussi faire des expériences différentes dans des contextes culturels variés, pour arriver finalement à acquérir le bagage culturel nécessaire pour être, comme curé, un point de référence à long terme dans la paroisse. Et je dirais que, dans la vie d’un jeune, les dimensions du temps sont différentes de celles d’un adulte. Les trois années, de 16 à 19 ans, sont au moins aussi longues et importantes que les années entre quarante et cinquante ans. C’est à ce moment-là, en effet, que la personnalité se forme : c’est un chemin intérieur de grande importance, de grande extension existentielle. C’est pourquoi je dirais que trois ans pour un vicaire, c’est une bonne période pour former une génération de jeunes ; et il peut ainsi, d’autre part, connaître d’autres contextes, expérimenter d’autres situations dans d’autres paroisses, enrichir son bagage humain. C’est une période assez longue pour avoir une certaine continuité, un chemin éducatif de l’expérience commune, de l’apprentissage comme être humain. Par ailleurs, comme je l’ai dit, trois ans dans la jeunesse constituent un temps décisif et très long, parce que c’est là que se forme réellement la personnalité future. Il me semble donc que l’on pourrait concilier les deux besoins : d’une part, que le jeune prêtre ait la possibilité de vivre des expériences diverses pour enrichir son bagage d’expérience humaine ; d’autre part, la nécessité de rester un temps déterminé avec les jeunes pour les introduire réellement dans la vie, pour leur enseigner à être des personnes humaines. En ce sens, je pense qu’il faut concilier les deux aspects : des expériences diverses pour un jeune prêtre et la continuité de l’accompagnement des jeunes pour les guider dans la vie. Mais je ne sais pas ce que le cardinal vicaire pourrait nous dire en ce sens.

Cardinal vicaire :

Très Saint Père, je suis naturellement d’accord avec ces deux exigences, la nécessité de conjuguer ces deux exigences. Il me semble, pour le peu que j’ai pu constater, qu’on conserve à Rome une certaine stabilité des jeunes prêtres dans les paroisses, pendant au moins quelques années, sauf exceptions. Il peut toujours y avoir des exceptions. Mais le vrai problème, parfois, naît de graves exigences ou de situations concrètes, surtout dans les relations entre curé et vicaire – et je touche ici un point sensible – et aussi la rareté des jeunes prêtres. Comme j’ai eu l’occasion de le dire quand vous m’avez reçu en audience, un des graves problèmes de notre diocèse est justement le nombre des vocations au sacerdoce. Personnellement, je suis persuadé que le Seigneur appelle, qu’il continue à appeler. Peut-être devrions-nous aussi faire plus. Rome peut donner des vocations, elle les donnera, j’en suis convaincu. Mais dans cette question complexe, s’insèrent parfois de nombreux aspects. Je crois que nous avons vraiment garanti une certaine stabilité et je ferai tout mon possible pour me conformer aux grandes lignes que nous a indiquées le Saint-Père.

© Copyright du texte original en italien : Librairie Editrice du Vatican
Traduction : Zenit

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ZENIT Staff

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