Du 4 au 8 décembre se tient à Séville en Espagne le IIe Congrès international des confréries et de piété populaire. Nous publions ci-dessous le texte dans son intégralité du message que le Saint-Père a adressé aux participants de ce congrès.
Chers frères et sœurs,
Par ces lignes, je voudrais m’associer aux journées d’étude sur les confréries et la piété populaire que vous organisez dans cette ville de Séville, berceau des saints et d’un peuple qui vit avec ferveur les expressions de sa foi jusqu’à les assimiler à son tissu social.
Je voudrais souligner trois défis qui figurent dans votre programme, en les proposant comme une supplique que nous adressons à Dieu, en demandant au Père l’efficacité évangélisatrice de nos efforts, au Fils la beauté de notre travail et à l’Esprit Saint un cœur plein de charité cachée qui nous permette d’aller à la rencontre des autres, même de façon silencieuse.
Notre vie est un pèlerinage, une station continue de pénitence qui, selon l’heureuse expression de saint Manuel Gonzalez, nous pouvons proposer comme « un voyage aller-retour qui commence, à l’aller, dans le Christ et se termine dans le peuple », il commence dans le peuple et au retour et se termine dans le Christ » (Obras completas II, n. 1884). L’efficacité évangélisatrice de votre proposition réside dans cette naissance au Christ, et de la foi reçue en famille ; de l’expérience de vivre et de partager cette foi dans la fraternité ; de cette sortie avec vos prêtres, à partir de la paroisse, de l’église de votre saint patron, de la Cathédrale, avec les autres prêtres, à l’église Cathédrale, avec les autres Confréries, montrant que nous sommes un Peuple en marche vers Dieu.
Tous différents et tous unis, d’où une beauté sublime. Qu’il est attachant de voir les enfants dans leurs costumes d’enfants, faisant des travaux d’enfants : portant l’eau, les corbeilles d’encens, se sentant importants dans ce qu’ils font, et en même temps aspirant à grandir, à porter le costume des grands, pour pouvoir porter la croix, pour pouvoir se mettre sous le manteau de leur Sainte Mère. La beauté de cette diversité est aussi une école, c’est un chemin : Saint Emmanuel a commencé à danser comme enfant de chœur devant le trône du Corpus Domini et il a consacré sa vie d’évêque et de saint à le servir.
D’autre part, sa beauté se perçoit dans cette union parfaite qui naît de la combinaison de tant de particularités, de ministères, d’œuvres et d’associations qui, avec ténacité et patience, se fondent les unes dans les autres. C’est avant tout la beauté du Christ qui nous rassemble, qui nous appelle à être frères et sœurs, et qui nous pousse à porter le Christ dans la rue, à le porter dans le village pour que tous puissent contempler sa beauté. Quelle joie de voir la procession accompagnée par le rythme d’une prière silencieuse, qui bouleverse le cœur de ceux qui la voient.
Que l’on porte ou que l’on accompagne, que l’on porte un habit de pénitent ou un chapelet, c’est la même ferveur, le même amour, notes d’une même partition qui tracent ensemble un chant de louange.
Combien de larmes sont versées dans ces moments-là, « pleurant avec le Christ qui pleure », accompagnant le Christ abandonné, mettant leur cœur tout près du Cœur du Christ » (idem, n. 1891), au point de passer, comme dirait Saint Emmanuel, pour des « fous », des fous d’amour. C’est ce que font beaucoup de ceux qui les voient pensant qu’un tel effort n’a pas de sens. Mais ils sont fous d’amour pour Dieu, tellement désireux de toucher le cœur de leur peuple, de l’amener à Dieu.
Un voyage de retour, à partir des gens que nous avons rencontrés dans la rue, à qui nous avons montré la beauté de Jésus, de son Église, de son histoire, de cet amour « fou », pour retourner à Dieu. Saint Emmanuel nous assure : « Hélas, messieurs, le peuple […] a faim de vérité, d’affection, de bien-être, de justice, de ciel et, peut-être, sans s’en rendre compte, de Dieu » et “les larmes de son cœur » (idem, n. 1900), les larmes déchirantes de son âme, ne peuvent nous laisser indifférents. Notre station imaginaire de pénitence continue son chemin vers la Sainte Église Cathédrale, vers le Tabernacle où le Seigneur nous attend, devant Lui nous présentons ces cœurs, afin que Dieu le Père fasse croître la graine que nous avons essayé de semer. Ce Pain vivant est le seul qui puisse satisfaire la faim de notre société, un pain qui est né pour être donné, pour être consommé, et qui, depuis l’autel, nous appelle à dialoguer avec lui, pour être notre consolation et notre repos.
En tant que peuple en chemin, en ordre presque martial, qu’il porte sa croix ou qu’il soit sous le manteau de sa Mère bénie, nous sentons que nous sommes le champ de Dieu, semence du royaume, et c’est en sa présence que nous rentrons chez nous pour continuer à révéler cette joie, cette beauté, cet amour débordant, qui se communique à nos enfants, à nos familles, à nos amis, à nos voisins. Dans ce moment d’intimité, nous demandons à Jésus de nous donner la force de nous rejoindre dans ce pèlerinage, dans cette procession et dans la vie, ensemble nous continuerons à porter le Christ, à l’emmener dans les rues pour qu’il puisse entrer dans tous les cœurs.
Chers frères et sœurs, je dois vous avouer quelque chose, le texte que j’ai proposé à votre méditation par saint Manuel Gonzalez, ne parle pas de dévotion, de liturgies publiques ou de prière contemplative. En réalité, elle parle de l’œuvre sociale de l’Église, de l’engagement des laïcs pour la transformation du monde, de la nécessité de rapprocher la tendresse de Dieu pour les hommes qui souffrent dans leur corps et leur âme. Mais ses paroles reflètent le même amour, celui de « porter » le Christ dans la procession, de porter chaque jour la croix que le Seigneur nous propose, ou pour porter sur nos épaules le frère ou la sœur que nous rencontrons prostrés sur le sol, comme le ferait le Bon Pasteur, c’est la même charité cachée que nous trouvons dans le tabernacle de la Sainte Église Cathédrale, et dans le tabernacle de notre église titulaire. C’est cet amour que nous prenons du Christ et que nous apportons au Christ avec ce peuple, dans un aller-retour continu qui constitue notre existence terrestre.
Voici notre souhait et notre supplication devant le Dieu trois fois saint.
Que Jésus vous bénisse et que la Sainte Vierge veille sur vous, et n’oubliez pas de prier pour moi.
Fraternellement vôtre,
François