ROME, Mercredi 23 avril 2008 (ZENIT.org) - « Nous sommes parfois considérés comme des personnes qui ne parlent que d'interdictions. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité ! », affirme Benoît XVI dans le discours qu'il a adressé aux jeunes, à New York, le 19 avril dernier. Nous publions ci-dessous la deuxième partie de ce discours. (Pour la première partie cf. Zenit du 21 avril).

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Avez-vous remarqué le nombre de fois où la liberté est revendiquée sans jamais une référence à la vérité de la personne humaine ? Il y a ceux qui affirment aujourd'hui que le respect de la liberté de la personne individuelle rend injuste la recherche de la vérité, y compris la vérité sur ce qui est bien. Dans certains milieux, parler de la vérité est considéré comme une source de discussions et de divisions et on préfère donc réserver cela à la sphère privée. Et à la place de la vérité - ou plutôt de son absence - s'est répandue l'idée qu'en donnant de la valeur à tout sans distinctions, on assure la liberté et on libère la conscience. C'est ce que nous appelons le relativisme. Mais quel est l'objectif d'une « liberté » qui, ignorant la vérité, poursuit ce qui est faux ou injuste ? A combien de jeunes a-t-on proposé une aide qui, au nom de la liberté et de l'expérience les a conduits à une accoutumance aux stupéfiants, à la confusion morale ou intellectuelle, à blesser, à la perte du respect de soi, et même au désespoir, et ainsi, tragiquement et tristement, au suicide ? Chers amis, la vérité n'est pas une imposition. Elle n'est pas non plus un simple ensemble de règles. C'est la découverte de Quelqu'un qui ne nous trahit jamais ; de Quelqu'un en qui nous pouvons toujours avoir confiance. En cherchant la vérité nous finissons par vivre selon la foi car, en définitive, la vérité est une personne : Jésus Christ. C'est la raison pour laquelle la liberté authentique n'est pas le choix de « se désengager de ». C'est le choix de « s'engager pour » ; rien de moins que sortir de soi et se laisser associer à l'« être pour les autres » du Christ (cf. Spe salvi, 28).

Comment pouvons-nous alors en tant que croyants, aider les autres à marcher sur le chemin de la liberté qui conduit à l'épanouissement et au bonheur durable ? Tournons-nous à nouveau vers les saints. De quelle manière leur témoignage a-t-il véritablement libéré d'autres personnes des ténèbres du cœur et de l'esprit ? La réponse se trouve dans le noyau de leur foi - de notre foi. L'incarnation, la naissance de Jésus, nous dit que Dieu trouve vraiment une place parmi nous. Il n'y a plus de place à l'auberge mais il entre par l'étable, et il y a des personnes qui voient sa lumière. Elles reconnaissent le monde sombre et fermé d'Hérode, pour ce qu'il est, et suivent en revanche l'étoile qui brille et les guide dans le ciel nocturne. Et quelle lumière répand-elle ? Vous pouvez ici vous souvenir de la prière prononcée lors de la très sainte nuit de Pâques : « O Père, toi qui, par ton Fils, lumière du monde, nous as transmis la lumière de ta gloire, allume en nous la flamme vivante de ton espérance ! » (cf. Bénédiction du feu). Et ainsi, dans une procession solennelle avec nos cierges allumés, nous nous sommes passé la lumière du Christ les uns aux autres. C'est la lumière qui « triomphe du mal, lave nos fautes, redonne l'innocence aux pécheurs, la joie aux affligés, dissipe la haine, nous apporte la paix et humilie l'orgueil du monde » (cf. Exsultet). C'est la lumière du Christ à l'œuvre. C'est le chemin des saints. C'est la magnifique vision de l'espérance - la lumière du Christ vous invite à être des étoiles pour guider les autres, en marchant sur la route du Christ qui est la route du pardon, de la réconciliation, de l'humilité, de la joie et de la paix.

Cependant, nous sommes parfois tentés de nous refermer sur nous-mêmes, de douter de la force de rayonnement du Christ, de limiter l'horizon de l'espérance. Courage ! Fixez votre regard sur nos saints ! La diversité de leurs expériences de la présence de Dieu est une invitation à redécouvrir la largeur et la profondeur du christianisme. Laissez votre imagination se promener librement le long de l'expansion illimitée des horizons du disciple du Christ. Nous sommes parfois considérés comme des personnes qui ne parlent que d'interdictions. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité ! Ce qui caractérise un authentique disciple du Christ, c'est le sens de l'émerveillement. Nous sommes devant ce Dieu que nous connaissons et aimons comme un ami, devant l'immensité de sa création et la beauté de notre foi chrétienne.

Chers amis, l'exemple des saints nous invite alors à considérer quatre aspects essentiels du trésor de notre foi : la prière personnelle et le silence, la prière liturgique, la charité vécue et les vocations.

Le plus important est que vous développiez une relation personnelle avec Dieu. Cette relation s'exprime dans la prière. De par sa nature même, Dieu parle, écoute et répond. Saint Paul nous rappelle en effet que nous pouvons et devons « prier sans cesse » (cf. 1 Th 5, 17). Loin de nous replier sur nous-mêmes et de fuir les hauts et les bas de la vie, à travers la prière nous nous tournons vers Dieu et, à travers Lui, nous nous tournons les uns vers les autres, y compris les personnes marginalisées et celles qui suivent des voies qui ne sont pas celles de Dieu (cf. Spe salvi, 33). Comme les saints nous l'enseignent de manière particulièrement vivante, la prière devient l'espérance en acte. Le Christ était leur compagnon de toujours, avec lequel il parlait à chaque instant sur leur chemin au service des autres.

Il y a un autre aspect de la prière dont nous devons nous rappeler : la contemplation dans le silence. Saint Jean, par exemple, nous dit que pour accueillir la révélation de Dieu il faut d'abord écouter et ensuite répondre en annonçant ce que nous avons vu et entendu (cf. 1 Jn 1, 2-3 ; Const. Dei Verbum, 1). N'avons-nous pas peut-être un peu perdu l'art d'écouter ? Laissez-vous un peu d'espace pour entendre le murmure de Dieu qui vous appelle à la bonté ? Chers amis, n'ayez pas peur du silence et du calme, écoutez Dieu, adorez-le dans l'Eucharistie ! Laissez sa parole façonner votre chemin comme un développement de la sainteté.

Dans la liturgie nous trouvons l'Eglise tout entière en prière. Le mot « liturgie » signifie la participation du Peuple de Dieu à « l'œuvre du Christ prêtre et de son Corps qui est l'Eglise » (, 7). En quoi consiste cette œuvre ? Elle se réfère avant tout à la Passion du Christ, à sa mort et sa résurrection et à son ascension - ce que nous appelons « Mystère pascal ». Elle se réfère aussi à la célébration de la liturgie elle-même. Les deux significations sont en effet liées de manière inséparable, car cette « œuvre de Jésus » est le véritable contenu de la liturgie. A travers la liturgie, l' « œuvre de Jésus » est continuellement mise en contact avec l'histoire ; avec notre vie, pour la façonner. Nous avons ici un nouvel aperçu de la grandeur de notre foi chrétienne. Chaque fois que vous vous réunissez pour la messe, quand vous allez vous confesser, chaque fois que vous célébrez un des sacrements, Jésus est à l'œuvre. A travers l'Esprit Saint, il vous attire vers lui, dans son amour sacrificiel pour le Père, qui devient amour pour tous. Nous voyons ainsi que la liturgie de l'Eglise est un ministère d'espérance pour l'humanité. Votre participation pleine de foi est une espérance active qui aide à maintenir le monde - les saints comme les pécheurs - ouvert à Dieu ; voilà la véritable espérance humaine que nous offrons à chacun (cf. Spe salvi, 34).

Votre prière personnelle, v os moments de contemplation silencieuse et votre participation à la liturgie de l'Eglise vous rapprochent de Dieu et vous préparent également à servir les autres. Les saints qui nous accompagnent ce soir nous montrent que la vie de foi et d'espérance est aussi une vie de charité. En contemplant Jésus sur la croix nous voyons l'amour sous sa forme la plus radicale. Nous pouvons commencer à imaginer le chemin de l'amour sur lequel nous devons avancer (cf. Deus caritas est, 12). Les occasions pour avancer sur ce chemin sont nombreuses. Regardez autour de vous avec les yeux du Christ, écoutez avec ses oreilles, ayez les mêmes sentiments que lui et pensez avec son cœur et son esprit. Etes-vous prêts à tout donner pour la vérité et la justice, comme Il le fit ? Beaucoup des exemples de souffrance auxquels nos saints ont répondu avec compassion se trouvent encore dans cette ville et ses alentours. Et de nouvelles injustices sont apparues : certaines sont complexes et dérivent de l'exploitation du cœur et de la manipulation de l'esprit ; notre habitat commun, la terre elle-même, gémit aussi sous le poids de l'avidité consumériste et de l'exploitation irresponsable. Nous devons écouter profondément. Nous devons répondre avec une action sociale renouvelée qui naisse de l'amour universel qui ne connaît pas de limite. Ainsi, nous serons sûrs que nos œuvres de miséricorde et de justice deviendront une espérance en acte pour les autres.

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Traduction réalisée par Zenit