Le dialogue interreligieux, par l’ambassadeur du Liban près le Saint-Siège

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Analyse de l’ambassadeur Abi Assi (4)

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ROME, Jeudi 7 juin 2007 (ZENIT.org) – Le dialogue interreligieux et surtout avec l’islam a fait l’objet d’une analyse particulière par l’ambassadeur du Liban près le Saint-Siège. L’ambassadeur également rappelé la position du Saint-Siège pour la paix au Moyen Orient: « Pour mettre un terme à la crise et aux souffrances qu’elle occasionne dans les populations, il importe de procéder par une approche globale ».

L’une des particularités du Saint-Siège, « c’est qu’il n’a pas d’intérêts matériels à défendre, et que son action est désintéressée », rappelait en même temps l’ambassadeur du Liban près le Saint-Siège, M. Naji Abi Assi (cf. Zenit des 22 et 24 mai, et 6 juin 2007).

Le diplomate est en effet intervenu, le 15 mai, sur le thème : « Le Rôle et les Fonctions d’une Représentation Diplomatique auprès du Saint-Siège », dans le cadre du cours intitulé « L’Eglise catholique et la politique internationale du Saint-Siège », et de la session sur « Le Corps diplomatique : les Nonciatures et les Représentations Diplomatiques auprès du Saint-Siège », qui s’est tenue à l’Université Pontificale grégorienne, à Rome.

Le cours s’adressait à des diplomates du monde arabe pour faire connaître l’Eglise catholique et était promu par la Fondation « La Gregoriana » et l’Institut International « Jacques Maritain ». La séance était présidée par le cardinal Jean-Louis Tauran.

« La priorité en ce qui vous concerne et en ce qui concerne les diplomates venant des pays du pourtour méditerranéen à forte dimension musulmane, est de rechercher les voies et moyens susceptibles de contribuer à l’instauration d’une paix juste et globale au Moyen-Orient, qui est le berceau des trois religions monothéistes ; de même que la promotion d’un dialogue interreligieux, interculturel et intercivilisationnel, pour mieux se connaître, se comprendre et se respecter, pour dissiper les malentendus et les fausses perceptions, et relever ensemble les grands défis globaux qui interpellent l’humanité tout entière », faisait obser l’ambassadeur.

« Quelles sont les bases du dialogue interreligieux ? Existe-t-il des structures ici même, pour l’initier et le poursuivre ? », interrogeait-il en soulignant « l’interdépendance entre l’interreligieux et l’interculturel3, et en avertissant: « il faut toujours se garder de confondre le dialogue interreligieux, avec le dialogue entre l’Islam et l’Occident ».

« L’Eglise est en effet universelle et défend des valeurs universelles, qui interdisent tout recours à la force et à la violence dans les relations humaines et internationales », soulignait l’ambassadeur du Liban.

Les bases du dialogue
L’ambassadeur se référait à la délcaration concliaire Nostra Aetate: « Dans son discours à l’occasion de l’audience pontificale avec les ambassadeurs des pays membres ou observateurs de l’Organisation de la Conférence islamique en date du 25 septembre 2006, le Pape Benoît XVI a rappelé les propos du Concile Vatican II, tels qu’énoncés par la Déclaration ‘Nostra Aetate’ qui représente en sa troisième partie, la Charte du dialogue islamo-chrétien : « L’Eglise regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu Un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes, et aux décrets duquel, même s’ils sont cachés, ils s’efforcent de se soumettre de toute leur âme, comme s’est soumis à Dieu Abraham, à qui la foi islamique se réfère volontiers ». »

Il citait encore ce passage de la déclaration: « Si, au cours des siècles, de nombreuses dissensions et inimitiés se sont manifestées entre les chrétiens et les musulmans, le Concile les exhorte tous à oublier le passé et à pratiquer sincèrement la compréhension mutuelle, ainsi qu’à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté ».

Une nécessité vitale
Puis il citait cet autre passage du discours de Benoît XVI aux communautés musulmanes à Cologne le 20 août 2005: « Le dialogue interreligieux et interculturel entre chrétiens et musulmans ne peut se réduire à un choix passager. Il est en effet une nécessité vitale, dont dépend en grande partie notre avenir ».

L’engagement pour la vérité
Il précisait: « Concernant les erreurs, la réconciliation et le pardon, le Pape Benoît XVI n’a pas hésité à apporter ce témoignage dans son premier discours de vœux au corps diplomatique en date du 9 janvier 2006 : « L’engagement pour la vérité ouvre la voie au pardon et à la réconciliation. En ce qui la concerne de manière spécifique, l’Eglise catholique condamne les graves erreurs accomplies dans le passé, tant de la part d’une partie de ses membres que de ses institutions ; et elle n’a pas hésité à demander pardon. L’engagement pour la vérité l’exige ». »

Par ailleurs, le diplomate soulignait que ce dialogue se caractérise par quatre éléments: l’existence d’une « doctrine vaticane du dialogue (qui s’exprime essentiellement dans la Déclaration ‘Nostra Aetate’ publiée le 28 octobre 1965) », d’un « interlocuteur unique et Suprême (le Pape) », d’une ‘’structure (constituée par le ‘Conseil Pontifical interreligieux’ et la ‘Commission spéciale chargée de promouvoir du point de vue religieux les relations avec les musulmans) » et d’un « instrument d’étude et de compréhension de l’Islam : le P.I.S.A.I ».

« Par contre, faisait-il observer, il n’y a pas d’interlocuteur unique et officiellement reconnu de l’Islam ».

Comment favoriser le dialogue
Favoriser ce dialogue requiert donc, faisait observer M. Abi Assi, « d’encourager les Chefs religieux et civils à effectuer des visites régulières au Saint-Siège, notamment le Secrétaire Général de l’Organisation de la Conférence islamique, le Roi du Maroc bien sûr, le Secrétaire Général de la Ligue des Etats arabes, des personnalités comme Sheikh al Azhar ou l’ancien Président Khatami (qui a été effectivement reçu en audience par le Pape Benoît XVI le 4 mai dernier). Le dernier voyage du Pape Benoît XVI en Turquie en novembre 2006, est un exemple des climats d’entente et d’apaisement que ce genre de visites et de rencontres peuvent engendrer ».

Le deuxième moyen évoqué est que « les diplomates peuvent stimuler le débat intellectuel, en organisant ou en parrainant des colloques, des séminaires, des exhibitions, des cycles de conférences, des rencontres, sur les thèmes du dialogue, de la paix, de la justice et du développement ».

Un troisième moyen consiste à « œuvrer à la création d’organes permanents de dialogue avec le Saint-Siège, en mesure d’assurer le suivi et la coordination, et de réagir rapidement face à des situations de tension, de danger ou de crise ».

Le diplomate libanais faisait observer que le Liban justement est appelé dans ce domaine « à jouer un rôle bien spécifique ».

Le rôle spécifique du Liban
Et d’expliquer: « Parlant de mon pays le Pape Jean-Paul II a dit ce qui suit : « Le Liban est plus qu’un pays, c’est un message, un message de liberté et de co-existence ». Par ailleurs l’Exhortation apostolique post-synodale ‘Une Espérance Nouvelle pour le Liban’ , adressée par Sa Sainteté le Pape Jean Paul II aux religieux et à tous les fidèles du Liban, en date du 10 mai 1997, consacre une partie importante aux relations avec les musulmans, au dialogue islamo-chrétien, à la convivialité, à la solidarité avec le monde arabe et à la paix et la réconciliation ».

Il y voit « un programme à suivre de près par la mission diplomatique libana
ise près le Saint-Siège et toute partie intéressée par le dialogue ».

« Nous n’aurons par le temps de parler du Moyen-Orient et de la Palestine, auxquelles il faudrait peut-être consacrer un colloque spécial, quoique ces thèmes ont été discutés lors des séances du 10 et du 11 mai.
Pensez que les missions diplomatiques près le Saint-Siège sont particulièrement actives sur ces points cruciaux ».

Une solution globale au Moyen Orient
Il citait « la position officielle du Très Saint-Père à ce sujet, tel qu’exprimée lors de la cérémonie de présentation des vœux du corps diplomatique le 8 janvier 2007 :  » Le Moyen-Orient est aussi source de grandes inquiétudes. Aussi ai-je voulu adresser une lettre aux catholiques de la région à l’occasion de Noël, pour exprimer ma solidarité et ma proximité spirituelle avec tous, et pour les encourager à poursuivre leur présence dans la région, sûr que leur témoignage sera une aide et un soutien en vue d’un avenir de paix et de fraternité. Je renouvelle mon appel pressant à toutes les parties en cause sur l’échiquier politique complexe de la région, avec l’espoir que se consolideront les signes positifs entre Israéliens et Palestiniens, enregistrés au cours des dernières semaines. Le Saint-Siège ne se lassera jamais de répéter que les solutions armées n’aboutissent à rien, comme on l’a vu au Liban, l’été dernier. L’avenir de ce pays passe nécessairement par l’unité de toutes ses composantes et par des relations fraternelles entre les différents groupes religieux et sociaux. Cela constitue un message d’espérance pour tous. Il n’est pas possible de se satisfaire non plus de solutions partielles ou unilatérales. Pour mettre un terme à la crise et aux souffrances qu’elle occasionne dans les populations, il importe de procéder par une approche globale, qui n’exclue personne de la recherche d’une solution négociée et qui tienne compte des aspirations et des intérêts légitimes des différents peuples concernés ; notamment, les Libanais ont droit à voir respectées l’intégrité et la souveraineté de leur pays : les Israéliens ont le droit de vivre en paix dans leur Etat ; les Palestiniens ont droit à une partie libre et souveraine. Si chacun des peuple de la région voit ses attentes prises en considération et se sent moins menacé, la confiance mutuelle, se renforcera « . »

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ZENIT Staff

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