Il faut utiliser la ruse non pour s’assurer un avenir sur terre mais au Ciel

Homélie du P. Cantalamessa (dimanche 23 septembre)

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ROME, Vendredi 21 septembre 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile du dimanche 23 septembre, proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.

Evangile de Jésus Christ selon saint Luc 16, 1-13

Jésus disait encore à ses disciples : « Un homme riche avait un gérant qui lui fut dénoncé parce qu’il gaspillait ses biens. Il le convoqua et lui dit : ‘Qu’est-ce que j’entends dire de toi ? Rends-moi les comptes de ta gestion, car désormais tu ne pourras plus gérer mes affaires.’
Le gérant pensa : ‘Que vais-je faire, puisque mon maître me retire la gérance ? Travailler la terre ? Je n’ai pas la force. Mendier ? J’aurais honte. Je sais ce que je vais faire, pour qu’une fois renvoyé de ma gérance, je trouve des gens pour m’accueillir.’
Il fit alors venir, un par un, ceux qui avaient des dettes envers son maître. Il demanda au premier : ‘Combien dois-tu à mon maître ? – Cent barils d’huile.’ Le gérant lui dit : ‘Voici ton reçu ; vite, assieds-toi et écris cinquante.’ Puis il demanda à un autre : ‘Et toi, combien dois-tu ? – Cent sacs de blé.’ Le gérant lui dit : ‘Voici ton reçu, écris quatre-vingts.’
Ce gérant trompeur, le maître fit son éloge : effectivement, il s’était montré habile, car les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière.
Eh bien moi, je vous le dis : Faites-vous des amis avec l’Argent trompeur, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles.
Celui qui est digne de confiance dans une toute petite affaire est digne de confiance aussi dans une grande. Celui qui est trompeur dans une petite affaire est trompeur aussi dans une grande.
Si vous n’avez pas été dignes de confiance avec l’Argent trompeur, qui vous confiera le bien véritable ? Et si vous n’avez pas été dignes de confiance pour des biens étrangers, le vôtre, qui vous le donnera ? Aucun domestique ne peut servir deux maîtres : ou bien il détestera le premier, et aimera le second ; ou bien il s’attachera au premier, et méprisera le second. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’Argent. »

© http://www.aelf.org

Faites vous des amis avec la richesse

L’Evangile de ce dimanche nous présente une parabole qui a un côté particulièrement actuel ; celle de l’administrateur infidèle. Le personnage principal est le fermier d’un propriétaire terrien, figure très populaire également dans nos campagnes lorsque le système du métayage était en vigueur.

Comme les meilleures paraboles, celle-ci est comme un drame en miniature, plein de mouvement et de changements de scène. La première scène a pour acteurs l’administrateur et son patron et se termine par un licenciement sec : « …tu ne pourras plus gérer mes affaires ». Le fermier n’essaie même pas de se défendre. Il a mauvaise conscience et sait parfaitement que ce que le patron a découvert est vrai.

La deuxième scène est un monologue de l’administrateur qui vient tout juste de se retrouver seul. Il ne s’avoue pas vaincu ; il se demande immédiatement comment il peut remédier à cette situation pour se garantir un avenir.

La troisième scène (l’administrateur et les paysans) révèle l’escroquerie qu’il vient d’élaborer à cet effet : « ‘Et toi, combien dois-tu ? – Cent sacs de blé.’ Le gérant lui dit : ‘Voici ton reçu, écris quatre-vingts’ ». Un cas classique de corruption et de faux bilan qui fait penser à des épisodes analogues fréquents dans notre société, souvent à une échelle bien plus grande.

La conclusion est déconcertante : « Ce gérant trompeur, le maître fit son éloge : effectivement, il s’était montré habile ». Jésus approuve-t-il ou encourage-t-il la corruption ? Il faut rappeler la nature très spéciale de l’enseignement à travers les paraboles. La parabole ne doit pas être transférée en bloc et avec tous ses détails sur le plan de l’enseignement moral, mais uniquement pour ce qui concerne l’aspect que le narrateur souhaite valoriser. Et l’idée que Jésus a voulu inculquer avec cette parabole est claire. La patron loue l’administrateur pour son habilité, c’est tout. Il n’est pas dit qu’il est revenu sur sa décision de licencier cet homme. En fait, étant donné sa rigueur initiale et la rapidité avec laquelle il a découvert la nouvelle escroquerie, il n’est pas difficile d’imaginer la suite, non racontée, de l’histoire. Après avoir loué l’administrateur pour sa ruse, le patron doit l’avoir sommé de restituer immédiatement le fruit de ses transactions malhonnêtes, ou d’expier sa faute par une peine de prison s’il n’était pas en mesure de payer sa dette. Ceci, c’est-à-dire la ruse, est aussi ce que Jésus loue, en dehors de la parabole. Il ajoute en effet, comme un commentaire des paroles de ce patron : « car les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière ».

Face à une situation d’urgence, alors que tout son avenir était en jeu, cet homme a fait preuve de deux choses : d’une détermination extrême et d’une grande habileté. Il a agi rapidement et intelligemment (même si ce n’était pas de manière honnête) pour se mettre à l’abri. C’est ce que vous devez faire, vous aussi – affirme Jésus à ses disciples – pour mettre à l’abri, non pas l’avenir sur terre qui dure quelques années, mais l’avenir éternel. Un philosophe antique (Sénèque) affirmait qu’il n’est donné à personne de posséder la vie mais à tous de l’administrer. Nous sommes tous des « administrateurs » ; nous devons par conséquent faire comme l’homme de la parabole. Il n’a pas renvoyé le problème au lendemain, il n’a pas attendu de pouvoir y penser à tête reposée. Ce qui est en jeu est trop important pour le laisser au hasard.

L’Evangile lui-même propose diverses applications pratiques de cet enseignement du Christ. Celle sur laquelle il insiste le plus concerne l’utilisation de la richesse et de l’argent : « Eh bien moi, je vous le dis : Faites-vous des amis avec l’Argent trompeur, afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles ». Ce qui revient à dire : faites comme cet administrateur ; faites des amis de ceux qui un jour, lorsque vous serez dans le besoin, pourrons vous accueillir. Ces amis puissants, nous le savons, sont les pauvres, étant donné que le Christ considère que ce que l’on donne au pauvre, c’est à lui en personne qu’on le donne. Les pauvres, disait saint Augustin, sont, si nous le souhaitons, nos transporteurs et nos porteurs : ils nous permettent de transférer, dès à présent, nos biens, dans la maison que l’on est en train de construire pour nous dans l’au-delà.

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ZENIT Staff

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